Ici, Plutôt que nous montrer ce qu'il a en horreur, Carpenter dit ce qu'il aime avec la bouche d' un Alien incarné par Jeff Bridges :


Notre vitalité d'abord dans une séquence en voiture avec Karen Allen (qui joue Jenny Hayden, une femme stérile qui redeviendra fertile).


We are very civilized, but we have lost something, I think. You are all so much alive, all so different. I will miss the cooks and the singing and the dancing. And the eating!

puis notre dignité au scientifique qui lui-même finira la séquence en sortant de son cadre et en se rebellant face à l'autorité militaire


Shall I tell you what I find beautiful about you? ...You are at your very best when things are worst


La platitude de la Terre


Road Movie, Starman est un film à plat, qui déroule des paysages.

Comme dans NY 97 ou "They Live", les hélicoptères sont toujours la menace qui vient du ciel. La verticalité et les hauteurs sont des dangers face à une humanité qui consiste à éprouver le terrain en le foulant du pied ou en le traversant en voiture / en train.



The Shape


Jeff Bridges incarne un alien adulte de son existence étrangère et vierge du Monde humain. Le personnage va se construire au fur et à mesure, par mimétisme (il exerce les mimiques de son visages pour paraitre humain) et par reproduction (il se clone à partir d'un cheveux).


Le personnage du Starman, c'est Michael Meyers qui devient gentil.


Comme lui, Starman est un être agissant de façon mécanique. Comme dans Halloween son point de vue commence incarné en vue subjective par la caméra qui survole en travelling les paysages de la Terre plate (on ne la verra jamais ronde) et explore l'appartement de l'héroïne Jenny).


Et comme dans Halloween, ces vues subjectives peuvent cesser lorsqu'elle se trouvent incarnées. Sous un masque.


Le visage de Jeff Bridges est un masque figé qui au fur et à mesure du film, de son expérience, va s'humaniser. Il s'essaie rapidement à reprendre de la mobilité faciale. Exprimer des choses.


Starman c'est un renversement plus fort que toutes les inversions de "Prince des Ténèbres", c'est le contraire de tout ce que l'on voit ailleurs chez Carpenter.


Ici c'est l'inhumain qui devient humain.


Mais qu'est-ce qui constitue cette humanité ?


C'est là que le film devient très beau. Il ne devient pas humain parce qu'il baise l'actrice principale ou parce qu'il tomberait amoureux d'elle (ces sentiments lui resteront par nature étrangers, en dehors des sensations physiques, Starman n'est capable que de comprendre et reproduire)


Non Starman est un humain car il est curieux. Comme l'Alien de The Thing il cherche à s'échapper de la Terre, pour survivre. Mais il a quelque chose en plus : il ne cherche pas qu'à survivre mais à vivre. A faire son expérience. L'expérience la plus large et la plus positive possible de la vie dans l'univers.


Starman est un film existentialiste.



La Marginalité


Jenny Hayden est une femme en manque de son mari. Isolée, cloitrée chez elle accroc à la clope et aux images de son défunt mari. Elle est une préfiguration de Kriby Sweetman, héros incarné par Norman Reedus dans Cigarette Burns.


Le film commence avec des marginaux qui seront à leur tour aidés par des dissidents : Les gens sympas du motel deviennent littéralement hors la loi lorsqu'ils font diversion pour que Starman et Jenny échappent aux flics.


Ces personnages sont en exil du Monde. On les voit se déplacer à contre-courant, par exemple dans la scène d'embouteillage / barrage de police où nos héros se déplacent vers la gauche et la masse déshumanisée des militaires vers la droite. A d'autres moments, réguliers, où ils sont dans un véhicule avec une caméra et que l'on voit le décor qui défile à l'arrière plan. Un décor de western avec à un moment une amérindienne et une couverture qu'on dirait tirée de "La prisonnière du désert".


Cette Marginalité, c'est aussi ce qui les rend remarquable. Que l'on remarque.

Starman en premier lieu avec sa casquette et sa chemise rouges qui attirent l'œil sur lui dès qu'on le voit dans le cadre.


A la fin du film, cette couleur rouge, c'est celle de la lumière qui les protège en les isolant du Monde. Elle les isole du film même en noyant l'arrière plan.


Le Rire


Quand on lance le film au départ on a un apriori : on s'attend à une romance de merde.


Puis quand ça démarre, la première impression est différente : on dirait que l'extra-terrestre, l'étranger, c'est John Carpenter qui se retrouve en territoire étranger et singe une comédie romantique de la même manière que Jeff Bridges essaie d'imiter les humains.


Et en fait le film est bien plus réussi que celà.


Déjà parce que en fait de l'humour Carpenter il en mettait avant dans ses films (Dark Star, Big Trouble in Little China...), donc il sait déjà un peu faire. Mais là l'argument scénaristique de l'Alien et son approche d'automate mimétique permet de creuser à fond le sillon : L'humour c'est du mécanique plaqué sur du vivant.


Mais le film est aussi réussi parce que les thèmes matures du film sont abordés avec une belle frontalité et une vraie profondeur. Starman, le personnage comme le films, tentent de Ré-enchanter un monde stérile.


Starman c'est un film pour adultes a l'inverse de Jack Burton par exemple.



Adulte


Déjà lorsque Starman devient un humain, l'ambiance montrée est merveilleuse, mais la transformation elle-même, si elle est impressionnante, provoque également un sacré malaise.

Ces visions fœtus, de d'homme mécanique, c'est de la Uncanny Valley par excellence.


Dans Starman, L'extraterrestre n'est pas l'orphelin perdu de ET, c'est un touriste curieux et mature.


L'Alien n'est pas un enfant observe froidement. Il est un étranger. Tout comme nous regardons en étranger les vestiges de la culture amérindienne et les breloques indiennes commercialisées dans des boutiques de bord de route.


La femme, Jenny, aussi est une adulte. Elle a peur pendant la moitié du film, pas comme dans une romcom scriptée, et elle sait qu'il n'est pas Scott, son défunt mari. A aucun moment le film ne va aller sur ce terrain d'un trouble à retrouver son mari. On se respecte suffisamment pour pas essayer de se faire croire des bêtises.


Starman est une romance d'adulte. Un film pour adulte.


Un film qui essaie de ré-enchanter le Monde sans nous faire croire à des lanternes. Et peut-être en même temps redonner le gout de vivre. Un gout de cinéma.


Dlra_Haou
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le 17 nov. 2023

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Martin ROMERIO

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