Dead Space 2
7.5
Dead Space 2

Jeu de Visceral Games et Electronic Arts (2011Xbox 360)

Jamais vraiment sorti d'un chantier infernal, Isaac reprend les outils pour procéder aux finitions q

Halloween 2008. Quand certains sourient devant le défilé mignon de têtes blondes venues réclamer leur lot de friandises, d'autres pleurent devant leur écran, seuls face à l'horreur et aux hordes de cadavres peuplant l'USG Ishimura. Déraisonnable cocktail de frissons et d'angoisse, Dead Space transformait tout gamer solidement bâti en mauviette pantelante et suffocante, usée par le harassant spectacle monté par les équipes d'EA Redwood Shores. En ces temps où les ficelles grossissent plus vite que l'imaginaire des faiseurs d'histoires - interactives ou non - le bain de sang s'accompagne d'un vent glacial, signe d'une fraîcheur extrême à laquelle on goûterait bien de nouveau, surtout après avoir mis deux ans après un premier volet à retrouver un rythme cardiaque un tant soit peu stable.



Radeau percé



S'il a échappé à toutes sortes de monstres lors de son séjour sur l'Ishimura, Isaac Clarke n'a pas réussi à se débarrasser des fantômes de son passé. Telle était, sans aucun doute, la leçon à tirer d'une scène qui finissait de transformer Dead Space en chef-d'oeuvre de l'horreur sur 360. Tel est, du coup, le fil conducteur d'une suite qui rebondit aussi doucement qu'habilement sur le twist final du prédécesseur. Pourtant, s'il démarre sur les chapeaux de roues, Dead Space 2 n'enchaîne pas sur la fuite d'Isaac, préférant laisser l'ellipse de trois ans qui sépare les deux titres à l'imagination du joueur - légèrement accompagnée par quelques cinématiques et documents annexes. Du coup, c'est sans informations et quasi sans transition que l'on se retrouve lâché sur la Méduse, colonie minière énorme répandue à la surface (et pas seulement) de Titan, satellite de Saturne comme tout le monde le sait. Si le pourquoi du comment de la situation reste à découvrir, il s'agit de vite retrouver ses réflexes pour survivre aux premières minutes de jeu. Désorienté, désarmé et entravé, Isaac est en effet à la merci de Nécromorphes assoiffés de chair amène. Pour lui comme pour le joueur, c'est parti pour une dizaine d'heures de souffrance terrible, seul ou presque à lutter contre une force inhospitalière, et ce, à un rythme insoutenable. Potentiellement alarmés par quelques développeurs enthousiastes, les joueurs craignant que Dead Space se soit transformé en shoot bourrin et coloré peuvent toutefois se rassurer : si l'architecture même de la Méduse garantit un trip plus furieux et varié, l'accent reste mis sur la survie en milieu extrême, sans excès ni artifices.



TGV fantôme



Entre deux séances de louanges, on avait reproché à Isaac sa transparence, l'extrême diligence avec laquelle il obéissait aux ordres pour aligner les allers-retours dans des environnements parfois redondants. Attentifs et appliqués, les gens de Visceral - un blase qui sonne plus que jamais juste - ont tenté de corriger ce qui pouvait l'être tout en veillant à ne pas dénaturer leur aventure. S'il continue à ne pas y avoir foule autour d'Isaac, les interactions avec les protagonistes sont plus nombreuses, à visage découvert et en version parlante. Du coup, l'impression d'obéir aveuglément s'estompe, même si Isaac continue à aller dans le sens du vent et des impératifs du moment, qu'ils viennent d'un protagoniste ou d'un autre. Rien de grave, mais il y a encore du chemin à parcourir avant que le technicien ne devienne un vrai héros aux motivations propres - un souhait sans doute illusoire au vu du genre de jeu. La ballade, quant à elle, se fait plus guidée encore : un poil plus linéaire que le premier, Dead Space 2 en profite pour muscler les débats et mieux maîtriser les déplacements de son combattant. Isaac, discute, décide, tranche et trucide, et ce, sans le moindre temps mort. On pourra bien reprocher aux premiers chapitres de défiler à toute vitesse, aux décors à thèmes (magasins, quartiers résidentiels...) de lorgner sur Bioshock pour trouver leur ambiance, mais l'ensemble reste d'une formidable cohérence et d'une puissance qui fait froid dans le dos. D'autant que le noir et la solitude sont loin d'être les seuls maux qu'il faut affronter sur la Méduse...



Vers solidaires



Souvent harcelé par ses méninges, Clarke devra en plus repousser de véritables hordes de Nécromorphes : parfois lâchés sur le joueur par grappes de six ou sept individus, ils font toujours preuve d'une agressivité sans bornes pour venir à bout de la combinaison mécanique du héros. Savamment répartis par une équipe de développement qui sait ménager ses effets, les cadavres ambulants frappent là où (et quand) ça fait mal avec une variété perverse dans le type d'assaut. Frontal pour les slashers de base, multiple avec les bandes de gamins décharnés se ruant sur vous en masse, en différé pour les "dindes" vicelardes qui vous guettent au coin du mur... Vieilles connaissances et nouveaux venus vous tomberont dessus avec régularité et virulence, ne laissant retomber le rythme que pour mieux préparer une attaque groupée ou un boss plus ou moins massif. Difficile de trouver à redire sur le casting, en tout cas. L'arsenal, lui, reste fidèle au côté "géo trouvetout" inauguré dans le premier jeu, en y ajoutant de nouvelles pétoires pas forcément improvisées mais toujours bien percutantes. Mines, pieux électrifiés et autres joujoux perçants et/ou contondants feront leur office avec efficacité, surtout si vous vous penchez un peu sur l'amélioration de chacun - via les classiques points de force trouvés ça et là. Plus porté sur l'action que son prédécesseur, Dead Space 2 se fait plus discret sur les puzzles, moins nombreux et un peu plus évidents qu'autrefois. Une paire de batteries à replacer, un panneau à trafiquer, voilà qui semblera bien maigre à ceux qui avaient aimé se triturer les méninges avec certains mécanismes de l'Ishimura. Ceci étant dit, on se rattrapera avec les séquences en apesanteur, tellement plus réussies maintenant qu'Isaac est libre de ses mouvements. Avec ou sans limite d'oxygène, ces passages terribles de beauté remplacent idéalement les frustrantes phases de shoot à bord de tourelles, disparues sans que l'on ait à s'en plaindre. Au chapitre des regrets, on inscrira juste le combat au corps à corps, toujours difficile à jauger et donc réservé aux grands coups de panique qui précèdent un décès.



Chaud et froid



Encore très beau malgré son âge avancé, Dead Space premier du nom ne peut que s'effacer devant son héritier. Personnages, décors, effets spéciaux (flammes et fumées sont divinement recréées) et autres éléments visuels rivalisent de variété, de précision, de goût aussi. Forcément plus coloré que l'Ishimura, le décorum de la Méduse reste monstrueusement inquiétant et angoissant. Changements de teintes et gestions de la lumière donnent un cachet particulier à chaque zone de chaque niveau afin d'éviter le sentiment de redite malgré un ou deux allers-retours. Même satisfaction quant au découpage de l'aventure, moins systématique - les niveaux ne sont plus séparés par un chargement, ni par un voyage en tram - et donc nettement plus coulé et appréciable. Du coup, il est bien difficile de lâcher la manette et l'on se retrouve vite à enchaîner les Nécromorphes sans se soucier de l'heure ou pire, de son intégrité mentale. Cette dernière, déjà malmenée par un habillage graphique malsain au possible, ne pourra pas compte sur l'ambiance sonore pour reprendre pied. Si la majorité des bruitages semble issue de Dead Space, l'efficacité reste de mise avec des cris et sons infects, très bien spatialisés et toujours juste en termes de timing. C'est d'ailleurs ce sentiment qui prédomine lorsque l'on sort (pas indemne, rassurez-vous) de cette vilaine visite de la Méduse. Savamment orchestré et brillamment réalisé, Dead Space 2 rectifie énormément de petites problèmes constatés à l'époque. En revanche, et malgré des scènes épiques, la suite peine à retrouver l'originalité crade et la fraîcheur rance de l'original. Si les idées sont là, elles se contentent d'être là, sans forcément mettre le joueur en danger ou lui imposer une interactivité un tant soit peu poussée. Enfin, des esprits chafouins remarqueront la ressemblance entre les deux scénarios : dans les grandes lignes, Dead Space 2 réinvente plus qu'il ne suit. Un peu dommage, mais pas si grave quand on pense aux heures d'angoisse et d'effroi que le titre vous garantit !


VERDICT :



  • La réalisation, toujours fabuleuse (+)

  • Une mécanique aux petits oignons (+)

  • Durée de vie plus que correcte (+)

  • De bonnes poussées d'adrénaline (+)

  • Un léger manque de fraîcheur (-)


Moins original que son prédécesseur, Dead Space 2 compense par un rythme effréné et une réalisation d'enfer. Indispensable !

snake74500
9
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le 19 janv. 2017

Critique lue 160 fois

snake74500

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