Steve Mcqueen, tu as tout compris !

C'est après un troisième visionnage, et toujours aussi émue que je reprends un peu ma critique de ce somptueux film qu'est Shame.

Steve Mcqueen, le cinéaste, le plasticien, le méticuleux, rejoint son acteur fétiche (Michael Fassbender) pour un nouveau film qui, comme Hunger, ne vous laisse pas indemne. Que dire ?

Un film qui nous plonge dans l'horreur de l'addiction, sans pour autant juger son personnage principal. Michael Fassbender y est bluffant : animal, dangereux, tourmenté, autodestructeur... Encore une fois il y délivre une performance d'acteur inoubliable. On retrouve la fascination de Steve Mcqueen pour le corps, qui s'observait déjà dans Hunger avec les gros plans sur le corps décharné de Bobby Sand.
Ici, cette fascination, tout aussi morbide, est représentée par des scènes de sexe mécaniques, glauques, où Michael Fassbender donne de sa personne, puisqu'il n'a pas employé de doublure.
La relation frère/soeur est passionnante, la peur de l'intimité, l'handicap émotionnel du personnage y sont justement traités.

Presque au delà de la performance titanesque de Michael Fassbender, ce que je retiens c'est avant tout une mise en scène sublime. Chaque plan est d'une subtilité et d'une précision époustouflantes. C'est de boucles et de scènes prolongées à l'insoutenable que la mise en scène est construite. Michael Fassbender est souvent presque en hors-champ comme son personnage l'est dans sa propre vie.

Mais là où Steve Mcqueen est intelligent, c'est que ces scènes insoutenables ne sont pas que les scènes de sexe, mais bien autre chose: les plans sur Michael Fassbender dans les transports, dans l'ascenseur, Carey Mulligan... C'est là où il évite le voyeurisme et nous lie réellement aux personnages.
Autre bonne idée: ne pas nous montrer l'origine torturée des protagonistes, mais juste observer leur attitude dans le présent, soit montrer les faits, purement et simplement.