Bouleversant.


Le sujet pour quelqu'un qui comme moi n'a ni enfant, ni même la fibre paternelle pouvait laisser indifférent ou nous laisser croire en une version japonisante de La Vie est un long fleuve tranquille (1987), mais à partir d'un postulat de départ similaire, le réalisateur japonais Hirokazu KORE-EDA délivre une oeuvre d'une rare intensité.


Ryota est l'archétype de l'homme japonais, pour qui l'idée même de l'échec est inconcevable, inacceptable, il est de ces hommes pour qui seul compte la réussite, quitte à délaisser ses autres obligations, dont celles d'époux et de père. Son fils, du moins celui qu'il élève depuis six ans, lui paraît ne pas avoir les mêmes ambitions que lui et il n'arrive pas à ressentir un amour profond pour cet enfant. Enfant qui se doit de fréquenter les établissements scolaires les plus prestigieux, pour qui les leçons de piano ne sont pas un amusement mais une fin pour arriver aux concours.


Face à lui, la mère, plus tolérante, plus aimante, plus maternelle s'efforce de compenser auprès de son fils ce vide affectif paternel, ainsi lorsque l'impensable survient, que l'échange des bébés à leurs naissances est avérée, les deux parents vont petit à petit s'opposer.


L'autre famille, celle où a grandi le fils naturel de Ryota et qui est du coup la vraie famille du petit garçon qu'ils élèvent est d'un milieu social plus modeste, mais la première chose qui frappe, c'est l'immense amour qui les unis, pour eux et en particulier le père Yudai, admirablement joué par Lily FRANKY rien n'est plus précieux que leurs jeux et leurs moments ensemble, la réussite matérielle s'efface derrière le bonheur simple.


L'opposition devient dès lors à la fois sociale et morale, et quand dans une insultante tentative de Ryota de soustraire à l'autre famille leurs droits parentaux, la réaction est sans ambiguïté. L'argent n'achète pas tout.


Je vous laisse le plaisir de découvrir le reste de ce film somptueux.


Questionnant les rapports de sang, contre les liens affectifs construits sur le temps. Les droits parentaux, face aux droits des personnes qui ont effectivement élevés les enfants, le regard de ces derniers sur la situation.


Mise en scène intimiste qui nous plonge au coeur de cette histoire. D'une émotion folle, on est littéralement happés et les larmes perlent, on prend partie, puis on hésite, et on sort de cette expérience différents.


Tendre, juste, poignant et la délicatesse du jeu des enfants fait écho à la subtilité de l'ensemble.


Bref j'ai adoré ce récit sur le dilemme entre liens du sang et raisons du coeur, qui jusqu'au bout garde sa force émotionnelle.

Spectateur-Lambda
8

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Créée

le 27 sept. 2022

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