le 6 déc. 2025
Le clan retrouvé
Enfin, la lumière. La projection sulfureuse d’Intermezzo, trip hypnotique, sensoriel et problématique enfermé dans une boîte de nuit avait propulsé la saga Mektoub dans les limbes, engluée dans les...
Application SensCritique : Une semaine après sa sortie, on fait le point ici.
Kechiche revient pour prendre son titre de meilleur réalisateur en activité... Après le scandale Intermezzo, les accusations à son encontre, on aurait pu croire que la suite de Mektoub ne sortirait jamais et qu'il resterait en retraite plus ou moins forcée.
Heureusement Mektoub 2, le retour est sorti et quel plaisir de retrouver les personnages à peu près là où on les avait laissé. C'est presque comme si sept années n'étaient pas passées depuis le premier film. Mais cette fois j'ai lu le bouquin de Bégaudeau dont s'est inspiré depuis trop longtemps pour essayer de faire la moindre comparaison...
Le premier truc qui frappe, c'est qu'on est sur un film plus sage, les scènes sont moins longues, c'est le Kechiche le plus court depuis l'Esquive, au niveau du montage on a moins cette effet de redondance qui donnait tant d'intensité au premier film. On est sur quelque chose qui semble beaucoup plus apaisé (sauf la fin forcément), il y a limite une intrigue, on a moins de plan sur le cul des actrices (je me demande si ça n'a pas été recadré volontairement pour éviter toute polémique)... On retrouve donc Kechiche, mais plus calme et si certes le sexe, les amours restent au centre du film, le film va moins loin que les précédents dans leur radicalité esthétique. En fait une fois le film fini, je me dis ok, c'était génial, mais pourquoi ça ne dure pas 4h ? Comment on a pu échouer collectivement en tant que société pour qu'une version plus longue de ce truc ne sorte pas ? Je suppose que l'on saura plus tard si c'était vraiment la version que Kechiche voulait sortir ou s'il a malgré tout eu des contraintes pour que le film se tienne dans une durée raisonnable, alors que le propre du cinéma de Kechiche n'est pas d'être raisonnable.
Mais à part cette volonté d'en avoir plus (et l'espoir d'avoir la suite prochainement) j'ai adoré. Chaque séquence est l'occasion de créer une sorte de brouhaha, où tout le monde se parle, s'interpelle, se coupe la parole et quel plaisir. On a dans ces moments toute l'énergie que peut offrir le cinéma, quelque chose qui se rapproche de ce qu'est une conversation dans la vraie vie, avec ses purs moments de malaise... Le couple d'américain qui force pour manger au resto, le groupe qui accueille une fille de 18 ans et qui veulent absolument l'amener au mariage de leur amie... On voit à chaque fois l'inconfort que procure ces situations, les dynamiques de groupe... et franchement on se marre bien, malgré le malaise absolu.
Et puis il y a Amin... le mec est beau gosse, toutes les filles sont attirées par lui, il est talentueux, mais il est trop timide... La façon dont son personnage est introduit est vraiment drôle, ses amis essayent de le caser, sa mère essayer de le caser : "ah mon fils/ah mon cousin/ah mon ami, il est trop bien" alors que lui dans le film il ne fait rien, il ne fait qu'observer... gêné... On a par exemple la fille qui lui avait un peu mis un râteau dans le premier film qui est à fond sur lui maintenant (je ne sais pas si Intermezzo explique ça) et Amin qui ne sait pas comment réagir face à de telles avances explicites... Un régal...
Parce que le Amin n'a d'yeux que pour Ophélie et il y a une séquence incroyable entre eux où ils planifient leur escapade à Paris, où il lui fait comprendre que c'est elle qu'il veut en assumant comme un bonhomme et où elle le regarde avec les yeux qui brillent. Des frissons...
C'est tout le cœur du film : baiseront-ils ? Le reste autour n'est finalement du bruit, qui prend trop de place dans la vie d'Amin... notamment lorsqu'il doit rattraper les conneries de son cousin et qui le conduisent à être lui aussi dans la merde. Et c'est pour ça que la fin est si forte, c'est le chaos total alors que lui devrait être en train de danser et de choisir entre la brune et la blonde... D'une certaine façon ça m'a fait penser à la vie de la Graine et le Mulet. L'image quasi finale d'Amin marchant sur les quais et qui rencontre son pote est absolument terrible. On sent qu'on est vraiment sur la fin d'une parenthèse dorée, qu'on est sur la fin de la période de flirt bien gentille et innocente. Plus rien ne pourra être comme avant... Cette fin c'est un véritable coup de massue. Rien n'est résolu, quel choc, Kechiche arrive à abattre aussi bien le spectateur que son personnage. Brillant.
Et même politiquement c'est intéressant, parce qu'on a des arabes qui boivent, qui fument, qui font la fête, qui font des études, qui aiment la bonne bouffe, le cinéma... bref tout ce que l'on pourrait attendre de l'image d’Épinal d'un bon français et pourtant dès qu'il y a une merde la police va immédiatement les cibler eux plus que la bourgeoise blanche... Et surtout plutôt que de réellement chercher à savoir ce qui se passe, ce qui l'intéresse c'est leurs mœurs, qui couche avec qui... Comme dans la Faute à Voltaire ou dans l'Esquive elle est montrée comme arbitraire, arrivant comme un cheveu dans la soupe et interrompant des moments qui ne devraient pas l'être.
Bref si le film commence gentiment, qu'il semble plus sage même dans sa scène de sexe, la fin est terrible et intense, marquant comme un terrible retour au réel après une parenthèse estivale enchantée faite de flirt et d'espoir. Génial...
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Créée
le 30 nov. 2025
Critique lue 2.7K fois
le 6 déc. 2025
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