Sixième Sens... ou "Comment Shyamalan avait si bien commencé avant de chuter" !

En l’an 2000, un jeune cinéaste indien du nom de Manoj Night Shyamalan est sorti de nulle part avec un Thriller fantastique intrigant et probablement l’un des plus bluffant du cinéma, mais ce pauvre gars est maintenant tristement connu pour avoir subit une des plus grosses pertes de popularité parmi tous les réalisateurs Hollywoodien et qui en a été réduit à réaliser deux films de commande à la suite qui se sont révélés être particulièrement mauvais quand elles ne sont pas parmi les pires adaptation de série animé qui m’ait été donné de voir.

Mais pourtant, c’est paradoxal de voir à quel point on peut aussi bien démarrer une carrière pour finir en bas de l’échelle. La première fois que j’avais vu "Sixième Sens", il ne m’avait pas tant marqué que ça malgré un final à ne pas dévoiler pour laisser la surprise aux spectateurs, mais en le visionnant une deuxième fois après plusieurs mois, hier soir, j’étais complètement envoûté par cet œuvre, parce qu’à mes yeux il réussit sur quasiment tout les points et arrive à faire tout ce que les grands films doivent faire : faire ressentir des émotions aux spectateurs tout en ayant un scénario bien écrit (qu’il soit classique ou plus complexe), mais là je pense qu’on sera tous d’accord pour dire qu’on a été bluffé lors de sa sortie, car si il a été nominée aux oscars dans six catégories dont meilleur film, meilleur acteur dans un second rôle, meilleur réalisateur et meilleur scénario original, c’est largement justifié et pour ma part, c’est comme pour beaucoup mon film préféré de Shyamalan avec "Le Village".

Le premier point fort de ce film est son casting qui, ici, tout comme avec "Le Village", est parfaitement contrôlé et dirigé par Shyamalan et nous montre, tout d’abord, que Bruce Willis est largement capable de faire autre chose que des films d’actions plus ou moins bourrins, il est capable d’interpréter un personnage plus développé et évolué au niveau psychologique, et un petit mot sur la VF avec Patrick Poivey qui est toujours un plaisir à entendre pour doubler Bruce Willis. Malcolm est un psychiatre pour enfant qui est profondément bouleversé par Cole, un jeune enfant troublé par des phénomènes paranormaux qu’il est le seul à voir et qui fera revivre en Malcolm des souvenirs douloureux, en plus d’avoir une situation amoureuse chaotique et perturbante avec sa femme avec qui il essai de renouer.

Haley Joel Osment, est la révélation du film, et on comprend pourquoi, ce gosse savait quelle expression prendre quand il devait être effrayé par ce qu’il ne connaissait pas ou quand il devait être émotif ou bien affolé, mais c’était aussi dû à une très bonne direction de Shyamalan à l’époque mais Osment avait du mérite et le personnage de Cole qu’il interprète est très bouleversant mais aussi riche et étonnamment intelligent au point de comprendre les émotions d’autrui. Et la relation entre Cole et Malcolm est ingénieusement structurée et complexé pour les rendre tout les deux aussi tragiques qu’attachant et complet, Cole voit en Malcolm un homme qui apprécie mais qu’il pense incapable de l’aider tandis que Malcolm voit en Cole la possibilité de racheter les erreurs du passé et un symbole de ce qu’il n’a pas su sauver autrefois. Les personnages secondaires aussi sont très bouleversant et bien écrit, à commencer par la mère de Cole, Lynn, jouée par Toni Collette qui est surement le meilleur rôle féminin du film et également dramatique, elle cherche à comprendre désespérément son fils et pourquoi ce dernier a une attitude aussi anormale et on arrive à se sentir désolé pour elle. Olivia Williams aussi était très bouleversante, dans le rôle d’Anna et donc de la femme de Malcolm qui se révèle très crédible et convaincante.. Et bien sur, depuis Sixième Sens, Shyamalan a l’habitude de faire un petit caméo dans ses films comme le fait Tarantino et le faisait Hitchock et il est correct pour le peu de temps qu’on le voit. Donc pour le casting, les acteurs ont fait un travail quasi-parfait et la direction était parfaitement contrôlée de bout en bout, difficile de dire quoique ce soit de négatif sur ce point, les backgrounds et le développement sont bien amené et intelligemment écrit sur tout les points.

Le troisième point fort de ce film, c’est son ambiance et son scénario, qui sont gérés aux millimètres près, plus encore que dans Le Village qui était déjà un excellent film. Je reprochais à Shyamalan dans "Signes" de délaisser gravement son scénario au profil de l’ambiance du film, ce qui m’avait énormément énervé puisqu’un bon scénario est quand même l’ingrédient principal d’un bon film du réalisateur.

Mais ici, je ne sais pas ce qu’il avait mais le scénario est non seulement parfaitement cohérent et apporte les révélations en prenant son temps pour installer les éléments précurseur tout en s’intéressant aux personnages et à leur émotion, mais en plus de ça il arrive à surprendre et ce film a contribué à la naissance d’un nouveau genre avec "Incassable" (qui est très bon aussi mais pas autant que "Sixième Sens" ou "Le Village" quand même) et d’un nouvel élan du cinéma grâce au retournement final presque entièrement indevinable et qui laissait très très peu d’indices pour découvrir l’incroyable vérité.

Tout est parfaitement contrôlé et pensé aux moindres détails, même en essayant de revoir certaines scènes de près je n’arrive pas à trouver la moindre faille au scénario du film, c’est un modèle à suivre avec un rythme lent mais qui arrive à séduire et à nous capter grâce à ses personnages et à l’ambiance qui doit beaucoup à la mise en scène de film qui se révèle très ingénieuse et contribue à rendre l’atmosphère tantôt angoissante, tantôt dramatique et tantôt émotionnelle. D’ailleurs, parmi les astuces de mise en scène qui m’ont les plus intéressé, il y a le plan sur le cadre en miroir de Malcolm on l’on voit le reflet de lui et de sa femme le soir ou ils fêtent la distinction reçu par le personnage en tant que psychiatre pour enfant, ou encore les scènes réalisés sans montage ou sans l’utilisation du contre-champ et en tant réel qui semblent simple mais arrive à développer une ambiance pesante et à créer quelques frissons, rien que la première scène ou l’on suit la mère de Cole en train de faire le linge entre la cuisine et la lingerie jusqu’à ce qu’elle repasse à la cuisine et que tout les meubles sont ouvert en un temps record sans le moindre bruit relève de beaucoup de travail. Le seul reproche que je peux faire, c’est juste un jumpscare que je trouve plus désagréable qu’effrayant en milieu de film mais c’est un détail sans importance. A côté de ça, certaines scènes se révèlent particulièrement fortes que ce soit pour être pesante comme celle ou Cole découvre qui était son professeur dans son enfance et fait une crise de folie à ce moment, ou alors et surement ma scène préférée, celle ou Cole rend un service à sa grand-mère en parlant de son don à sa mère et en lui faisant part de ses pensées dans l’au-delà, lui disant qu’elle était fier d’elle chaque jour, c’est juste émouvant à voir.

Et l’ambiance n’arriverait pas à passer de l’angoisse à l’émotion en passant par le suspens avec la composition de, devinez qui, James Newton Howard (putain il est dans tout les films que je visionne ce mec ou quoi ?) qui sort une des meilleures orchestrations qu’il a composé avec la bande-son du Village (qui reste quand même mon préféré entre les deux), entre les murmures sur certaines musiques à frisson et certaines qui engendre l’émotion que sont censé nous procurer les personnages, le travail est excellent et je suis même surpris qu’il n’ait pas été nominé aux oscars pour la musique du film comme avec Le Village.

Sixième Sens de Shyamalan : intrigant, bouleversant, avec des personnages mémorables et une mise en scène ingénieuse et une histoire à la fois intelligente, tragique et déchirant sans jamais en faire trop et sombrer dans un tire-larme insupportable, en voyant ça je me dis que c’est triste de voir à quel point Shyamalan ait pu tomber aussi bas aujourd’hui en sachant que ce film et Le village font partie de mes films favoris. Et même en sachant qu’il a vite sombré avec ses trois derniers films, je reste quand même assez crédule pour espérer un éventuel retour en force avec Sundowning, et si ce film se révèle être un nouvel échec alors là, on pourra définitivement dire que cet homme n’a plus rien à apporter au cinéma.

Créée

le 26 août 2014

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