Je suis estomaqué. Simplement.


Après une nuit grandiose, passée aux quatre coins de la galaxie; où lorsque mon esprit s'enjoue de cette douce musique, de ces parfums si exotiques et que je me laisse bercer au creux d'un univers qui m'avait tant manqué, je n'aurai jamais imaginé un tel accueil.


Bien loin de toute tentation, je suis resté en marge depuis la sortie. Sacrilège, j'allais rater les quatre premiers jours de projections. Une première depuis la sortie de la Menace Fantôme.


Alors, au fond de ma grotte je me suis mis à fantasmer de ces grands opéras spatiaux. Ceux qui berçaient mon enfance et me poussaient à lever les yeux pour me sentir encore plus petit.


Secrètement, j’espérais fort ne pas devoir me contenter d'un autre film moyen. Trop attaché à la saga, je l'avoue, je n'ai jamais su faire preuve d'intégrité et me résoudre à qualifier les quatre derniers opus de ce qu'ils étaient vraiment...
Certes, Rogue One, m'avait fait vibrer, mais le contexte était différent. Et surtout, il n'y avait pas à faire fi de cette affreuse trame instaurée par Abrams, il y a deux ans. Ce "Premier Ordre", archétype sans saveur d'un Empire dont il fallait sans doute s'affranchir. Ce vilain ridicule, hors de proportion tant dans le fond que dans sa forme. Non, Rogue One ne dépendait pas des même enjeux.
Néanmoins, le revirement artistique entreprit, m'avait sans doute implanté l'idée que faire du neuf avec du vieux était possible. Et ce sans pour autant tomber dans le "fan service" de bas étage.
J'étais donc plein d'espoir.


Le moins que l'on puisse dire, c'est que je n'ai pas été déçu.


Alors, lorsque je dis en préambule que je suis estomaqué, c'est surtout face au déferlement de haine, et ces centaines de critiques incendiaires qui constellent la toile, à mon réveil.


Il semble maintenant évident que le "vrai fan"; j'entends par là; celui qui dort dans des draps floqués "Return of the Jedi" depuis son adolescence, celui qui fait la file par moins cinq degrés durant deux jours pour avoir une place à la première, celui-là même qui criait "trahison" devant Jar-Jar Bings... et bien, ce fan là est insatiable. Et par tous les Saints... qu'est-ce qu'ils sont nombreux aujourd'hui.


Loin de moi l'idée de me prétendre de cette trempe. Même si il est vrai que ma chambre reste ornée de plusieurs produits dérivés et autres statuettes: vestiges de mes premières payes d'ado, dépensées un peu bêtement sur ebay. Néanmoins, je pense pouvoir légitimement me qualifier "d'enthousiaste de la saga". Et à ce titre, j'avoue ne pas comprendre.


Voilà peut-être plus de vingt ans que j'attendais ce retour en grâce. Entretemps, et durant les dix-sept dernières années, j'avais dû serrer le poing fort dans ma poche. Tenter vainement de défendre l'indéfendable et essayer d'expliquer aux détracteurs que les costumes de l'épisode 2 n'étaient sans doute pas aussi laids.
Mais dans le fond, j'étais triste. Triste et vide, sans doute.
Vide, parce que petit-à-petit, je réalisais qu'il allait falloir faire deuil. Que ce manque de "ce petit rien" qui fait du cinéma quelque chose de magique sous la rétine d'un enfant, m'avait peut-être envahi pour de bon.


Après "The Last Jedi", je me rends compte que je ne pouvais pas avoir plus tort. Que le cinéma reste quelque chose d'à part. Pas seulement une succession de plans qu'on se permet de décortiquer, d'analyser et de critiquer, parce que "l'histoire est écrite avec les pieds". Mais un vrai exhausteur d'émotions. Une machine à rêve. Un voyage aux confins de l'imaginaire.


Je pourrais parler des heures de ce que j'ai aimé. De pourquoi les quelques faiblesses scénaristiques n'ont finalement que peu d'importance. De la richesse de l’œuvre qui dépasse largement la pauvreté de la trame narrative. Je pourrais sans doute expliquer ce que j'ai trouvé drôle, ce qui m'a fait rêver, ces détails dissimulés ça-et-là qui rendent le film malin. Il y a tant de choses à dire...


J'ai trouvé l'esthétisme maitrisé. Les personnages plein de relief. Les prises de risques payantes.
J'ai vu la plus belle scène de l'histoire de la saga; ou d'un coup, le vide sidéral de l'univers se transpose en un silence... assourdissant.
J'ai rigolé, j'ai pleuré, j'ai re-rigolé, j'ai eu peur, froid, j'ai rêvé, j'ai... décollé.
Et ça ! Et ça, et bien, cela fait des années que ça ne m'était pas arrivé.


La manière dont Johnson s'est approprié l'univers de Lucas, pour en faire quelque chose qu'il lui appartient complètement. Sa vision, celle qu'il aura dû défendre becs-et-ongles avec Mark Hamill himself, c'est absolument fascinant...


Je pense que Johnson savait. Quelque part au fond de lui, il savait, tout ce qui m'avait manqué dans les quatre précédents opus.
Il aura contourné les bases d'un édifice branlant, afin de transformer d'un véritable coup de Maître ce qui semblait mal emmanché. Cette trilogie lancée par Abrams et qui sentait la poussière à peine édulcorée.


Je suis curieux de voir si JJ aura l'audace de rester dans ces nouveaux rails plein d'audace, posés par son successeur. Le challenge est aujourd'hui de taille, lui qui vient de se faire mettre son histoire en pièce. Comment s'y prendre ? Je l'imagine très embarrassé.


Moi, et bien moi, je suis heureux. J'ai vu le retour de Star Wars, le vrai; l'Avant-gardiste. Celui qui défini les codes et non celui qui s'en inspire.


Je souhaite plein succès à Johnson et suis littéralement enchanté à l'idée de découvrir sa prochaine trilogie. Pour vivre ce genre de moments, je lui donnerai volontiers les clés de la maison pour l'éternité. Reste à espérer que la horde de pisse-froids qui sévissent un peu partout sur la toile n'aient pas raison d'un studio qui se tourne facilement dans le sens du vent. Ce serait un véritable gâchis.


Longue vie à Johnson, à Star Wars et à "The Last Jedi" et... May the Force be with us!

Cedrik_Strahm
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le 18 déc. 2017

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Cedrik Strahm

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