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Le voilà finalement dans nos salles. On a bien failli ne pas le voir, le dernier film d'Alejandro Inarritu, amateur de défis. L'auteur oscarisé de Birdman, Biutiful, et Babel, en a résolument bavé pour nous l'apporter ; et les anecdotes de tournages pullulent déjà sur le net. Un petit résumé pour les curieux et ceux qui n'ont pas encore pris conscience de l'ampleur de la tâche:
réaliser un film de 2h30, tourné en lumière naturelle dans l'hiver américain -donc une heure trente de tournage tout au plus par jour pour les conditions "optimales"- tourné en ordre chronologique, dans des paysages glacés à -40°C du Canada enneigé, et de l'Argentine (à cause d'une fonte des glaces malencontreuse). Des acteurs qui grelottent sur le plateau, des caméras qui se brisent, des membres de l'équipe technique qui se barrent en plein milieu, du retard accumulé... Tout cela est très proche de l'histoire de tournage de "FitzCarraldo" de Werner Herzog. En plus d'un dépassement de budget de 50% (145 millions de dollars au lieu de 90). Question: Cela en valait-il la peine?


OUI.


La prouesse de Inarritu est de réinventer la graphie d'une histoire que l'on a probablement adapté un millier de fois. Car si la trame du film dans les grandes lignes est un peu vue et revue, force est de constater que le film est simplement magnifique au niveau de sa photographie, de ses plans, sans parler d'une interprétation sans failles de Di Caprio, et des montagnes aussi. Et des ours. Numérisés. Hum, pardon, je m'emporte.


Soit un éclaireur (Léonardo Di Caprio), proche d'une tribue indienne, les Pawnies, et travaillant pour une compagnie exploitant les fourrures du Grand Ouest Américain, au delà de la "frontière", en 1827. Ses aventures le mèneront à combattre un grizzly, et laissé pour mort, à se venger (par respect pour les futurs spectateurs, je me contente de reproduire le pitch marqué sur l'affiche). Di Caprio fait partie de ces enfants maudits des Oscars: malgré une carrière sur une courbe ascendante, après un épouvantable et initiatique La Plage, un rôle d'amant idéal gentillet pour minette dans Le Titanic, l'acteur est devenu de plus en plus convaincant, dans des films comme les Infiltrés, Shutter Island, Mensonges d'état, Le Loup de Wall Street. Il signe ici une de ses plus brillantes prestations, dans un rôle douloureux au sens littéral comme figuré. Pas à un seul moment il ne donne l'impression d'un artifice, malgré la difficulté de mimer la douleur.


Mais cette interprétation ne serait pas suffisante pour justifier à quel point le film parvient à se jouer du spectateur. On se surprend dans les scènes d'action, de souffrances et de luttes à avoir soi-même le souffle coupé. Cela ne pourrait être possible que grâce à la caméra d'Inarritu. Celui-ci enchaîne plans séquences virtuoses, plans en accélérés grandioses et audacieux, moments de rare violence et de maîtrise. Mais The Revenant n'est pas Birdman, et à l'inverse de la frénésie artistique de Broadway, la caméra se pose parfois, dévoilant de superbes paysages, désolations glacées et montagnes déchiquetées. Cela n'est pas si surprenant, car le chef opérateur n'est autre que celui de Terrence Malick... et bien que ce dernier n'ait pas mes faveurs, Force est de constater que ses plans sont sublimes, et qu'on retrouve ici leur qualité. Le film serait d'ailleurs comparable au Nouveau Monde de Malick, mais beaucoup plus rugueux et difficile.


Il y aurait tant à dire sur ce film, sur ses symboles, sa vision de l'histoire des états unis, ses hommes et les grands déserts, mais je laisserai finalement place au silence et à l'appréciation des spectateurs. Si l'on s'ennuie parfois et que le film s'apparente à une expérience contemplative de la souffrance et de la solitude, jamais les images ne sont artificielles.
Et au vu de la prouesse de tournage et du résultat final, les oscars que ce film ambitionne lui sont pratiquement acquis à l'heure où j'écris ces lignes. 2016 commence bien.

AntoineMartin4
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le 24 févr. 2016

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Antoine Martin

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