Taux de spoiler : 5.8% (46% si vous êtes gaucher)


Après avoir ouvert le bal de la nouvelle génération avec le remake d'un jeu culte de la PS3 auquel personne n'a joué, Sony lance sa première exclu de 2021 en misant sur un TPS/Rogue like arcade et exigeant.


Commençons directement par la conclusion : Returnal est un excellent jeu mais j'aurais du mal à le conseiller à tous les joueurs.
On y incarne Selene, une astronaute dont le vaisseau s'écrase sur la planète Atropos. Son objectif est de s'échapper mais c'était sans compter sur la totalité des habitants qui veulent lui faire la peau.


Returnal est du genre nerveux. Pas question de rester à couvert et d'aligner les ennemis, ici le mouvement est la clé de la survie. La première chose qui nous saute au visage, en dehors des aliens, c'est la fluidité et la rapidité des déplacements. Selene répond au doigt et à l’œil, on saute, on dash, on vise, on court comme si on avait fait ça toute notre vie. Le plaisir est immédiat.
Housemarque, le studio derrière Returnal, est un habitué de l'arcade et les racines shmup du jeu ne laissent aucun doute. Les ennemis nous envoient des boulettes par dizaines qu'il va falloir esquiver tout en leur tirant dessus. Les développeurs réussissent parfaitement à retranscrire ces sensations et ce gameplay dans un jeu de tir caméra à l'épaule.


On ne va pas épiloguer sur la technique, le jeu est joli, propre et tourne à 60 FPS sans broncher. En revanche, la vraie claque next-gen se trouve dans l'utilisation de la manette Dual Sense. En plus des petites vibrations qui nous font ressentir la pluie par exemple, le jeu nous envoie sans arrêt des dizaines de petits feedbacks à travers la manette. Couplé à une spatialisation sonore hyper précise, on se retrouve immergé comme jamais. C'est difficile à expliquer mais pour donner un exemple concret, on va esquiver une attaque qui venait par l'arrière parce qu'on l'a "sentie" arriver. Ou alors une vibration caractéristique nous indiquera que le tir secondaire est chargé.
En parlant de tir secondaire, le combat se passe comme dans la plupart des jeux de tir modernes c'est à dire que l'on vise avec la gâchette gauche et on tire avec la droite. Le petit twist de Returnal, c'est de nous faire arrêter la gâchette de visée à mi-course grâce au retour haptique pour la visée normale, et en "forçant" sur cette même gâchette, on engage le tir secondaire. Déroutant cinq minutes, ultra efficace toujours.
Cette utilisation complètement inédite de la manette est un nouveau benchmark pour les jeux d'action à venir et le moment to moment, les phases de combat donc, positionnent tout de suite Returnal comme l'un des TPS les plus grisants des 20 dernière années. Oui rien que ça!


Si vous êtes encore là, vous devez vous demander pourquoi ce jeu n'a pas forcément vocation à se retrouver dans toutes les PS5 de la planète. Returnal inscrit sa progression dans le genre Rogue like. Faisant les beaux jours des développeurs indépendants avec des titres comme Hades, Dead Cells, Darkest Dungeon... le Rogue like ou plus précisément Rogue lite (on y revient juste après) demande au joueur de terminer sa partie d'une traite et le renvoie à la case départ en cas d'échec. L'évolution de la formule, le Rogue lite donc, offre une progression entre les runs avec des bonus permanents comme des vies supplémentaires dans Hades, des potions dans Dead Cells ou bien des probabilités supplémentaires de tomber sur des armes plus puissantes. L'avantage du Rogue lite est de jouer sur deux paramètres :


1) La difficulté. Les Rogue lite sont souvent des jeux assez difficiles dans l'absolu, le but étant évidemment que le joueur doive faire plusieurs runs pour arriver à en finir une. Le gain de bonus permanents rend les parties suivantes plus faciles et parfois un petit bonus de vie ou une meilleure arme permettra à des joueurs de passer un mur de difficulté qui paraissait infranchissable.


2) La motivation. De la même manière, une progression entre les runs permet de se donner de petits objectifs moins ambitieux que celui d'accéder au générique de fin. Chaque run perdue ne l'a pas été en vain car on repart quasiment toujours avec un gain, ce qui motive pour relancer une partie et essayer une nouvelle fois malgré la répétitivité de la formule.
Si vous y avez joué, Hades est probablement le Rogue lite récent qui a la progression la plus peaufinée et permet de s'adapter à tous les joueurs.


Returnal n'est pas un bon Rogue lite. Surtout dans sa première partie. La principale méta-progression offerte au joueur se trouve dans les attributs d'armes. En effet, toutes les armes du jeu possèdent différents bonus au départ verrouillés. En tuant des ennemis, on débloque ces bonus de façon permanente si bien que la prochaine fois que l'on trouvera telle ou telle arme, elle aura une certaine probabilité d'embarquer ce(s) bonus. On va par exemple trouver un fusil à pompe qui tire une balle supplémentaire hyper précise pour aligner un ennemi de loin, ou bien la carabine dont la cadence de tir augmente tant que l'on reste appuyé sur la gâchette.
Ce système fonctionne sur le papier mais dans les faits, on ne débloque les bonus "pétés" que dans la seconde partie du jeu. Et pour arriver à ce niveau, où les attributs font la différence entre une run de l'enfer et un boss explosé en deux minutes, il va falloir passer un mur de difficulté, il va falloir try hard, il va falloir git gud comme les vrais.
C'est durant ces premières heures que le jeu est le plus frustrant. Pour les plus doués, la pente sera relativement douce mais pour les autres il va souvent falloir compter sur le skill et la chance. Heureusement la situation s'améliore grandement après un certain boss mémorable et les parties suivantes donneront accès à des attributs jouissifs et destructeurs.


Autre élément absent de Returnal : les builds et synergies. Un des plaisirs des Rogue lite typés action est de pouvoir orienter un peu sa run en accumulant certains bonus pour créer des synergies et "casser" le jeu. Par exemple, l'utilisation d'un arc déposant de l'huile sur les ennemis couplée à des grenades incendiaires, va sûrement rappeler de bons souvenirs aux joueuses et joueurs de Dead Cells.
N'espérez pas vous en sortir comme ça pour aller au bout de Returnal. Certes, certaines armes vont grandement nous faciliter la vie mais on ne pourra pas en faire grand chose de plus.
Dernier point négatif sur l'équilibrage de ses mécaniques : le jeu propose sans arrêt des dilemmes à base d'objets apportant un bonus et un malus aléatoires. On ne va pas se mentir, ça ne vaut jamais le coup. Quelques PV bienvenus se paieront par un cooldown rallongé de plusieurs secondes pour votre dash ou votre coup de mêlée. Et même s'il existe la possibilité de lever ces malédictions en menant à bien quelques actions, la pression supplémentaire est rarement justifiée. On passe donc la plupart du temps à côté de ces petits objets sans même s'en préoccuper.


Heureusement, Returnal se rattrape sur le déroulé des runs. Les parties sont longues et difficiles, aussi le jeu nous offre la possibilité de ne pas affronter les boss déjà battus, et de skip des biomes entiers (le premier servant plus ou moins de HUB) au prix du loot qu'on aurait pu y trouver. Bienveillant, si l'on décide de passer du premier au troisième biome, le jeu nous offrira l'XP requise pour ne pas mourir en moins d'une minute. En cas d'échec, on peut donc rapidement retourner à un boss un peu retors même si je conseillerais de visiter un peu des niveaux que l'on connaît par cœur pour grinder


Au final, Returnal est peut-être le meilleur TPS sorti depuis 20 ans et si le genre vous plaît, il serait cruel de ne pas lui laisser une chance. C'est aussi un jeu parfois injuste, frustrant, pas toujours équilibré dans sa progression mais qui saura vous récompenser quoiqu'il arrive. Les Rogue lite indépendants passent la plupart du temps par des mois voire des années d'early access pour équilibrer leurs mécaniques. On comprend ici pourquoi.


Un excellent jeu, une merveilleuse exclu mais attention où vous mettez les pieds. Un petit mot sur le scénario, intriguant, surprenant, très efficace. Ce n'est pas lui qui nous fera relancer une partie mais Housemarque a le mérite d'avoir parfaitement intégré sa boucle de gameplay à l'histoire.

Pipock
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le 21 sept. 2021

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