Ghost of Yōtei
7.7
Ghost of Yōtei

Jeu de Sucker Punch et Sony Interactive Entertainment (2025PlayStation 5)

Sans se mentir, Ghost of Yōtei n'est pas à la hauteur des attentes d’un fan de Ghost of Tsushima comme moi. Pas qu’il soit spécialement moins bon, mais plutôt parce qu'il n’arrive pas à faire mieux cinq années plus tard, sur une génération de console différente !



Néanmoins l’une des qualités indéniables de la licence est encore sans conteste sa direction artistique très expressive, bariolée, lyrique, une sorte de peinture à l’huile animée en somme. Brume au sol le matin, godrays à travers les arbres au soleil couchant, feuilles qui virevoltent, végétation qui danse et faune sauvage qui réagit à notre passage. Un cycle jour nuit permettant de faire varier la colorimétrie selon l’heure de la journée et différents biomes ayant chacun leur palette de couleurs rythmeront notre aventure sur l’ile d’Hokkaidō (et tant pis si la nature du jeu ne ressemble pas vraiment à celle de la véritable ile). De plus l’OST est plutôt bonne, bien qu'elle arrive rarement à être transcendante. En bref, la DA de cet opus égale celle de son prédécesseur, mais pour autant est ce qu'en 2025 on peut dire sans sourciller que le jeu est aussi beau que ceux de la concurrence ?


La question se pose puisque techniquement je le trouve en retard comparé au récent Death Stranding 2 sorti un peu plus tôt sur la même plateforme. À mes yeux Ghost of Yōtei ressemble plus à un très beau jeu PS4 (comme l'était son ainé). Les textures n’ont pas l’air d’être en très haute définition. Les différents assets manquent cruellement de polygones. Les visages et animations de dialogues sont “okay tiers” dans les cinématiques mais deviennent extrêmement peu définies en jeu. Il est évident que le fait de jouer en mode "performance" avec sa basse résolution y joue beaucoup (le manque de PS5 Pro se fait de plus en plus ressentir) mais sur le plan purement graphique je m’attendais à mieux. Certes la direction artistique est chatoyante mais tout parait trop lisse, sans vraiment de contraste, à l'éclairage aléatoire. Le moteur propriétaire de Sucker Punch peine à évoluer depuis Ghost of Tshushima. Comparé au récent AC Shadows, le jeu est clairement à la traine. Heureusement pour lui, graphismes mis à part Ghost of Yōtei fait mieux que le jeu d’Ubisoft sur bien d’autres points à commencer par la narration.


Alors disclaimer, nous ne sommes pas là non plus sur un chef d’œuvre d’écriture, loin de là. Scénaristiquement, cela reste trop convenu mais néanmoins plus intéressant à suivre que l’a été pour moi le dernier Assassin’s Creed (oui, je vais beaucoup les comparer). A commencer par l’écriture de son héroïne. J’ai tout aimé chez elle : sa personnalité, son background, son charadesign. Elle est associable, brutale, cynique, au faciès et à la morphologie quelconque, scarifiée, crasseuse et recouverte de sang (il faut dire que passer son temps à trancher des membres n’aide pas). Bref, elle ne ressemble pas à une Waifu et n’est pas là pour émoustiller l’Otaku. Les exclues Sony ayant une femme pour principal protagoniste évitent généralement de tomber dans ces écueils décrédibilisant et c’est une excellente chose. Malheureusement l’écriture des personnages secondaires n’est pas toujours au niveau (même si j’ai bien aimé la caractérisation du principal antagoniste, le seigneur Saito) et la trame narrative n’est pas des plus originale. Puisqu'en effet, telle “Naoé” dans le jeu d’Ubisoft, notre héroïne, “Atsu”, parcourt le Japon pour éliminer un certain nombre de personnes liées à son passé tumultueux. Heureusement l'enrobage scénaristique qui accompagne chacune de ces traques est bien mieux développée et mis en scène que dans Shadows (il n’y a pas de mal, j’ai envie de dire). Aussi l'histoire sera à l'occasion agrémentée de rebondissements. Pour autant, je le redis, cette dernière reste relativement basique, ce qui pour moi n’est pas totalement un mal puisque ça laisse de la place au RP. J’aime pourvoir vivre la vie d’une rônin assoiffée de sang et foncer tête baissée vers le danger dans un pur esprit de vengeance. Le coté contemplatif du titre ainsi que certaines features sympathiques, comme le fait de pouvoir jouer de son "shamisen" quand on en a envie, à son camp ou en marchant, aident à s'immerger dans cette vie solitaire. La chose qui me désole un peu niveau RP, c’est le fait que nos choix de réponses n’ont guère de conséquences. Okay, je sais, c’est un Action-Aventure et non dans un RPG, mais l’un n’empêche pas l’autre !


Le souci c’est qu’en dehors des quêtes principales, le niveau d’écriture tombe à zéro. Les quelques quêtes secondaires qui parsèment le jeu manquent cruellement de scénario. Il s’agira la plupart du temps de vider un camp ennemi pour libérer quelqu’un. C’est un peu tristounet, on ne va pas se le cacher. Mais le plus navrant est certainement le nombre de points d’intérêt et d’énigmes un peu naze à dénicher pour faire évoluer ses compétences. Hôtel de prière, tanière de loup, onsens et renards à la con (ok... j’m en veux déjà d’avoir insulté les renards, mais ils sont chiants aussi...). C’était déjà le cas dans le premier opus mais j’ai l’impression qu’il y’en a encore plus ici. D'autant qu'en plus des oiseaux qui t'attirent jusqu'au point d'intérêt lorsque tu passe à coté, comme dans Ghost of Tsushima (ce qui était une features sympathique et pas trop intrusive), ici le jeu te vend EN PLUS des cartes qui te localise précisément tous ces points ! Sérieux ?! Pourquoi ne pas rajouter une mini map et une boussole à ce compte là ? Bref... C'est frustrant. Ou bien c’est juste moi qui arrive à saturation avec cette façon de concevoir un monde ouvert. C’est presque pire ici que dans les dernières réalisations d’Ubisoft qui avaient tenté de se renouveler dans “Avatar” et “SW: Outlaws” (pas de façon ultra convaincante, certes, mais tout de même). Je ne parle même pas des séances de grimpe d’un autre temps avec points d’accroche préalablement définis et peints.

D’autant que ces quelques mini points d’intérêt mis à part, l’ile d’Hokkaidō parait très vide dans l’ensemble. Tout n’est que roche et végétation. Il y'a bien quelques rares villages mais qui ressemblent plus à des hameaux, des camps d’ennemis qui ressemblent plus à des campements d’éclaireurs et des châteaux pour les combats de boss. Seulement à part ça on ne croise à l’occasion que quelques bâtiments isolés, comme des auberges. D'ailleurs, disons-le, une auberge au milieu de nulle part n’a pas tellement de sens. Ou habitent les gens qui la fréquente le reste du temps ? J’ai l’impression que Sucker Punch a choisi Hokkaidō comme terrain de jeu uniquement pour pourvoir dire qu’historiquement cette dernière était, il est vrai, très peu peuplée par les Japonais à cette époque-là (ça doit bien les arranger en tout cas). Certains se sont plaint que cette fois encore l’action ne se passe pas sur l’ile d’Honshū (la plus grande de l’Archipel Japonais) mais imagine devoir représenter Kyoto et ses habitants avec ce moteur à la traine. Pourtant la Team Ninja a su le faire dans son “Rise of the Rônin”, tout en étant également un peu daté graphiquement. On croise bien de temps à autre quelques "Aïnous" (qui sont les premiers habitants d’Hokkaidō) mais ça reste bien trop anecdotique et ne sont là, la plupart du temps, que pour faire office de marchand itinérant. D’ailleurs le système de marchand du jeu n’est pas très convaincant lui non plus. On croise toujours les mêmes un peu partout sur l'ile avec les mêmes articles à vendre. En résumé, j’ai acheté ce qui m’intéressait dans la première zone puis lorsque je les recroisais dans les suivantes, leur stock ne se renouvelant jamais, nos interactions se résumait juste à “bonjour, au revoir” et basta.


Heureusement l’essentiel du gameplay de Ghost of Yōtei, que sont les phases de combat et d’infiltration, est toujours aussi agréable et satisfaisant que chez son prédécesseur. Les animations sont fluides et parfaitement chorégraphiées. Les scènes de combat de la quête principale sont relativement épiques et bien mises en scène. Le lent rengainage du Katana à la fin d'une dure bataille (sans oublier d'y ôter le sang qui le recouvre) me donne toujours autant le frisson. Quant au système à cinq armes qui prennent chacune le dessus sur un autre type (tel un chifoumi sanglant) est vraiment très intéressant je trouve, interactivement parlant. Une fois que l’on maitrise totalement l’utilisation de chacune d’entre elles, les combats les plus difficiles deviennent vraiment jouissifs et le gain de compétences permet de varier les plaisirs tout au long de l’aventure. Ces combats pourront certainement paraitre bien trop simples pour un certain type de joueurs, mais n'étant pas un joueur de souls-like j’aime gagner mes combats sans avoir à mourir plusieurs fois d’affilé, c’est bon pour mon RP (Cela dit je meurs quand même bien trop souvent sur les principaux boss). J'ai également bien aimé les phases d’infiltrations bien qu’elles ne renouvellent rien comparées à un Assassin’s Creed et que l’IA n'y soit pas beaucoup plus intelligente, mais bon, on y est habitué maintenant...


En résumé Ghost of Yōtei est un jeu qui accuse un retard technique comparé à la concurrence et son monde ouvert est un des plus générique que j’ai vu ses dernières années, ce qui est peut-être vu par certains (à raison) comme rédhibitoire. Heureusement le cachet apporté par la direction artistique permet de donner un certain intérêt à le parcourir, néanmoins personnellement mon principal intérêt dans ce jeu est de pourvoir vivre la vie d’une rônin en pleine vendetta à travers des combats épiques et une trame narrative qui appelle à en connaitre plus malgré sa plume peu inspirée.

Le jeu de Sucker punch n’est certes pas à la hauteur de mes attentes après l’excellent Ghost of Tsushima qui avait mis la barre très haut, cependant, si l’on met ces attentes de côté, celui-ci reste très correct. Surtout bien meilleur qu’AC Shadows, avec lequel je ne peux définitivement pas m’empêcher de le comparer... C’est pourquoi ayant mis 6/10 à ce dernier je vais mettre un 7/10 à Ghost of Yōtei (note très subjective) qui m’apporte plus de plaisir manette en main ! Cela dit ce ne serait pas un mal de repenser la licence avant le futur "Ghost of Honshū" (oui je le leak avant même que Sucker Punch et Sony soient eux mêmes au courant)

West-Coast-dArmor
7

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il y a 4 jours

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