La couture lache
Hormis l'interprétation en effet époustouflante de Pierre Niney (la voix et la gestuelle) qui, au-delà de l'exercice purement mimétique, parvient, dans la première partie jusqu'à la rencontre avec...
le 9 janv. 2014
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Ce film est une jolie preuve de ce qu'il y a de plus sournois du moins d'hypocrite dans l'univers cinématographique. Une vérité que l'on se cache tous sous couvert d'ignorance ou de malhonnêteté. J'entends parler des acteurs, de leur poids exagéré dans la critique, leur omniprésence télévisuelle ainsi de leur toute puissance contemporaine.
Lors de grandes cérémonies, bien souvent on nous apprend que sans acteurs il n'y a pas de film mais qu'il faut tout de même féliciter les autres. Les autres, ceux qui sont derrière la caméra, sur les plateaux ou dans les loges. Du son à la lumière en passant par le décor ils sont invisibles.
Alors non, je ne regarde pas le générique de fin pour apercevoir tous ces noms anonymes par paresse et par illégitimité (je ne connais tout simplement pas ces métiers-là) mais je ne tomberais pas dans le poncif du "cet acteur tout de même, il porte le film à lui tout seul".
Parce qu'il s'agit bien du problème d'Yves Saint Laurent dont on m'a tant prêché des "Pierre Niney il joue trop bien, c'est incroyable" ou encore "César du meilleur acteur pour YSL c'est dire" et le meilleur pour la fin "Le film vaut le détour ne serait-ce que pour la performance de Pierre Niney".
Tout cela me fait penser à l'une des blagues dans Rock N'Roll de Guillaume Canet. Celui-ci dans son propre rôle d'acteur vieillissant parlant avec une jeune actrice au sujet du César de Pierre Niney.
_Il le mérite tellement Pierre, moi j'avais l'impression de le voir Yves Saint Laurent
_Car tu l'as connu toi Saint Laurent ?
_Oh pas plus que ça
_Bah ferme ta g***le !
Parce qu'après avoir dit ça, on parle de quoi ? Si on enlève Pierre Niney du film qu'en reste t'il ? Du moins que peuvent dire ces gens-là de plus ? "Il est bon Pierre Niney et ... voilà quoi".
Cela me rappelle l'un des Podcasts audio de François Bégaudeau où il parlait des acteurs et comme quoi souvent il fallait contenir ceux-ci sinon ils s'appropriaient le film. Dans YSL, je ne saurais dire si Pierre Niney accapare le long-métrage ou si le niveau critique d'un bon nombre d'individus s'arrête au jeu des personnages. Parce qu'on ne traite même plus de l’œuvre qui doit être le sujet clef mais de la performance de l'acteur.
Honnêtement, je me fiche de la réalité. Je me fiche de la ressemblance. Je me fiche de la véracité des événements. Si l'objectif est de s'extasier du réel, faîtes un documentaire avec des images d'archive. Vous ne pourrez pas mieux faire que dire "dis-donc YSL il s’interprète à la perfection".
Erreur récurrente dans beaucoup de biographie, on filme une page Wikipédia tout en croyant que cela sera suffisant. On espère qu'en mettant en scène le texte au mot près cela fera un bon film tant que le contenu du paragraphe est correct. La réponse est non.
Que le film soit d'une véracité maladive ou approximatif, on ne devrait pas en tenir compte (sauf si ça devient ridicule) car l’histoire d'une personne doit être avant tout le support pour exprimer une idée. Quel est le plaisir à suivre une page Wikipédia en mouvement ? Il n'y en a pas. Le réalisateur peut avoir le choix de dévier du matériau de base pour montrer, exposer une réflexion ou une émotion.
YSL n'y arrive pas. Malgré la tant vantée performance de Pierre Niney, qui m'a laissé totalement de marbre au passage, le film ne propose rien. Le réalisateur cadre et met en scène de manière tellement banale que le résultat est d'un ennui profond. On est censé nous montrer la complexe relation Bergé-YSL, thème connu en littérature comme au cinéma de l'ombre et la lumière.
Pourtant jamais le réalisateur ne parvient à nous démontrer la réelle complexité du duo, on voit s'échanger des bisous, des infidélités, des insultes et quelques regards mesquins mais tout cela reste mignon voir tendre. Le réalisateur est gentil, ce qui fait que le spectateur n'est pas réellement au fait des rancunes comme des douceurs des personnages dans leur interaction.
Alors peut-être que le film a d'autres atouts, après tout nous sommes au cœur du monde de la mode avec ses défilés et ses soirées mondaines. Le réalisateur pourrait mettre en scène des plans sublimes, des montages hypnotiques et des corps oniriques. Il n'en n'est rien, tout est plat, tout est creux, tout est fade. Les défilés sont filmés comme ceux que l'on peut apercevoir sur un JT chaque année lors de la Fashion Week, on n'en retire rien.
Quand je pense à toutes les possibilités de mise en scène que j'ai pu voir auparavant, je ne peux qu'être critique par rapport à YSL. Pensez à Neon Demon, l'utilisation des corps, de la musique ou encore de la lumière. Pensez à Phantom Thread, la beauté des costumes, la fascination du couturier pour une femme du quotidien, etc.
Définitivement, YSL n'est qu'une biographie en mouvement, un être dénué d'âme.
Créée
le 7 oct. 2021
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