A partir des années 2000, les remakes de film culte, en horreur comme dans d’autres genres, sont revenus à la mode à Hollywood et parmi ces projets, John McTiernan dont le nom est surtout nommé pour le cinéma d’action des années 80 et 90 en a réalisé deux : Thomas Crown et Rollerball qui a été, ce que les connaisseurs appellent, la goutte qui déborde du vase pour le cinéaste.


Pour ce qui est du film original de 1975, la découverte avait été une excellente surprise tant pour sa dystopie que pour son traitement et son écriture. Les scènes de rollerball était d’une brutalité surprenante pour l’époque et très bien dirigé et même réaliste avec l’absence de musique à ce moments et on était loin d’un simple sport brutal et mixant plusieurs disciplines destiné à du simple divertissement pour le public, la froideur qui ressortait des scènes extérieurs à celle sportive faisait son effet et le traitement du personnage de Jonathan une vraie réussite sur tout les points. Un film de science-fiction que je recommande chaudement aux fans du genre.


Hélas ce ne sera clairement pas le cas de son remake. Mais avant il faut savoir une chose : McTiernan n’est pas le premier à blâmer pour l’insulte que représente ce truc au film original. A la base, le réalisateur des très apprécié Predator, Piège de Cristal et Die Hard : une journée en enfer et de l’excellent A la poursuite d’Octobre rouge, avait une idée précise de ce qu’il désirait raconter dans son remake. En particulier des événements qui découlerait d’une révolution contre le système en place dirigé par les corporations regroupant en 6 départements les activités et besoin humain.


Seulement, il aura été viré de l’équipe pour le montage sur ce film et aura été condamné à la prison pour écoute téléphonique illégal de son producteur Charles Roven (qu’il soupçonnait de vouloir massacrer son tournage sur ce film). Ce scandale est directement en lien avec l’affaire Pellicano qui avait plusieurs enregistrements téléphonique illégaux des célébrités à Hollywood. Au final, le projet s’est retrouvé entre les mains des producteurs qui se sont chargés du montage final et en résulte, ici, l’un des plus gros sabotages qui m’ait été donné de voir. Et c’est pas étonnant que McTiernan ait renié ce film par la suite.


Les deux principales insultes de ce film à l’égard du film de Jewison sont, en premier lieu, de ne se concentrer que sur l’aspect sportif du produit de base. A aucun moment on ne prend un instant pour parler de la direction du monde par les multinationales contrôlant le monde, ni même développer un impact qu’elle aurait pu avoir sur nos personnages que ça soit Jonathan, Aurora, ni même Marcus. Tous ces personnages sont réduits à des stéréotypes que l’on pourrait retrouver dans n’importe quel teenage movie banal ou bon marché.


Et la seconde insulte concerne les matchs de Rollerball, non seulement ils sont édulcorés et aseptisé au possible rendant les matchs ennuyeux en plus d’être constamment accompagné de chanson pendant les matchs et de clip pour tenter, vainement, de les rendre dynamique (et deux titres de Rob Zombie, deux). Mais surtout, chaque joueur de n’importe quelle équipe est un minimum connu du grand public, Jonathan Cross en premier qui est déjà une vedette individuelle avant même le dénouement final.


L’individualité était un concept que ce sport, imposé par les cartels économiques mondiaux, visait à supprimer dans le premier film (chose qu’il faisait très bien), afin de conserver leur contrôle sur le monde par le divertissement auprès du public sachant que personne n’a jamais survécu bien longtemps et que personne ne se distinguait de la masse, que ça soit dans le sport ou les gens ordinaires.


Or ici, vu qu’on nous présente les actions des joueurs et que Jonathan (qu’ils ont écrit Jonathon dans ce film alors qu’ils prononcent le prénom de la même manière que dans l’original, faute impardonnable) est déjà une star reconnue, ça détruit instantanément l’intérêt même de Rollerball et le final n’a plus aucun impact contrairement à celui du premier film qui avait une symbolique forte et très bien amené.


Et s’il n’y avait que ça, le casting aussi est une grosse source de problème : aucun acteur ne livre une performance suffisamment convaincante. Chris Klein est beaucoup trop lisse en Jonathan en plus d’être un demeuré assez vide en terme de personnalité, LL Cool J qui joue la version 2002 de Marcus est réduit une interprétation trop basique du copain du héros pour qu’on en retienne grand-chose, Rebecca Romjin (alias Mystic dans X-Men 3) est juste mauvaise et mieux vaut pas trop parler de son personnage qui sert déjà de faire valoir pour mettre Jonathan en valeur (lors d’une scène de sexe gratuite, histoire de nous rappeler que Chris Klein vient d’American Pie… non c’était pas nécessaire) et je passe le reste qui sont là pour la figuration.


Mais le pire dans le lot, ça reste Jean Reno qui est totalement à côté de ses plombs en Petrovich (que ça soit dans la VF ou la VO tant son accent russe forcé énerve). En principe je n’ai rien contre lui, et en tant que doubleur il est excellent, même dans Da Vinci Code il était correcte bien que son personnage n’était pas incroyable. Mais là, même exprès ce n’est pas possible de jouer un cliché aussi saoulant, et si en plus il cabotine à mort avec ses crises de colère passagères, son accent russe (dés qu’il lâche un jolie VODKA c’est le festival) et son sourire de psychopathe permanent, il y a de quoi vouloir lui couper la langue et la donner à bouffer aux chats. Bref, d’une manière générale il n’y a pas grand-chose à attendre des acteurs, même dans le remake bien pourri d’Evil Dead il y avait plus d’effort.


Niveau musique, oubliez qu’il y a Eric Serra, aucun de ses morceaux reste en tête, l’effort est quasi absent et les ¾ de la musique de ce film est composé de titre Hard Rock ou Rock’n Roll lors des matches de Rollerball et vu comment ils sont utilisés, tout ce qu’ils arrivent à faire c’est américaniser les matches, chose encore plus grotesque que je développerais plus bas.


Le montage aussi vend du rêve, et je la place au même niveau qu’avec l’écriture sur ce coup. Si le style de réalisation de McTiernan se fait sentir par moment dans la mise en scène et les mouvements de caméra, le montage sabote intégralement tout ce film et le pire, c’est qu’il est visible du début à la fin : des sauts d’image et des cuts qui n’ont aucun sens, les ralentis placé n’importe comment (sérieux, pourquoi un ralenti sur Jonathan en train de répondre à Marcus ? Qu’est-ce que ça apporte ?), les images qui se répètent inutilement, certains plans qui se succèdent sans aucun sens ou encore la course-poursuite nocturne en night shot qui n’a aucun intérêt à être filmé de cette manière dans ce montage (à l’inverse du génial Sicario de Denis Villeneuve qui avait une vraie intention de réalisation mené jusqu’au bout en utilisant les plans à la première personne pour l’usage des lunettes à vision nocturne).


En voyant ça, on a juste l’impression que ce film n’est pas fini, à aucun moment j’ai eu l’impression de voir un film de SF qui avait été mené jusqu’au bout, même Le 13ème guerrier qui a souffert de beaucoup de désaccord entre John McTiernan et ses producteurs comme Michael Crichton étaient bien mieux monté (et surtout mieux écrit).


Quant au scénario, je fais relativement court puisque j’ai dis le principal plus haut : la première erreur de cette version finale, c’est d’avoir limité la satire du système au sport inventé qu’est le Rollerball.


Et même là ça ne marche pas, puisque vu que Jonathan est déjà une star reconnue par tous,


lorsque les gens dans les gradins se lèvent et scandent son nom à la fin du dernier match de Rollerball du film,


on ne ressent absolument rien puisque le climax est très mal mené, trop soft et que Jonathan a un très mauvais traitement.


La force même du premier film et de son climax résidait dans la violence de son climax :


brutal, sans musique, juste les cris du public qui se sont arrêté au moment ou il ne reste plus que Jonathan et deux joueurs dans le camp adverse (puisqu’il n’y a pas de limites de temps et ni règle et que tout le monde peut s’entretuer). Celui-ci survit et refuse de se plier aux règles de la société totalitaire en place et survit à leur épreuve en devenant une vedette à part entière aux yeux du public, violant donc le système et laissant le film sur cette note en proie à une révolution future.


Et bien sur, tout cela n’est pas présent ici. Sans compter que la critique sur le sport est plus balourde et peu original et qu’entre les clips, les commentateurs et tout le reste, le Rollerball est bien trop américaniser pour qu’on y croie une seule seconde. Et pourtant il y avait une idée de base sympa, comme faire dérouler l’action ailleurs qu’en Amérique pour y voir l’influence des cartels économique mondiaux, et le film était censée se centrer sur la révolution de cet univers et ça aussi c’était intéressante comme perspective. Mais McTiernan n’a jamais pu mener son projet à bout, et au final on a eu le droit à cette grosse merde.


Tout ce qui fait ce film n’est peut être pas une insulte au plus grand film de SF du monde, mais le charcutage des producteurs au montage et les réécritures du scénario détruisent quasiment tout potentiel en plus du casting peu convaincant et des choix musicaux et artistiques discutable. Donc le mieux qu’on ait à faire si on a vu cette bouse, c’est de l’oublier, car il est à classer dans les nombreux remakes foireux auquel on a eu droit.
Quant à McTiernan, son projet de film d’action Red Squad prévu prochainement est toujours en cours et il faut espérer que cette fois-ci il pourra mener son projet jusqu’au bout.

Créée

le 1 juin 2016

Critique lue 3K fois

7 j'aime

5 commentaires

Critique lue 3K fois

7
5

D'autres avis sur Rollerball

Rollerball
archibal
6

Comme sur des roulettes (russes)

Le bashing du film se comprend mais je le trouve excessif, le fait qu’il s’agisse du remake d’un film culte des années 70 n’a pas dû plaider en sa faveur. On ne peut pas nier que le film soit devenu...

le 14 sept. 2022

9 j'aime

7

Rollerball
Franck_Plissken
3

Rollerbeauf.

McT ayant déjà tâté du remake (l'excellent Thomas Crown en 1999), il décide de s'attaquer au mythique Rollerball de Norman Jewison. Malgré l'excellence -aux dires de ceux qui l'ont lu- de la première...

le 28 févr. 2017

8 j'aime

Rollerball
Maxime_T__Freslon
1

S-A-B-O-T-A-G-E !

A partir des années 2000, les remakes de film culte, en horreur comme dans d’autres genres, sont revenus à la mode à Hollywood et parmi ces projets, John McTiernan dont le nom est surtout nommé pour...

le 1 juin 2016

7 j'aime

5

Du même critique

Les Animaux fantastiques
Maxime_T__Freslon
5

Dans la continuité de ses prédécesseurs... mais pas pour le meilleur.

EDIT ! Y’avait autant de raison d’être enthousiaste et heureux de voir la saga sur le sorcier à lunette au cinéma que d’être inquiet et sceptique quand on voit la politique actuelle des studios...

le 18 nov. 2016

91 j'aime

15

Bohemian Rhapsody
Maxime_T__Freslon
4

God save the Queen !

Queen et le cinéma, c’est très loin de se limiter qu’à ce projet de biopic autour de son chanteur Freddy Mercury et de l’émergence du groupe au cours des années 70. La présence du groupe passe tant...

le 31 oct. 2018

82 j'aime

27

Blade Runner 2049
Maxime_T__Freslon
8

Loneliness and birth !

Dans la grande catégorie des suites tardives ou exploitation de licence qui n’ont pas été demandé, on peut trouver beaucoup de films qui ont vu le jour à l’aube de ce vingt-et unième siècle et...

le 4 oct. 2017

75 j'aime

4