Si les jeux de course sont rapidement sortis en nombre sur la Playstation 1 pour y rencontrer un certain succès, Sony avait l’ambition de porter le genre vers de nouveaux sommets avec Gran Turismo. Ce projet fut dirigé pendant 5 ans par Kazunori Yamauchi, qui était déjà responsable du jeu de course Motor Toon Grand Prix pour le lancement japonais de la console et qui deviendra la tête pensante de toute la saga Gran Turismo. Dépassant les 10 millions de ventes, le titre deviendra tout simplement le jeu le plus vendu de la Playstation juste devant Final Fantasy VII. Voyons les raisons de cet incroyable succès et si j’en partage l’enthousiasme tout en écoutant Freedom to Win.



GAMEPLAY / CONTENU : ★★★★★★★★☆☆



La première grande originalité du titre se retrouve dans son écran titre. Tout d’abord, il existe un mode arcade des plus classiques et communs aux autres jeux de course automobile. On sélectionne un circuit, sa voiture parmi une sélection pré-configurée nous montrant des statistiques très simplifiées, on choisit d’y jouer seul ou à deux et en piste. Si l’exécution en est très bonne, il n’y a que peu d’originalité là-dedans, le contenu se débloquant petit à petit de façon légère, comme un peu partout. Cette singularité se trouve dans le mode qui donne son titre au jeu, Gran Turismo, soit un mode carrière composée d’épreuves déblocables par le succès aux précédentes et d’une gestion d’économie avec la possibilité de gagner de l’argent et de le dépenser pour de nouvelles voitures et options de paramétrage.


On retrouve une courbe de difficulté progressive et cohérente dans les différentes épreuves débloquées. En effet, avant de concourir à une sélection de championnats, nous avons les épreuves du permis qui permettent d’appréhender les différents types de conduite et de s’entraîner sur des portions de circuit particulièrement délicats, notamment les virages plus difficiles à prendre ou les plus importants car précédant une longue ligne droite. Une fois le permis en poche, ce qui n’est pas une mince affaire sans même parler d’y obtenir les meilleures récompenses, on a d’abord affaire à des épreuves avec un large choix de voitures peu puissantes, donc facilement maniables, et améliorables, donc potentiellement plus puissantes que la concurrence pour que le farming soit possible.


Puis, les permis demandent de réaliser des temps sur des distances plus longues avec des voitures plus capricieuses pour débloquer des épreuves aux conditions d’accès plus restreintes et ne laissant que peu de possibilités d’être plus puissant que ses concurrents pour compenser un mauvais skill de notre part. En effet, non seulement les voitures ont des performances mais un comportement au volant très différents les unes des autres, mais elles sont aussi très différentes selon leurs améliorations et paramétrage. La tête à queue est vite arrivée et conduire de façon brusque est vite et lourdement sanctionnée. Ce n’est donc pas sans raison que le jeu fut le premier à supporter intégralement la Dualshock, la fameuse manette à deux joysticks, norme devenue fondamentale par la suite du jeu vidéo dans son ensemble.


Le maniement avait aussi pour originalité de proposer un système de transmission automatique ou manuel, ajoutant les passages de rapport aux commandes à rentrer en plus de la direction, de l’accélération et du freinage. Un excellent compromis a été trouvé pour que le système automatique soit suffisamment efficace pour que le manuel ne s’impose pas pour finir le jeu, mais avec tout de même cette marge de progression justifiant pleinement l’effort de prendre en main le système manuel afin d’optimiser au plus les performances du véhicule. Le gameplay de Gran Turismo est ainsi d’une très grande technicité pour son époque en plus de se présenter dans un contenu généreux à la progression addictive, seul le manque d’option des tri des voitures dans le garage fait tâche à cet aspect.


On peut même y retrouver des modes de jeu assez originaux comme les courses d’endurance, facultatives, qui sont assez intéressantes grâce à la stratégie des changements de pneus même si j’aurais peut-être préféré des courses d’endurance à la durée plus courte et à l’usure des pneus plus accéléré. Près de 2 heures sur le même circuit, ça finit par ennuyer un peu tout de même. Mais encore une fois, c’est facultatif donc je ne reprocherai pas le jeu. Cerise sur le gâteau, le jeu est assez intelligent dans son mode 2 joueurs en permettant d’acheter et de vendre des voitures d’une carte mémoire à une autre, de sauvegarder une voiture et ses nombreux paramétrages dans la carte mémoire de manière à jouer en mode duel chez un autre joueur sans avoir à reparamétrer toute la voiture…


Il manque encore un peu de contenu pour être exhaustif, notamment à cause de la surreprésentation des marques japonaises et de l’absence de marques européennes en dehors du Royaume-Uni, d’une répétition de certains circuits avec le recours au circuit inversé pour essayer de le masquer… De plus, les petits problèmes ludiques récurrents pour ce genre de jeu persistent avec une IA correcte mais très prévisible, une gestion des collisions parfois brouillonne, un moteur physique limité, l’absence de gestion des dégâts… Mais toutes ces petites limites sont à mon sens très excusables pour un premier épisode aussi ambitieux et maîtrisé, des qualités qui se retrouvent également dans la réalisation et l’esthétisme du titre.



RÉALISATION / ESTHÉTISME : ★★★★★★★★☆☆



La cinématique d’introduction annonce la couleur d’un jeu de course automobile qui compte bien en mettre plein la vue avec des images de synthèse servies par les mêmes angles de vue que l’on peut avoir en jeu et pendant les replays. C’est à la fois de la poudre aux yeux et un assez juste reflet des intentions techniques visant un haut niveau de détails sur ces différents éléments pour un jeu de 1997. La modélisation des voitures est très poussée et on reconnaît très bien les différents modèles jusque dans des détails assez petits qui auraient pu vite être zappés en ce début de la 3D et qui au contraire sont très mis en avant pour montrer ces ambitions visuelles.


Le sound-design fut aussi très travaillé en ce sens avec des bruits de motorisation selon les véhicules, le crissement des pneus avec beaucoup de variations selon la tenue de route… Le clipping est le défaut technique majeur mais il semble inévitable vu les autres ambitions visuelles et il est plutôt discret en ce sens que le tracé de la route et les voitures restent modélisés à très longue distance, seuls les éléments visuels superficiels souffrent de ce clipping, je ne le reproche donc pas au jeu. Les temps de chargement sont également longs et fréquents, mais là encore c’est pleinement justifié et ça n’intervient jamais à un moment où on veut absolument que deux séquences s’enchaînent.


Les circuits offrent des panoramas assez variés et plutôt bien mis en avant avec un long virage qui laisse le temps d’admirer le paysage, une couleur dominante ressortant par l’éclairage… Les circuits sont assez riches visuellement et on peut identifier d’un coup d’œil où nous sommes dans le tour en fonction du décor des plus grands circuits. De la même manière, beaucoup de repères visuels sont disséminés pour nous guider, nous rappeler qu’un virage dangereux arrive… et tout ça de manière systémique, ce n’est pas l’interface qui le renseigne sans aucune subtilité.


Si cette interface peut prendre une certaine place à l’écran en étant assez chargée en détails, on a quelques options pour la paramétrer et elle est assez utile, intégrant par exemple un rétroviseur en vue subjective. Un système de replay assez complet permet de revisionner et d’enregistrer nos performances de façon assez libre et spectaculaire. On peut ainsi alterner à loisir entre angles de vue depuis des postions statiques dans les virages et en bord de route, vue subjective à ras du sol, vue depuis l’aile de la voiture… pour une mise en scène assez impressionnante pour l’époque, permettant de pleinement admirer la réalisation grandiose du titre et d’immortaliser nos meilleurs temps si durement acquis.


L’OST est très différente selon si l’on se trouve au Japon ou non. Si le titre original japonais comprend une multitude de thèmes originaux, composés par Masahiro Andoh et Isamu Ohira, de grande qualité dans des registres musicaux variés que j’apprécie grandement, l’OST occidentale est une succession de musiques extraites d’albums déjà existants. Je préfère largement le choix japonais et je regrette de ne pas pouvoir jouer à une version française avec ces musiques, même si la composition occidentale comprend tout de même quelques titres que je peux apprécier.



CONCLUSION : ★★★★★★★★☆☆



Gran Turismo fut une véritable révolution dans la technicité de son gameplay qui explore toujours plus les possibilités de la 3D, dans la richesse de son contenu diversifié et bien équilibré ainsi que dans la superbe de sa réalisation visuelle et sonore. Pour toutes ces raisons, il s’est inscrit parmi les titres les plus importants de sa console, de son époque et de son genre, témoin de toute la pertinence du succès de Sony sur sa génération pour laquelle l’année 1997 fut une année majeure, en partie grâce à Gran Turismo, départ d’une saga emblématique de la firme.

damon8671
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le 19 juil. 2020

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