"Mon pire cauchemar" : quand les contraires s’attirent… jusqu’à l’essoufflement

Il y a des films qui démarrent fort, pleins de promesses, et qui, sans jamais sombrer totalement, laissent derrière eux un petit goût d’inachevé. "Mon pire cauchemar" d’Anne Fontaine fait partie de ceux-là.

Le concept a de quoi séduire : confronter le monde feutré, intellectuel et bourgeois d’Agnès (Isabelle Huppert) à celui, brut, décomplexé, voire un brin paillard de Patrick (Benoît Poelvoorde), ouvrier sans filtres mais débordant de vie. Tout semble fait pour que l’opposition fonctionne : le décor, les costumes, les postures sociales, jusqu’au langage. Et pendant une bonne demi-heure, ça fonctionne à merveille. Les dialogues claquent, les situations font mouche, et le duo improbable prend vie avec un vrai plaisir de jeu partagé à l’écran.

Mais très vite, la mécanique s’enraye. Le film, qui semblait vouloir mêler comédie sociale et romance subversive, ne choisit jamais vraiment son camp. Le propos se dilue, les personnages secondaires deviennent des clichés ambulants, et les arcs narratifs – pourtant prometteurs – peinent à se développer de façon crédible ou marquante. On sent une volonté de faire coexister le rire et l’émotion, mais le dosage manque de justesse.

Cela dit, tout n’est pas à jeter – loin de là. La mise en scène, sans éclats, reste élégante. Et malgré un récit qui s’essouffle, le film réussit parfois à toucher juste, notamment dans ces moments suspendus où les masques sociaux tombent. On aurait aimé que le scénario pousse plus loin ces failles humaines au lieu de retomber dans des facilités scénaristiques.

Ma note : 6/10.

Un film charmant mais inégal, qui fait sourire sans vraiment émouvoir, et qui aurait mérité un peu plus d’audace ou de cohérence pour véritablement marquer. À voir pour le duo Huppert–Poelvoorde, qui reste le vrai atout de ce cauchemar finalement assez doux.