Tout d'abord, on se laisse porter. Ensuite, on croit comprendre l'apparente vérité de l'histoire. Puis on profite des mélopées carrément bien adaptées aux scènes pour se rattacher à quelque-chose de palpable, qui flotte dans l'air et à quoi on peut se raccrocher pour faire glisser les mots sur la page blanche après les avoir confusément amoncelés dans la boîte crânienne. Et au creux du film comme de la vague qui nous fait chanceler, on perd pied. Autant dans l'intérêt que dans le scénario. C'est qu'on a donc perdu le fil pour tisser cette longue et fuligineuse pelotte de laine. Alors on se laisse aller aux songes les plus intellos, comme entendre une quelconque émission sortie de France Culture. « Le plus troublant c'est la sensualité dont font preuve ces femmes ; l'une brune, l'autre blonde... qui petit à petit mettent à nu leurs personnalités outrageusement féminines pour finir par se dévêtir totalement, et faire corps avec l'esprit ; si je puis dire... ». Et puis on s'endort... Pour reprendre plus tard et adopter momentanément le vrai pays des songes : le seul à rivaliser avec les pires atrocités faites au sens par le sieur Lynch. A ce titre, Inland Empire me fait encore frémir... Et enfin, en bout de piste, comme pour se la jouer adepte chevronné de la toile, on y voit du Hitchcock : Fenêtre sur Cour, Psychose, entre autres... Mais aussi Fight Club, quand la part du cinéphile refoulée revient à la charge pour susurrer honteusement à l'oreille que la schizophrénie fait aussi partie intégrante du twist final...
Mais on n'y comprend surtout pas grand-chose la première fois qu'on le voit. Si bien qu'on ne fait qu'élaborer de nouvelles pistes, de parcours en parcours, skiant d'une stratégie à la suivante pour ravir la primeur de la découverte du mystère entourant l'intrigue. Puis, comme pour se rassurer et éloigner nos complexes, on se dit que Lynch fait sûrement comme dans ses autres films connus, Lost Highway en tête : un cinéma abracadabrantesque qui demande un master ès 7ème Art pour remettre les pièces du puzzle au bon endroit. Et puis, j'allais oublier... On, c'est moi... Et on se dit que ce film aurait bien besoin d'une deuxième séance. Mais plus tard, alors, car le peu d'économie de l'attention dont on dispose, couplée à la perte d'autonomie due à l'heure tardive, demande plutôt qu'on aille se coucher.
Adrast
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le 25 janv. 2011

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