Quand on entend le synopsis de ce « Pris au piège - Caught Stealing » on pense tout de suite à un film d’action plongeant dans l’absurde, à l’instar d’un « Bullet Train », où le chat viendrait en McGuffin porter toute l’attention de l’intrigue. Mais comme un oignon de verre, Darren Aronofsky nous laisse entrevoir le vrai sujet de son film dès la première scène et les deux premières phrases de son synopsis : « Hank Thompson a été un joueur de baseball prodige au lycée, mais désormais il ne peut plus jouer. À part ça, tout va bien.».
Il faut dire, à la décharge du spectateur, que le duo Aronofsky-Huston s’est amusé à nous placer sur des rails. Le film s’emploie, dans son premier acte, à mélanger pertinence narrative et éléments de contextes pour rendre difficiles à discerner les fameux « fusils de Tchekhov ». Ainsi, quand vient le moment tant attendu du lancement de l’intrigue par cette altercation, le spectateur pensant connaître l’intrigue sur le bout de fusils, se retrouve vite surpris puis désemparé, ne sachant pas où le train Aronofsky-Huston va les emmener. Si Pris au piège - Caught Stealing ne prétend pas réinventer la roue, ou la locomotive, il offre cependant un vrai travail de fond dans l’inattendu, et surtout un vrai travail de suspens, au sein d’un chemin pourtant déjà tracé.
Une partie du travail est liée à la personnalité même de Darren Aronofsky qui aime faire souffrir ses héros, ayant un goût certain pour la vision assez organique, très concrète de leur physionomie. La supériorité d’âmes cassées sur leurs corps faibles. L’autre grand atout de ce travail de suspens, est lié à la comédie qui entoure le film. Le duo Aronofsky-Huston donne l’impression d’avoir posé ses personnages merveilleusement bien écrits dans un New York peu touristique, voir étouffant, et de les observer tenter d’arriver à leur fin. On remerciera entre autres l’écriture de ne pas avoir versé dans les personnages comiques mais plutôt dans des situations comiques d’un regard extérieur au sein d’une histoire très sérieuse. Les personnes peu réceptives à la grossièreté d’un personnage comme Russ pourrait même parler de comédie discrète, liée aux codes de son genre. Enfin, le travail de suspens et offert par un bon travail de réalisation globalement très bonne, qui vient, discrètement jouer sur la perception que l’on a de certains personnages, comme Yvonne ou Roman.
L’histoire de fond de « Pris au piège - Caught Stealing » c’est cette phrase, « À part ça, tout va bien ». Un personnage n’ayant jamais réussi à outrepasser son traumatisme, fuyant sa vie par peur d’y faire face. Cette ancienne vie est symbolisée par le baseball qui sacralise les regrets du personnage de Hank. C’est marqué par la réalisation qui fait de chaque nouveau jour le lendemain de cet accident, comme si son protagoniste n’avait pas réussi à exister après. Cette passivité dans l’intrigue est marquée par la première défaite d’Hank qui perd un rein contre un personnage bien plus faible que lui. L’intrigue amènera donc Hank à devenir actif, petit à petit, se rendant compte que rester en retrait l’empêchera de protéger ceux qu’il aime. C’est symbolisé à la fin par la scène de crash voulu par son personnage et surtout par la scène de la télévision dans lequel Hank se reflète, montrant qu’il sera maître de la prochaine émission de sa vie.
En conclusion, si « Pris au piège - Caught Stealing » ne prétend pas à être un maître du Thriller, il n’en reste pas moins un très bon divertissement ainsi qu’une œuvre réfléchie sur son genre. Pour ceux qui n’ont pas eu la malchance de profiter d’une bande-annonce trop bavarde en scènes clefs, le film arrive avec élégance à se montrer imperceptible. « Pris au piège - Caught Stealing » est un oignon de verre, et en son centre git une balle de baseball, qui avant de prendre la route, a probablement oublié de mettre sa ceinture de sécurité.
Si tu fuis ta peur, tu la laisses gagner