Une bataille après l'autre est sans doute l'œuvre la plus accessible de Paul Thomas Anderson, autant dans son casting que dans sa mise en scène, oscillant entre la comédie et le spectaculaire. Mais celle-ci recèle de brillantes idées qui en font une grande œuvre cinématographique, confirmant, une fois de plus, qu’Anderson est l’un des plus grands réalisateurs de ces dernières années.
Si la dernière œuvre du cinéaste américain n’est pas militante, ses péripéties prennent pour toile de fond le clivage actuel de l’Amérique trumpiste, présentant la lutte de révolutionnaires de gauche face à une milice d’extrême droite. Il ne s’agit pas de faire du naturalisme ni de dépeindre la situation actuelle des États-Unis, mais plutôt d’user de métaphores, de types ou encore de gestes, qui vont venir incarner certains paradigmes contemporains, dans le but de les faire s’affronter à la fin.
Finalement, on reste dans la lignée de ses précédents métrages, dans lesquels un personnage pouvait incarner le capitalisme, et un autre, la folie de la foi.
Le moment illustrant le mieux cela est évidemment cette séquence où Sean Penn offre des fleurs à sa bien-aimée, la militante afro-américaine, et qui, suite à son refus, revient tête baissée avec un bélier pour enfoncer sa porte. Nous avons là toute la folie de l’Amérique résumée en une scène comique de quelques minutes.
Les séquences d’action offrent de belles leçon de cinéma. La scène de course-poursuite dans le désert est tout bonnement remarquable. Dieu sait pourtant que les spectateurs les plus cinéphiles et aguerris en ont vu des milliers. Mais celle-ci parvient à captiver l’attention parce que c’est tout simplement du cinéma : il y a une forme pour transmettre une idée.
La fille de DiCaprio incarne une minorité opprimée aspirant à la liberté (jeune fille afro-américaine). Elle est poursuivie par le chef de la secte d’extrême droite, incarnant l’Amérique actuelle, lui-même poursuivi par DiCaprio, militant révolutionnaire se révoltant face à l’inacceptable. La route n’est pas plate ; elle est, au contraire, constituée de pentes et de descentes. Elle vient symboliser leur opposition et la fracture des États-Unis, elle dessine les rapports de force.
Enfin un Blockbuster intelligent offrant au spectateur du grand spectacle, tout en parlant de la gravité de l'actualité.