Voir la critique en vidéo sur Youtube


Everybody’s Gone to the Rature, malgré ses défauts et ses qualités, aura eu le mérite de tenter quelque chose de fondamentalement fou en poussant le concept du « non-jeu » à son paroxysme.


Un pari osé, perfectible et imparfait qui soulève avec lui la sempiternelle question propre à ce genre d’expériences uniques : est-ce encore du jeu vidéo ?


Personnellement, je ne me la suis jamais posée en parcourant Yaughton. J’étais là pour autre chose que pour « jouer ». J’étais là pour humer l’air si doux du Shropshire, profiter de son calme champêtre et revivre avec ses habitants les évènements qui ont compté pour eux dans leur vie. M’inquiéter en leur compagnie des phénomènes surnaturels qui, au fond, les dépassait tous. Constater qu’avec l’imminence d’une issue fatale, les gens peuvent changer, en tentant de résoudre les problèmes qu’ils ont pu avoir par le passé avec eux-même, ou avec les autres membres de la communauté. Une communauté éclectique et attachante, et dont les destinées vont rapidement prendre le dessus sur le mystère qui entoure leur disparition.


L’évènement singulier a-t-il changé leur vie de tous les jours, ou au contraire les a-t-il poussé à aller au delà de leur propre barrière émotionnelle ? Et si au fond cette tragédie à huit clos faisait rayonner la race humaine en nous ramenant tous à l’essentiel de nos destinées?


Jacob de Lost aurait surement un sourire amusé sur son visage, tandis que Patti Levin de The Leftovers tirerait avec flegme sur sa cigarette en observant ces existences gérer la situation avec ce que l’humain a de plus précieux : ses sentiments. Amour, tristesse, pardon, rédemption, haine, culpabilité… Jeremy, Wendy, Kate et les autres m’ont énervé, ému, touché, et même fait pleuré par moment. Dans ces moments là, j’avoue donc avoir été content de ne pas avoir pu courir plus vite, car je serai sans doute passé à côté du rythme du jeu, calqué sur celui de la vie, la vraie, avec ses tragédies et ses moments de grâce.


Everybody’s Gone to the Rature c’est une « oeuvre » profondément humaine, dont les évènements paranormaux ne servent finalement que de toile de fond à l’histoire principale, celle qui compte vraiment : celles des habitants de Yaughton. La fin et ses explications -qu’on peut interpréter de multiple façon- n’est tout compte fait qu’anecdotique… La vraie richesse du jeu se trouvant d’abord dans tous les petits détails du quotidien, méticuleusement mis en scène jusque dans les menus du jeu, ensuite et surtout dans le coeur des personnes dont on suit les silhouettes lumineuses, sans même pouvoir leur donner un visage. Qu’importe, leur voix sont si bien bien choisies, si minutieusement doublées et si bien accompagnées par les sublimes compositions de Jessica Curry qu’on ne peut que féliciter TheChineseRoom pour cet énième décision culottée.


Everybody’s Gone to the Rature est-il un bon jeu vidéo? Est-il même un jeu vidéo? Qu’importe, c’est une expérience incroyable, qui tire sa force des partis-pris courageux de son éditeur. Ce dernier nous indique d’ailleurs clairement sur l’artwork du jeu qu’il vous nous prendre par la main et nous guider à travers les vies so british des 20 protagonistes. A mes yeux, même dirigiste, ça en fait l’une des plus belles oeuvres de ces dernières années.

yannick-sker
9
Écrit par

Créée

le 22 août 2015

Critique lue 364 fois

2 j'aime

Critique lue 364 fois

2

D'autres avis sur Everybody's Gone to the Rapture

Everybody's Gone to the Rapture
Psykokilla_V3
7

La tête dans les étoiles.

Dans un premier temps, avant de vous lancer dans "Everybody's gone to the rapture" il est bon de rappeler que l'œuvre du studio "Thechineseroom" est avant tout un récit à peine interactif. Deux...

le 13 août 2015

16 j'aime

4

Du même critique

Hyrule Historia - Zelda
yannick-sker
7

Critique de Hyrule Historia - Zelda par The Share Players

A chaque partie de A Link to the Past, mon Zelda préféré, un item me fait toujours rêver : le Livre de Mudora. Si Link ne l’utilise que pour déchiffrer l’ancien langage d’Hyrule, ce grimoire...

le 2 avr. 2013

12 j'aime

2

Sur écoute
yannick-sker
10

Critique de Sur écoute par The Share Players

Les premiers épisodes de The Wire sont trompeurs. A première vue, difficile de croire qu'un show présentant autant de personnages, à l'intrigue si lente et à l'atmosphère aussi lourde puisse se...

le 20 déc. 2010

6 j'aime

Jet Set Radio
yannick-sker
10

Critique de Jet Set Radio par The Share Players

Jet Set Radio, c'est un ovni vidéoludique à l'humour totalement décalé, un jeu coloré à la bande son ravageuse, une expérience unique comme on n'en fait malheureusement plus assez. JSR multipliait...

le 27 oct. 2010

3 j'aime