Introduction

David Cronenberg, mal vu par les Américains mais apprécié par les Français et les Canadiens, est un réalisateur très complexe, ou plutôt complet.
Dans les années 70-80, il réalise des films d'épouvantes, souvent liés aux transformations du corps humain: Il joue avec le spectateur en détruisant progressivement des personnages attachants.
Il enchaîne ensuite les thrillers psychologiques, assez simples mais violents et osés.
En 1999, il signe son film, un film étrange mais intelligent ayant une portée très profonde et philosophique: eXistenz.
De 2000 à 2010, il explore le sujet de la vengeance dans des thrillers violents comme a History of Violence et les Promesse de l'Ombre.
Après 2010, il décide de se consacrer à la destruction morale d'un homme, non pas par son entourage mais par lui-même.
En 2012, il, réalise Cosmopolis qui fut un échec commercial.
Cette année, il choisit de pointer du doigt Hollywood en proposant des caractères complexes et torturés, dans Maps To The Stars.
C'est la suite logique de sa filmographie:
Après la destruction du corps, la destruction morale d'un homme à cause d'un drame, Maps to The Stars était donc le film parfait.



Analyse

Maps to the Stars est un film génial: Au lieu de se concentrer sur les faits, il préfère s'accrocher aux relations des personnages en livrant un film très théâtral (parfois légèrement surjoué), fait quasiment que de dialogues.

Le but du film n'est pas de créer une action, mais plutôt de créer des caractères opposés et très poussés qui s'opposent au final. C'est un véritable défi d'écriture, le défi étant relevé avec grand brio. Les personnages sont des Hommes torturés, chacun a ses problèmes et ses raisons d'être; Cronenberg nous présente ici des personnalités antipathiques: le jeune acteur de 13 ans, détestable et égocentrique, le personnage de Julianne Moore, totalement dingue et prête à tout pour obtenir son rôle (La meilleure scène du film étant pour moi celle où elle se met à chanter joyeusement en se réjouissant de la mort du bébé d'une amie, lui assurant le rôle), ainsi qu'une jeune pyromane folle de son frère. Les jeunes sont détruits par la société, s'attachant à des valeurs morales très basses comme le sexe ou la violence.


Le film reflète l'industrie du cinéma: les personnages eux-même en sont des métaphores. Malgré le fond horrible et repoussant, portrait des malheurs Hollywoodiens et des stars complexées, la mise en scène est sobre, belle, quasiment attirante, avec des couleurs vives et des teintes chaudes, ce qui représente l'aspect extérieur du cinéma Américain.

On plonge facilement dans l'histoire grâce aux dialogues réalistes et aux personnages atypiques. Ce film possède seulement deux points négatifs à mon sens. Malheureusement, le premier est assez conséquent: Cronenberg, en voulant faire une oeuvre parfaite et des personnages très approfondis, a sacrifié le divertissement.
Le deuxième, c'est l'histoire d'inceste omniprésente pendant une grande partie du film et pour moi assez inutile. D'accord, ça traduit les complexes des personnages. Mais cela reste assez bancale, donnant une information non importante au public; car, ne l'oublions pas, les personnages sont des images de la société Hollywoodienne, et je ne vois pas quel est le rapport entre l'inceste et l'industrie cinématographique.


La mise en scène est excellente (comme dans tous les Cronenberg d'ailleurs). Les teintes et couleurs sont très travaillées, variant selon les personnages et scènes. La lumière est omniprésente pendant quasiment tous le film, rappelant le caractère très ostentatoire du cinéma qui cache pourtant des acteurs harcelés et des scénaristes oubliés.
Les plans sont incroyablement intelligents et travaillés. Tout en restant simples, ils permettent de se plonger dans la peau des personnages. Le cadrage est très serré, filmant le plus souvent un personnage à la fois; cela traduit l'egocentricité des stars, coupées des autres par leur soif de reconnaissance.

Je me dois bien sur de parler d'une des dernière scènes, où une femme brûle sous les propres yeux du spectateur, ne provoquant pas la moindre sensation de tristesse. La scène est très bien filmée, mais les effets spéciaux sont très mauvais.
Je pense que c'est un choix scénaristique de la part de Cronenberg:
La réalité semble irréaliste et froide tandis que le cinéma est beau et émouvant. C'est ce qu'enseigne ce film à travers ces personnages si glaçants.



Le jeu d'acteur est assez bon. Julianne Moore joue très bien, mais surjoue dans quelques scènes, c'est ce qui donne ce côté théâtral au film. Mia Wasikowska et Evan Bird sont vraiment très crédible, collant parfaitement dans leurs personnages de dégénérés. Par contre, je ne comprend pas le choix de Cronenberg de vouloir absolument faire paraître Robert Pattinson, acteur assez moyen pour un film si grandiose.

La musique est intéressante, pas très présente dans le film mais quand même travaillée. On remarque d'ailleurs que la musique se coupe brusquement entre chacune des scènes, ce qui amplifie l'impression que chaque ambiance, chaque atmosphère appartient à un personnage précis.


Au final, on a un film incroyable signé David Cronenberg, véritable défi scénaristique à la mise en scène ingénieuse, portrait de la société Américaine et de l'industrie Hollywoodienne, le tout interprété par de très grand acteurs. Note: 16/20
jeunecinéphile
8
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le 30 mai 2014

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jeunecinéphile

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