6,5.


Typiquement le genre de film #saférafraîchirsursociéterre bien irritant bien énervant. Déjà parce que ça dure une plombe. Que les auteurs se font un malin plaisir de prendre à contrepied le discours dominant sur ce qui est censé plaire au public et retenir son attention, relayé par les 2 asticots réalisateurs publicitaires dans le film. Ensuite parce que les 3/4 du temps on a à l'écran tous les artefacts de la société bibourge, les argentés qui cumulent capital culturel et financier, qui votent PS ou Glucksmann quand ils ne créent pas (in)volontairement des démons double-face malabar bigoût comme Croncron ; bref des avatars de tout ce que l'excréme-droite appelle la "bienpensance". Et comme ces derniers, ça nous provoque régulièrement en nous remettant des mendiants sous le nez pour nous faire comprendre que oui, c'est vrai, nous sommes bien tous de gros bâtards à double, triple voire quadruple visage qui répondons que nous n'avons pas quand en réalité nous avons - et je sais d'quoi j'parle avec ma tête de bon samaritain abbé Pierrot [#cancelparcontumace] qui fait rire ou frémir les électrices du macrard, ou plutôt qui attire les nécessiteux, mais fait fuir les vaniteux - et qu'au final il faudrait rien d'autre qu'une extinction de masse pour régler tout ça (ou pas). C'est pas moi qui l'dis hein, c'est l'installation "You have nothing" qui expose des monticules de cendres dans un grand vide apocalyptique. C'est donc ça le Great Reset ? En tout cas pas la Grande Risette. Pas d'quoi en rire, mais pas vraiment d'quoi en pleurer non plus. Après tout en tant qu'être tutoré, éduqué, dressé, je garde mon masque porté, je pleure, je ris et je saigne, en interne.


L'absurde chaotique, mais chic. Le scénario aléatoire comme la vie, l'aspect clinique en +. C'est froid comme un film du grand ch'nord, blanc comme la neige d'un white savior, immaculé comme la cuvette des chiottes de Jeff Bezos. À l'intérieur du film comme derrière la caméra. Une société d'homo numericusso-economicus 2-3-4.0 qui rappelle les trouze milliards de films dans le genre avec forcément Podalydès Metal au casting comme Les 2 Alfred ou Effacer l'historique. L'absurdité de la lessiveuse à argent + ou moins sale, + ou moins dans l'arnaque légale qu'est l'art contemporain, en sus. Bref dans le discours c'est conforme aux critiques qu'on fait habituellement à l'art "comptant pour rien". Ça commence par une statue de mâle blanc dominant conquérant déboulonné mais fier comme un PP Napoléon, et ça enchaîne sur une mise en scène d'oeuvres absconses fidèles aux clichés véhiculés sur la vacuité des arts actuels. Ta banane scotchée sur le mur, et ta quequette, elle est bien dure ? J'en suis pas si sûr.


Finalement si on doit se taper toute cette piètre comédie humaine urbanistique c'est pas tant pour la déguster, s'en repaître pour constater voire apprécier nos avancées civilisationnelles qui nous distinguent du règne animal, de la loi de la jungle, qui nous garantissent la sûreté, la paix des badauds, l'ordre l'ordre l'ordre cordial (ment), mais c'est pas non plus tout à fait pour appeler à la fin de leur monde, à la fin de la représentation théâtrale, la fin de la comédie, bref, la bamboche, c'est finie. Non, on n'est pas ici dans le Grand-Bouleversement, dans le Grand-Renversement d'un Triangle of Sadness, on est plutôt dans le constat simple et âpre du "itiz watidiz", que voulez-vous ma bonne dame, l'homme est un loup pour l'homme, les vaches sont bien gardées et les cochons bien sucés, tant va la cruche à vau-l'eau qu'à la fin elle maîtrise. Constat Sade bute trou que la fin est sans fin, qu'à la fin y'a pu' d'fin. La fin de l'Histoire n'a pas eu lieu, remballez tout et rentrez chez vous. Leur capitalisme est en crise vous dîtes ? Pour qui la crise ? En haut ils ne peuvent plus vous dîtes ? Ils ont pourtant l'air d'en pouvoir vouloir toujours +.


Mais heureusement comme dans tout film il y a une fin, tout est bien qui finit pas vraiment bien. Dans le désespoir, il reste un peu d'espoir. Antisaucisse, tu perds ton pastis. Par un malheureux concours de circonstances la tour d'Ivoire est légèrement fissurée et par la brèche s'infiltrent les rayons du soleil de la diversité sociale et culturelle jusqu'alors ignorée ou déconsidérée. C'est beau comme du Manu 2017, sauf que lui il a fait le chemin inverse. Hop hop hop qu'on colmate tout pour mieux se calfeutrer. Vaincre ou mourir, il faut choisir.


Bref en effet ça fait réfléchir, et c'est parce que ça irrite que c'est digne d'intérêt. Qu'on nous cale des petites mandales sous forme de mandoline à cadre fixe comme un monochrome de Whiteman. Que les scènes coups de poing comme celle qui fait l'affiche du film résonne avec d'autres trucs qu'on a vu, comme cet autre film dont j'ai déjà oublié le titre qui montrait lui aussi une performance d'artiste incontrôlable dans un dîner mondain, sans toutefois la portée darwinienne dans un continuum nihiliste qu'on voit ici.

Adrast
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le 3 oct. 2025

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