Il pourrait s'agit d'une dystopie mais il n'en est rien. Sous Las Vegas serpentent depuis les années 70 de longs kilomètres de tunnels, initialement construits pour empêcher la ville d'être submergée par les pluies qui peuvent s'abattre dans cette zone désertique du Nevada.
Sauf que ces tunnels n'ont pas que cette fonction. On estime à environ 2000 le nombre de personnes les habitant. Abris de tous les risques, à l'accès bien évidemment interdit, ils sont pourtant le foyer des abandonnés du rêve américain.
Dans la ville de tous les vices et toutes les indécences, enfer économique et écologique, ils tentent de survivre, aménageant comme ils le peuvent ce royaume de l'obscurité, malgré les dangers encourus.
C'est un documentaire poignant, explosant d’empathie que nous propose Jean-Baptiste Thoret. Sans oublier la qualité esthétique de son film (superbe) il donne à voir ces vies fracassées sans sensationalisme. Cette humanité, on la retrouve notamment dans ce besoin du care qui traverse tous les protagonistes du film. Une grand-mère pour sa petite-fille, un homme pour sa compagne, au sein de cette petite communauté faisant partie de cette masse anonyme de laissés-pour-comptes. Une manière de nous rappeler qu’au-delà de la dignité qu'apporte un toit, une situation sociale, il y a avant tout la dignité qu'apporte le soin de l'autre, et qu'on refuse trop souvent à celleux que la société marginalise. Comme si l’amour porté à autrui restait le moyen de survivre quand l'ombre a tout avalé.
Un film bouleversant, nécessaire, pour nourrir sa propre humanité.