C'est fait main
Chaque créature cherche un jour à se détacher de son créateur… mais il y a toujours un prix. Fascinant et beau à la fois.
il y a 6 jours
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L’Étrange Festival 2025 a démarré, et c'est toujours un bonheur que de découvrir les nouvelles propositions singulières du cinéma mondial. Si j'ai toujours regretté de ne pas accorder assez d'intérêt à la compétition court métrage, je m'étais promis de rattraper le coup quoi qu'il arrive afin d'éviter de passer à côté de pépites ayant beaucoup de mal à devenir accessible par la suite comme Chew de Félix Dobaire, Plan-Plan Culcul de Alexandre Vignaud (si quelqu'un a un moyen de voir le court métrage, n'hésitez pas), Un Genre de Testament de Stephen Vuillemin, ou même Eeva de Lucija Mrzljak et Morten Tsinakov. A l'image de quand j'ai pu découvrir Stuffed de Louise Labrousse, Prends Chair d'Armin Assadipour ou même Dieu est Timide de Jocelyn Charles (dont l'absence en compétition de l’Étrange Festival surprend tant le film aurait parfaitement sa place), j'étais prêt à voir n'importe quoi tant que les propositions semblaient alléchantes. Ce fût le cas du programme 3 de la compétition officielle, composé exclusivement d’œuvres en animation qui promettaient un voyage aux mille imaginaires, pour le meilleur... et on espérait pas le pire. Dans le cas de Playing God, malgré que j'ai tenté d'aborder chaque courts métrages avec le minimum d'informations, j'ai eu beaucoup de mal à ignorer les informations élogieuses revenants de festivals et diffusé par Autour de Minuit, poids lourd de l'animation de genre à la française, qui produit et distribue le projet avec Um, présenté en ouverture de programme et qui n'a pas beaucoup convaincu. Malgré mes efforts pour ignorer le parcours du film en festival, l'attente était particulièrement haute malgré que ce fût l'un des courts métrages qui m'attirait le moins.
Je pense que de tous les courts métrages présentés dans le programme, Playing God est de loin celui avec l'animation la plus soignée. Le film est très impressionnant sur la manière d'animer chaque évolution du corps de son personnage principal des mains de son créateur. Chaque parties du corps, chaque muscles semblent avoir une dimension presque organique qui accentue d'avantage cette notion de vie offerte des mains de quelqu'un d'autre. Mais plus que l'animation de la marionnette, c'est l'animation du créateur qui est bluffante. Il aurait été facile d'animer la création du créateur en stop motion, puis de filmer le créateur en prise de vue réelle. Pourtant, l'acteur jouant le créateur est lui même sujet à la stop motion et est animé, image par image, des mains du réalisateur, avec une fluidité assez troublante de régularité. On a ainsi une forme de propos imbriqué, de création de la création, qui pousse d'avantage le questionnement sur l’œuvre qu'on est en train de regarder. Qui est le maitre de qui ? Est ce que l'artiste dans son atelier est maitre de ce qu'il fait ? Nous, en tant que spectateur, sommes-nous pas nous même dirigé et influencé par les pensées d'un artiste qui a créé une œuvre qui nous pousse à penser des choses anticipés en amont ?
Le souci étant que le film exploite que trop peu ces thématiques et ces possibilités, préférant d'avantage se contenter du récit du personnage de fiction cherchant inlassablement à échapper à son créateur, dans une lecture assez pauvre et déjà vu... d'une histoire qu'on connait depuis le début du cinéma d'animation. Il y a bien toute une dimension body horror, mais cette dimension est beaucoup trop en retrait face à une histoire à twist dont on anticipe très vite la finalité, et qui aurait dû être qu'un prétexte tertiaire à un propos plus vaste. On a un peu l'impression d'une création qui soit tente de réinventer ce qui a déjà été fait, soit n'a pas de grandes inspirations mis à part prouver un savoir faire technique (limitant ainsi l'utilité du film à celui d'un port folio qu'on regarderait pendant 9 minutes, soit 4 minutes de trop en temps normal), soit pour proposer un propos de fond... et alors là il faudra m'expliquer ce qu'il faut tirer de positif. Alors qu'on pourrait se contenter d'un film très beau quoi que pas original, le court métrage vient à être insistant dans une forme de fatalité sur une possibilité d'uniformisation de la création lorsqu'elle tente d'échapper aux étreintes de son créateur, laissant suggérer que si cette dernière serait resté bien sagement entre les mains de son créateur, celle-ci n'aurait pas à perdre ce que d'autres ont perdus avant lui, promouvant une forme de restriction des libertés... que le réalisateur profite allègrement pour proposer une œuvre mettant en lumière ses capacités technique au détriment d'un bon scénario. Sans nécessairement accuser le réalisateur de délivrer un mauvais propos de fond, chose qui serait avant tout accidentelle, on est surtout déçu que, même dans son pessimisme, le film n'aille pas plus loin que ce que d'autres ont déjà fait.
Playing God n'énerve pas tant par ce qu'il que par ce qu'il n'est pas. On est surtout déçu de voir le temps passé à la réalisation d'une animation qui ne sera même pas tant mise en avant, car au service d'une histoire qu'on a vu mille fois. A l'image de son personnage principal, le film s'uniformise et va rejoindre ses prédécesseurs dans l'oubli, alors qu'il aurait pu mieux réfléchir à un autre scénario.
8,75/20
N’hésitez pas à partager votre avis et le défendre, qu'il soit objectif ou non. De mon côté, je le respecterai s'il est en désaccord avec le mien, mais je le respecterai encore plus si vous, de votre côté, vous respectez mon avis.
Créée
le 11 sept. 2025
Critique lue 21 fois
Chaque créature cherche un jour à se détacher de son créateur… mais il y a toujours un prix. Fascinant et beau à la fois.
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