Un film qui tient toutes les promesses de sa bande-annonce, sans plus. C'est évidemment déjà beaucoup : le matériel promotionnel vous annonce une épopée burlesque de la cinéphilie monstrueuse, et nous l'avons. Le film est hilarant. On attend à côté de ça un portrait empathique de personnalités sans talents mais habités par leurs rêves : c'est bon, et j'ajoute que James Franco, dans son interprétation de Tommy Wiseau, réussit à être grotesque avec mesure, ce qui est sans doute aussi difficile à faire qu'à concevoir ou à écrire. Vous voulez une amitié malsaine traversée de tension amoureuse unilatérale ? Y en a. Une satire de l'industrie du rêve hollywoodienne ? Aussi.
En somme, tout ce qui nous était promis, nous l'avons, mais traité à un rythme rapide, et dans un format qui, rapporté à la densité du programme, paraît trop court, et fait que de nombreux aspects semblent simplement esquissés. Ceux qui s'attendaient à une œuvre aussi émouvante sur le cinéma de seconde zone que l'Ed Wood de Tim Burton en seront pour leurs frais. De cette matière très riche, James Franco n'a tiré qu'une comédie extrêmement efficace, intelligente et respectueuse de ses personnages - dans une certaine mesure -, en n'exploitant que très superficiellement les autres aspects possibles que lui offrait son sujet. D'où cette impression d'avoir assisté à un excellent développement de la bande-annonce, sans avoir obtenu le surplus de profondeur ou de densité qu'on pouvait attendre du récit de cette histoire incroyable. Le film ne se laisse pas le temps de respirer, comme si l'enflure du mauvais mélodrame dont il raconte le tournage avait dissuadé James Franco d'accorder à son propre film un peu de liberté pour tout subordonner à l'impératif de divertir immédiatement le spectateur.
The disaster artist reste un excellent divertissement, mais dont j'attendais un petit peu plus. Le paradoxe veut qu'il s'agit d'un très bon film à qui il manque un peu de personnalité, réalisé à propos d'un très mauvais film qui lui en avait beaucoup.