Les thrillers sociaux ont ce petit quelque chose de très stimulant : ils vont à la fois dénoncer certains travers de société tout en cultivant une tension qui assurera l'efficacité de l'histoire, ainsi que l'exploitation du message. Night Call (auquel on préfèrera le titre original Nightcrawler) s'inscrit dans cette optique, et s'en sert pour critiquer les mass medias dans leur exploitation du sordide. Pas beaucoup de risque dès le départ. Et encore moins quand le film se met à insister sur les catastrophes touchant les blancs et les critères standards de titres qui font vendre. Les pratiques sont effectivement toujours en cours, mais nous sommes aussi déjà au courant. Le film n'a pas la prétention d'être original, mais ses dénonciations déjà vues ralentissent parfois plus l'histoire qu'autre chose. Chaque étape a son importance, mais certaines auraient pu être accélérées (comme le passage précédant le cambriolage où Louis n'a aucun scoop). La véritable force du film, c'est le cynisme qui l'anime, quand il cerne de jolis détails comme le reportage à sensation montrant les morts, mais surtout les courtes séquences où Louis prend la parole et laisse parler sa philosophie individualiste au cynisme abyssal. Rien n'existe en dehors de sa petite personne, et la façon dont il assume le monde qui l'entoure et le plie à ses perceptions matérialistes sont si noires qu'elles en deviennent géniales. Mais le film n'ira jamais plus loin, et joue même la caricature du méchant à deux reprises : lors de la mort de son concurrent, et surtout le sort final de son assistant, qui ne sert vraiment qu'à montrer qu'il n'est pas gentil. Intérêt douteux, qui ne peut même pas prendre le prétexte de filmer la mort en direct, celle ci ne sera pas diffusée, alors que la mort du tireur le sera. Un Paul Schrader aurait surement laisser son personnage se faire prendre une balle et continuant à filmer malgré son agonie, mais ici, on assistera bel et bien à un triomphe du cynisme (puisque tous se plient à son fonctionnement). C'est intéressant, mais sans choc à proprement dit. Le film s'est révélé plus efficace par l'initiation à la discipline (dans laquelle on ne commence qu'avec une radio et un camescope) et les détails pratiques du métier à risque que pour sa charge contre les pratiques des médias ainsi que leurs impératifs (dans le genre, on préfèrera le bien plus efficace Live! et sa perception de la télé réalité assez costaude question pratique). On apprécie quand même la très élégante photographie, la bande originale se fait quant à elle plutôt discrète, à tel point qu'on n'a pas de souvenir en sortie de salle. La jolie forme et l'efficacité de la trame relèvent donc un fond un peu pantouflard, et le film réussit finalement à se rendre sympathique, à défaut d'apporter vraiment quelque chose
Voracinéphile
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le 5 déc. 2014

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