Avant qu'on vienne probablement me harceler de "Git gud" et autres "pourquoi tu parle si t'es un casu et que t'aime pas le try hard", je vais me permettre de remettre les pendules à l'heure vis-à-vis de mon rapport aux jeux From Software.


Dark Souls est mon 2e jeu-vidéo préféré. J'ai adoré sa suite, et j'ai passé une semaine entière quasi non-stop sur Bloodborne lorsque je l'ai eu entre les mains. Je n'ai donc aucun problème avec le fait de devoir souffrir pour progresser, ni de devoir faire preuve de persévérance et de courage. Je n'ai pas de problème non plus à être parfois un peu largué, à de devoir recommencer plusieurs fois le même boss, ni à devoir faire usage du grind durant quelques heures afin de surmonter un passage difficile.

Pourquoi donc, en dépit de ma note et des qualités évidentes du jeu, Elden Ring a été à ce point une expérience schizophrénique et même douloureuse pour moi ?

Parce qu'Elden Ring, un peu comme le fameux Icare, a selon moi vu trop loin, trop tôt, et s'est cramé faute de ses propres ambitions. Et putain, je vous jure, j'ai essayé de lui pardonner. J'ai vraiment essayé de l'aimer, votre jeu de l'année, surtout que toute la première partie de l'histoire était vraiment superbe.


Le sentiment de liberté totale, l'envie d'aller partout et de croiser des monstres beaucoup trop puissants pour nous, la découverte du château de Voilorage, du puit de la Siofra, des villages inondés de Raya Lucarnia, les remparts de Leyndell, la montée en puissance de notre personnage, les panoramas colorés… bref. Honnêtement j'étais conquis.

Elden Ring m'a rappelé pourquoi j'aime à ce point les univers de fantasy, grâce au dépaysement total qu'il offre et par le souffle épique qu'insuffle le gameplay dans chaque combat de boss, dans chaque nouvelle zone qu'on l'explore.

Je serai incapable de vous dire à partir de quand les choses ont commencé à se gâter, mais je situerai probablement ça à la Cime des Géants, avec cette profusion d'ennemis assez injuste et bâtarde. Je crois que j'ai vraiment commencer à m'énerver à partir du Géant de Feu, un boss à la portée complètement disproportionnée et à la barre de vie tellement large que c'en était presque parodique. Je l'ai quand même battu, parce-que mince, j'aime bien suer, et puis parce que je voulais voir vers quelles nouvelles zones le jeu allait me mener.

Je suis ensuite arrivé à Farum Azula, je me suis fait torché par des soldats beaucoup trop forts, puis un copain m'a conseillé d'augmenter mes points de vie ; il a insisté sur le fait que je ne serai certainement pas capable de passer la fin du jeu sans avoir au moins 50 points en vigueur.

Soit.

On y retourne.

J'ai donc grindé bêtement pendant trois heures, puis je m'y suis remis. A ce moment-là je me plaignais déjà beaucoup du recyclage de boss : je veux bien que l'aire de jeu soit super grande, mais quel intérêt de la faire aussi vaste si c'est pour affronter en boucle les mêmes mini-boss avec des couleurs différentes ?

J'ai traversé un brouillard et… je suis tombé sur le Duo Sanctechair.

Je pense que justifier l'existence de ce boss, d'une manière ou d'une autre, c'est être proche du franquisme. Pire, je pense que le légitimer, ou même prétendre y avoir éprouvé du plaisir, c'est avoir des penchants SM. Mais attention, pas des penchants SM façon Christian Grey ; plutôt façon Albert Fish, et je m'excuse de la référence.


A l'inverse des autres boss réputés injustes ou juste terriblement barbants et mal conçus, comme par exemple Le Foyer du Chaos dans Dark Souls 1 ou Micolash dans Bloodborne, le Duo Sanctechair n'a même pas la courtoisie d'être original ; puisqu'il n'est qu'un reskin de deux boss que le joueur a déjà affronté au moins une fois durant sa partie. Inutile de préciser que son système de régénération est purement fait pour contraindre le joueur à galérer davantage, et qu'à l'inverse d'Orstein & Smough du premier Dark Souls, ce combat n'a d'épique que la musique. Pire encore, il n'est pas optionnel, et le reste du jeu devient interdit au joueur s'il n'accepte pas d'affronter ce boss. Je n'ai donc pas de mots assez durs pour vous dire à quel point ce boss a manqué de me faire abandonner Elden Ring à lui-seul, mais je me suis finalement forcé à continuer, en dégotant notamment la "larme imitatrice".

Je n'avais pas prévu d'utiliser cette invocation, parce qu'elle me semblait rendre le jeu bien trop facile, mais je vous avoue ne plus en avoir eu grand chose à foutre à partir de là.


Une nouvelle session de grind intensive, et une "larme imitatrice" maxée, me voici rendu face à Maliketh et… ben visiblement même en étant niveau 130 et en ayant augmenter mon arme au maximum avec des pierres de forge et des runes, faut croire qu'Hideteka Miyazaki a décidé d'empêcher à la plupart des joueurs de finir son jeu.

J'ai fait au moins 75 try sur Maliketh avant de réussir à le battre (enfin). Soit, je sais pas, au moins trois à quatre heures sur la même zone, le même boss, les exacts même patterns répétés en boucle jusqu'à y arriver quasiment sur un coup de bol. Inutile de préciser que les développeurs ont évidemment placer un chevalier sous stéroïdes devant l'entrée de la salle du boss, juste au cas où le joueur n'aurait pas déjà envie de se pendre.


Ma question c'est : à qui s'adresse vraiment la difficulté d'Elden Ring ?

Aux hardcore gamers ? Ok, mais alors dans ce cas-là, pourquoi avoir rendu la magie aussi puissante dès le début du jeu, et avoir donné aux joueurs un atout aussi pété comme la "larme imitatrice" ?

J'ai du mal à voir comment un boss comme Maliketh (qui est magnifique et épique au demeurant) a pu passé le stade de développement sans que l'équipe se dise : "Merde, peut-être qu'on a poussé le bouchon un peu loin vis-à-vis des attaques et de la barre de vie ?"

Non seulement le gus frappe fort, à distance et a des combos erratiques, mais en plus de ça il a une deuxième phase où sa magie dévore les trois quarts de votre santé dès lors que l'un de ses sorts vous touchent. Et en plus, il se déplace deux à trois fois plus vite que vous sans que la caméra puisse totalement suivre ses mouvements.

On essaye vraiment de me faire croire que ça, c'était supposé être ok pour un pélo lambda qui veut s'essayer au souls-like ?

L'ambition d'Elden Ring, qui a d'ailleurs l'air d'avoir fonctionné, c'était de démocratiser ce type de jeu à un plus large public, alors pourquoi fournir des boss aussi durs et impitoyables dans une campagne principale ?


Certes, Ludwig et l'Orphelin de Kos dans Bloodborne avaient déjà la réputation d'être de sacrés morceaux, mais au moins ils étaient optionnels ; contenus dans le DLC du jeu. Là Maliketh, j'aimerai vraiment qu'on m'explique comment un noob est capable de le vaincre, alors que même moi j'y ai passé facilement cinq heures.

Malenia, à la rigueur, je veux bien. Elle est de toute manière très difficile à trouver pour celui qui ne la cherche pas, en plus d'être purement optionnelle et non essentielle pour l'aventure principale. Je pourrais tout de même dire que sa faculté à se régénérer est totalement injuste dans la mesure où elle regagne de la vie sans même toucher un objet organique (genre votre bouclier), mais je ne suis de toute manière pas le public visé pour ce boss-là.


J'ai essayé de battre Radagon, mais au moment où je rédige ces lignes, Elden Ring m'a juste épuisé et dégoûté.


Ce qui explique probablement mon sentiment aussi exaspéré, c'est que je trouve le jeu infiniment trop grand et trop long pour le gameplay qu'il propose. Un souls-like, pour moi, ça tient entre trente et cinquante heures. D'une part afin que le joueur ne soit jamais totalement écrasé par le poids du monde et des zones qu'il a à explorer, mais aussi parce-que se farcir un die-and-retry sur plus de cents heures, c'est insupportable et redondant. Passé soixante-dix heures dessus, j'ai complètement perdu l'émerveillement que j'avais au début de ma progression, parce que je me suis rendu compte que les boss étaient soient honteusement recyclés, soit affreusement durs pour forcer le joueur à étendre son expérience sur des dizaines d'heures supplémentaires.


"Oui mais pourquoi t'es allé dans cette zone à ce niveau-là ?", me diront certains qui ont passé 260 heures sur le jeu au moment de sa sortie.

Ben parce que farmer bêtement des runes pendant trois heures pour gagner deux pauvres niveaux supplémentaires et espérer avoir une chance infime de vaincre un boss impossible, c'est ni fun, ni grisant. C'est juste chiant à crever. Oui, le jeu offre toujours des ressources et des moyens de palier à sa difficulté, mais le fait est que je le trouve bien trop long et bourratif.

Pour un Radhan, pour un Placidusax (ce nom bordel) ou un Rykard, je dois subir un florilège de boss peu inspirés dans des donjons copiés-collés, truffés de pièges sadiques sur une campagne qui tient, dans son entièreté, sur 200h.

Merci, mais au revoir.

Je suis soûlé de devoir passer des heures sur un seul ennemi pour avoir le droit d'avancer dans l'histoire. Je suis lassé de ce monde tellement vaste où je ne sais même plus quoi faire ni donner de la tête, de cette paresse dans les noms des personnages et des dieux qui sont tous homonymes, et d'un jeu qui semble penser que c'est en se faisant casser la gueule par Gervonta Davis trois fois par semaine qu'on append à faire de la boxe.


Voilà pour le sel.

En dehors de ça, Elden Ring n'est pas loin d'être un chef d'œuvre.

C'est un jeu riche, envoûtant, fort d'une bande-son exceptionnelle, d'une atmosphère soignée et d'un gameplay très efficace et addictif.

Mais c'est pas un jeu pour moi : je trouve sa difficulté trop bancale et sa durée de vie artificiellement étirée, alors même que j'adore les souls-like.

Je lui redonnerai sans doute une chance la prochaine fois, j'essaierai de battre Radagon pour me prouver que j'en suis capable, et je recommencerai une partie avec un autre build.


Sans rancune, je t'aime Elden Ring, même si tu semble renifler tes pets et me les renvoyer au visage en pensant que c'est ça que j'aime chez toi.

LounisBrl
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le 14 déc. 2023

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LounisBrl

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