Real Steel par Ninesisters
Trop souvent, il est possible d'apprendre tout ce qu'il y a à savoir sur un film en vérifiant qui se trouve aux commandes ou qui incarne le personnage principal, et en regardant la bande-annonce. Dans le cas de Real Steel, nous nous retrouvons avec Shawn Levy (La Nuit au Musée) à la réalisation, Hugh Jackman et son air pas bourru pour un sou dans le rôle titre, Danny Elfman à la musique, Steven Spielberg en producteur exécutif, Dreamworks à la production et Disney à la distribution ; quant à la bande-annonce, elle montre des combats de robot à l'ambiance très sombre. Chacun de ces points pourrait résumer nombre de long-métrages, mais là, le mélange parait à la fois surréaliste et paradoxal. Il annonce pourtant bien la couleur.
Charlie Kenton est un ancien boxeur professionnel passé à la boxe robotique depuis que les robots ont remplacé les humains dans la plupart des sports de combat. Fauché, endetté, minable, perdant, et alcoolique, sa situation ne s'arrange pas lorsque, à la mort de son ex-femme, il hérite d'un gamin de 11 ans qu'il ne connait ni d'Eve ni d'Adam ; coup de pot : la tante du petit veut l'adopter, et son mari semble plein aux as. Il va donc négocier la vente de son fils, sans état d'âme, acceptant tout de même de le garder sous le coude pendant deux petits mois. Au début, les relations entre les deux sont tendues, jusqu'à ce qu'il s'avère que Max (c'est son nom) se passionne pour la boxe robotique. Ensuite, il trouve un robot déglingué dans une décharge, le répare, vous connaissez la suite : elle ne fait pas dans l'originalité.
Real Steel mélange 3 aspects distincts, et il convient d'insister sur le « distinct » : la relation père-fils, la relation entre le fils et son robot, et les combats.
Le relation père-fils rappelle ce que Shawn Levy avait déjà tenté de construire dans La Nuit au Musée, cette fois en plus prononcé. Les deux individus ne se comprennent pas, mais ils vont finalement se réunir à travers un rêve commun et une grande aventure. Cet aspect du film joue sur tous les poncifs possibles et imaginables, mais plutôt bien, avouons-le. Le seul léger bémol, c'est qu'un acteur vole complètement la vedette à l'autre ; en l'occurrence, Hugh Jackman fait vraiment peine à voir, car se faire éclipser par un jeune acteur de 11 ans qui illumine l'écran de sa présence, cela doit faire mal. Vraiment, il s'en sort très bien, et une part non négligeable de l'intérêt de Real Steel tient sur ses seules épaules.
La relation entre le gamin et son robot, c'est du pur Spielberg ; même si sa présence n'avait pas été indiquée dès le début, elle n'aurait fait strictement aucun doute, les quelques scènes de complicité entre les deux personnages dégoulinent littéralement de tout ce qui a fait son cinéma, et surtout celui des années 80, avec de très forte réminiscences de ET. A chaque fois, cela correspond à des séquences à la fois bluffantes concernant la technique, mais surtout attendrissantes, joyeuses, voire même touchantes.
Quant aux combats de robot, la progression de l'histoire autour de ce thème se montre là encore d'un classicisme achevé, mais cet aspect se distingue surtout par des combattants aux styles recherchés, et une réalisation épileptique, faite de flashs lumineux, d'un montage digne de clips particulièrement énervés, l'ensemble avec une ambiance à la fois violente, sombre, et même carrément anxiogène.
Et tout cela, dans un seul et même film. Les deux premiers points combinés donnent lieu à un film transgénérationnel classique, qui renvoie aux meilleurs heures de Steven Spielberg et de son compère Frank Marshall, et qui réussit à hisser le niveau un cran au-dessus lors des scènes de complicité entre le jeune héros et son compagnon robotique. Par contre, quand il s'agit des combats de robot, cela devient grisant et excitant – presque trop excitant, cardiaques s'abstenir – mais complètement à côté de la plaque. Cela donne à l'ensemble – notamment sur la première heure – l'impression de regarder un film bâtard, qui cherche sa voie, oscille entre plusieurs styles sans trouver le ton juste. Surtout, se pose la question du public visé : le côté Spielberg s'adresse plus aux enfants qu'aux nostalgiques des années 80, mais d'un autre côté, la violence et l'angoisse dégagées par les combats ne collent absolument pas au reste.
Real Steel représente 3 long-métrages en un seul. Individuellement, ces 3 aspects sont plus que corrects à défaut d'être exceptionnels, mais le mélange ne prend jamais. Ultime paradoxe, il arrive à proposer un final réellement prenant en ne se focalisant que sur la compétition, laissant aux oubliettes la relation entre le fils et son robot, pourtant le meilleur aspect du film. Difficile, avec un résultat aussi bâtard, d'émettre un avis tranché sur cette étrange mayonnaise.