Weird Science impressionne par la valeur prophétique qu’il tend à acquérir aujourd'hui, à l’ère du tout-numérique où la virtualité se confond de plus en plus avec le réel, où les créatures de charme construites sur ordinateur ou dans un décor dépouillé de ses aspérités – villa, draps blancs, piscine – s’invitent dans les fantasmes individuels au point de contaminer et d’homogénéiser l’imaginaire singulier. Car en incarnant un assemblage informatique sous forme d’une femme véritable, John Hughes propose un acte de foi optimiste en l’humanité, l’idée selon laquelle la révolution informatique dont le cinéaste est le contemporain se transformera en garante de l’éducation sexuelle, voire en grande-soeur capable de transmettre son expérience et ainsi dévier la trajectoire initiale de l’adolescent, de rectifier le tir. Le long métrage est un récit d’apprentissage, comme toutes les oeuvres de John Hughes en somme : comment renoncer non pas à ses fantasmes mais à l’aveuglement qu’ils peuvent créer afin d’investir le vivant, de vivre pleinement sa vie ? Et c’est ainsi, il me semble, qu’il faut comprendre la résolution quelque peu puritaine des conflits mis en scène dans ses films : comme quelque chose à garder, une petite morale, un retour au calme après le déchaînement des pulsions et des désirs.


Si Weird Science pèche par une surcharge en pop culture, multipliant les références qui n’ont pour seul effet que de participer au chaos et à l’accélération du rythme, si le surjeu des deux comédiens principaux donne lieu à quelques scènes dissonantes, le long métrage offre une fable intelligente sur notre relation au numérique et atteste le talent de Hughes dans la mise en scène, le découpage des scènes, leur agencement dans un crescendo burlesque savoureux.

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le 15 oct. 2020

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