« Palo Alto » illustre le renouvellement des « indie teen movies », incarnés aujourd'hui par Sofia Coppola (surtout avec « Bling Ring »), James Franco, Harmony Korine (depuis « Spring Breakers ») et, donc, Gia Coppola. Tous sont scénaristes en plus d'être réalisateurs et orientent leurs films selon une logique qui me semble similaire et que nous allons décortiquer ici.
Les thèmes qu'ils utilisent sont assez classiques dans le cinéma US indépendant : les personnages font systématiquement partie d'une jeunesse très aisée (donc blanche), laquelle occupe ses journées entre drogue, alcool, sexe et ennui. Bref, un univers semblable pour ne pas dire identique à celui élaboré par Bret Easton Ellis, qui a lui-même beaucoup influencé le cinéma depuis une vingtaine d'années. Comme lui, ces nouveaux réalisateurs entretiennent d'ailleurs un flou entre leur histoire personnelle et leurs œuvres : « Palo Alto », par exemple, est le fruit d'une collection de nouvelles écrites par James Franco et basées sur ses propres expériences. Et effectivement, lorsqu'il s'agit de faire intervenir son vécu concernant la jeunesse dorée américaine, Sofia et Gia Coppola ont sans doute des choses à raconter…
Et pourtant, Gia peine à se trouver un style propre. Elle fait du « Bling Ring » avec un an de retard, et le modèle de base n'était déjà pas bon. Car si ces thèmes sont communs à ces réalisateurs, ils partagent également un traitement similaire de la photographie, de la musique ou de l'écriture. Cette esthétique outrancière est sans doute là où ils se démarquent le plus des œuvres précédentes du ciné indé sur la jeunesse (Larry Clark en tête) : l'image est léchée, trop peut-être pour se faire une personnalité propre. C'est beau mais ça manque de style. Même chose pour le casting : Gia Coppola vit dans ce monde merveilleux où tout le monde est beau et élégant, la moindre tâche est écartée du tableau. Et putain, ça manque clairement de charisme chez ces gosses. Comme dans « Spring Breakers », James Franco semble être le seul qui se démarque un peu. La musique sert également la fadeur du propos, Gia Coppola se contente d'une musique d'ambiance qui a pour but de sublimer les images qu'elle couvre. La démarche de la réalisatrice est en fait quasi-publicitaire.

Une allégorie de ce que je pense de « Palo Alto » se situe dans le film, lorsqu'un des protagonistes, artiste de son état, peint devant un modèle avant de jeter directement son œuvre pourtant réussie à la poubelle. Ce film est sans le vouloir un exemple d'art éphémère : l’œuvre est sympa mais ne durera jamais dans le temps parce qu'elle manque d'audace et d'inventivité. On l'aura vite oublié.
Et je trouve ça vraiment dommage, parce que j'aime beaucoup les films portant sur la jeunesse dorée, plongée dans un monde vide de sens. On peut vraiment en tirer quelque chose de chouette sans changer radicalement la structure du film. J'ai l'impression qu'en modifiant une poignée de trucs, je pourrais réellement l'apprécier (c'est d'ailleurs pour cela que je lui octroie la moyenne, alors que je ne lui trouve aucun génie), lui et ses autres comparses : par exemple, faites comme L. Clark lorsqu'il a été dénicher Korine dans un skate-park, allez trouver vos acteurs dans la rue au lieu de piocher les membres de votre famille ou parmi les « teens » du moment. N'ayez pas non plus peur de montrer un téton lorsque votre film prend pour thématique principale le sexe, j'ai cru voir une version du film censurée par Famille de France. Et permettez-vous de prendre des risques, ça payera.
Hugo_Grellié
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le 26 nov. 2014

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Hugo Grellié

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