Maman a tort part d’un postulat original : défiger l’expression « stage d’observation » imposé aux élèves de troisième pour mieux le raccorder aux enjeux de l’observation tels que définis par les moralistes. Anouk porte en effet un regard neuf et dépourvu de préjugés sur le monde de l’entreprise, dans lequel elle pénètre pour la première fois, et c’est à son niveau, à sa hauteur, à partir de sa compréhension que nous allons également découvrir ce microcosme. La caméra choisit de la suivre dans un quotidien oscillant entre la répétition de tâches inutiles (mais officielles) et la poursuite d’une enquête essentielle (mais interdite), glissant sans cesse de la comédie dramatique au thriller avec une certain agilité. Marc Fitoussi se saisit du récit comme d’une métaphore de l’adolescence, période de remise en question du modèle parental que des questions fragilisent, que des secrets soudainement révélés fracturent, période d’affranchissement – se substituer à sa mère en prenant rendez-vous avec la victime – et de dépendance extrême, en témoigne l’appel à l’aide envoyé depuis l’hôtel (« je suis perdue »). Le réalisateur bénéficie de l’interprétation remarquable de ses comédiennes, mention spéciale à Émilie Dequenne et à la jeune Jeanne Jestin.