le 26 sept. 2025
* À la recherche d'un titre *
Aaah Silent Hill f.. Depuis l'annonce qui a spécifié que ce serait Ryukishi07 au scénario, je n'ai eu de cesse de compter les jours avant sa sortie.J'ai fait les 5 endings donc cette critique va...
SensCritique a changé. On vous dit tout ici.
Attendu pour ma part dès les premières images du jeu, offert récemment pour mon passage à l’âge supérieur (sigh…) par un excellent camarade, ce Silent Hill F m’a occupé à la fois les mains et l’esprit pour une quatorzaine d’heure. Annoncé il y a relativement peu de temps en définitive, il marque le retour officiel de la saga dans une histoire inédite, complète et originale dans tous les sens du terme.
Cet épisode ne se déroule effectivement pas à Silent Hill mais à Ebisugaoka, petit village japonais durant les années 1960. La protagoniste est une lycéenne, nommée Shimizu Hinako. qui aura pour objectif, rapidement, de retrouver ses amis qui sont dans le village, désormais étrangement dépeuplé, atteint d’un brouillard épais et rapidement même d’un genre de lierre sanguine, toxique, aux fleurs ressemblants souvent à des chrysanthèmes, des feuilles rouges, des racines semblables à des veines et des tumeurs sur le point d’éclater, et le tout poussant à une vitesse indécente. Si la survie est compliquée et l’exploration précipitée dans un premier temps, Hinako tombera aussi dans un monde parallèle sombre, gouverné par un homme au masque de renard. Ces niveaux sont en général des moments d’inconscience d’Hinako qui vont de pair avec des situations encore plus fantastiques, quand le village d’Ebisugaoka reste relativement réaliste.
Cette situation sans précédent dans la série de jeu va impliquer le développement d’une histoire extrêmement riche. D’abord, elle est portée sur la culture nippone d’un Japon en transition après la 2GM, entre l’abandon progressif des normes et valeurs impérialistes/fascistes des années 1920-1930, et une nouvelle génération de personnes qui n’ont pas connu la guerre ni le risque de colonisation, et n’accepte plus les codes autoritaires et conservateurs. Par ailleurs, c’est une histoire à hauteur d’enfants, et cela implique les relations envers les adultes, mais aussi parentales, amicales, amoureuses et plus intimes. De manière générale, il y a clairement un bouillonnement et une incompréhension marquée entre ces jeunes et les adultes, qui paraissent brutaux, imbéciles et injustes, mais aussi le monde qui les entoure, qui se modifie et devient dangereux. Aussi, la transformation de la ville elle-même représente le passage de l’enfance à l’âge adulte dans un sens. Ensuite, SHF est un excellent hommage à l’horreur japonaise (films, mangas, estampes, mythologie…) dans son atmosphère pesante et étrange, jouant souvent sur une familiarité dérangeante, où la moindre dissonance devient point de tension, et avec ses monstres qui incarnent des corps et objets trop connus et restent pourtant difficiles à définir, ou encore, ses personnages mesurés d’apparence mais qui peuvent basculer vers une violence exacerbée ou la perte de contrôle totale. Ce qui va enrichir fortement cela passera par des références régulières à la religion Shinto qui seront marquées plus ou moins explicitement ça et là mais en particulier, notamment par la prière pour sauvegarder, les temples autour du village, mais essentiellement avec toutes les symboliques sur le Renard et l’esprit d’Inari elle-même qui est mentionnée au cours de l’aventure, et a même ses lieutenants (et sans doute que la couleur rouge lui est associée, à vérifier). S’ajoute, la psyché de Hinako qui devient, comme dans tout bon Silent Hill, un enjeu horrifique majeur, notamment parce qu’elle est souvent présentée dans une posture fragile et pourtant d’une brave inconscience, mais l’on comprendra que ses relations amicales et familiales sont frustrantes, anxiogènes et même, la font tomber dans des accès de démence ponctuels. Elle se cherche en termes d’identité et une large partie de ses moments d’introspection consiste à se définir elle-même, soit par rapport à ses proches, soit par ce qu’elle cherche à être, soit parce qu’elle subit, qu’elle l’accepte ou le refuse. Une très importante transition a lieu au milieu de l’aventure, mais il est remarquable que cela ne fixe pas définitivement son identité qui est en constante évolution jusqu’à la fin. Par ailleurs, même si le jeu lâche assez tôt la possibilité d’interpréter la possibilité d’avoir affaire à une bande de personnages morts et perdus dans des lymbes, il n’y a largement pas de quoi se satisfaire de cette réponse car cette hypothèse implique des suspensions d’incrédulité trop récurrentes. Toutefois, cette suggestion reste particulièrement dérangeante car elle implique que les personnages seraient coupables de… l’on ne sait quoi. Aussi, je pencherait plutôt pour une certaine image d’un bannissement du monde des adultes. Pour compléter, SHF prend le parti (courageux de nos jours face à la grosse-beaufitude latente que l’on peut croiser ça et là...) d’apporter toute une réflexion précise et franchement dense sur les conditions des filles et des femmes : le jeu évoque donc les questions de pression sociale, des codes physiques et vestimentaires imposés, ainsi que les normes comportementales, les questions de soumission à l’adulte et aux hommes en général, mais bien sûr aussi, les abus sexuels et l’objectification du corps féminin… Et il le fait très bien, tout passe subtilement, intelligemment et efficacement (Et comme je redoute énormément ce qu’il peut se tramer sur les sites de mods à présent !).. Autrement, la thématique de l’école est elle aussi importante et relate de cette maladie de la compétition pour tout : la popularité, les notes, la bienséance… mais aussi montre clairement les actes de désobéissance et les conséquences sociales de tout ce qu’implique ce climat nauséabond. Et puis, les classes sociales sont elles aussi marquées. Pêle-mêle, on comprendra qu’Hinako est issue d’une famille pauvre, qui doit souvent s’endetter pour se nourrir, se soigner. Cela est mis en parallèle à travers des documents avec une famille aisée, les Tsunakis, qui littéralement « profitent » des malheurs des autres et organisent un entrisme complet. Dans SHF, cela se traduit par l’évocation du mimétisme des codes aristocratiques et bourgeois de la part d’Hinako : exprimé par exemple par le fait qu’à son premier retour chez elle, la maison soit devenue immense et riche, ou encore via la scène du mariage et son abominable rituel préalable que cela implique. Mais il y a aussi une détestation qui émerge, car la situation implique nombre d’injustices, exprimées par petits indices indirects, par exemple via les témoignages de ses proches qui peuvent être violents face à ses réussites qu’elle ne mériterait alors pas selon eux, mais aussi par sa colère vengeresse immense et même sans limite dans la deuxième moitié du jeu. Enfin, de par la nature du mal qui ronge la cité, un discours écologique est évident, soulignant la vanité de l’humain et de ses activités, face à la puissance de la nature capable de ronger, d’altérer, de décomposer et de digérer tout ce qui a pu être produit et fabriqué, rappelant que la Terre ne disparaîtra pas facilement, mais que ses habitants par contre eux, sont en danger. Ainsi, le contenu scénaristique et narratif est dense, très ouvert à l’interprétation, il n’y aura pas de réponse fermée avant la fin, et des fins justement, il y en a 5 en tout. Il y a autant de chemins et donc de possibilités de s’y perdre, que de possibilité de trouver nos propres réponses. Et c’est absolument fantastique ! Car effectivement, cela respecte l’ADN des Silent Hill tout en trouvant une transposition très valide dans ce morceau de Japon des années 1960. Seul léger défaut, les énigmes en mode « Lost in the Fog » demandent parfois aussi beaucoup d’analyse, pourquoi pas, mais peuvent être relativement inaccessible quand on manque de culture nippone.
Graphiquement et techniquement désormais, le jeu est somptueux, je regrette de ne pas pouvoir le faire tourner à bloc sur ma machine, et pourtant, déjà avec les paramètres entre « moyen » et « haut », les lumières sont fabuleuses, les textures impeccables partout, les reflets presque intouchables, les animations faciales et le détail des personnages et des monstres sont hallucinants de finesse. La mise en scène est très inspirée, notamment à partir du troisième chapitre quand, en tout cas pour moi, le jeu commence véritablement. Pour les râleries, même s’il est mieux optimisé que SH2R, clairement, sans beaucoup de VRAM, le stuttering vous guette rapidement malheureusement car le jeu charge et décharge tout le temps des scripts et des zones avec les modèles etc. Ce qui est particulièrement dommage, car il peut arriver que le simple fait de jeter un œil à un cadenas casse le framerate en le divisant par 10, jusqu’au point de devoir recharger sa partie, ou que même sans bouger le personnage, le simple mouvement de caméra peut provoquer des toussotements qui obligent à réduire les paramètres parfois plus que cela ne sera nécessaire quelques pas plus loin. Mais relativement à son aîné, SHF s’en sort nettement mieux, il est plus stable (pas de crash), plus fluide et je n’ai jamais fini coincé nulle part par exemple. Par ailleurs, dans le level-design, il n’y a peut-être pas assez de choses à fouiller dans les décors, il y a quelques facilités avec ce problème de « murets » où un obstacle relativement petit devient impossible à contourner, il y aurait pu avoir aussi une petite vue à la première personne en exploration même sans déplacement, je l’aurais prise. Il n’y a toujours pas de mode photo (là je pige pas par contre), et pendant les cinématiques, Hinako a toujours un tuyau en main en guise d’arme, alors que je l’avais lâché il y a mille ans.
Mais c’est surtout dans son système de jeu que quelques points vont poser le plus de soucis. Si vous avez regardé les critiques, il y a unanimité pour dire que les combats ne sont pas très bons. Quand on dit ça en vérité, on ne dit pas grand-chose. Et pourtant, il faut partir effectivement du principe que tout ce qui concerne les affrontements est effectivement problématique à différents degrés, sans jamais tomber dans l’injouable non plus. Juste, c’est pataud. Alors, dans le détail, commençons par le personnage, qui malgré son athlétisme revendiqué, n’est pas souple, mais alors pas du tout. Les coups sont lents à sortir avec une animation abusivement lente parfois (je pense que le jeu fait un calcul au ralenti à base de : déclenchement de l’Action 1 → animation Hinako + animation ennemi + vérification si Ok pour le décor → possibilité de faire Action 2), les esquives, certes rapides, ne se déclenchent pas tant que l’animation précédente n’est pas passée, et elles ont tendance à faire partir Hinako dans une direction pas toujours voulue. Les ennemis sont vraiment bien travaillés, certes, mais il doit y en avoir à peine 6 types différents qui vont simplement devenir plus fort au fur et à mesure, mais surtout, ils sont très nombreux et parfois, l’ensemble tourne à la mêlée où l’on peut allègrement se faire infiniser. Les armes s’usent, elles sont modérément fragiles, plutôt variées aussi en termes de puissance et de poids, ce qui est bien ! Ce qui l’est moins est de ne pouvoir en avoir que trois différentes. Il est possible aussi de développer des capacités supplémentaires pour avoir plus de points de vie (moyennement utile en jouant en « Moyen »), plus d’endurance (ça par contre c’est ABSOLUMENT indispensable, c’est ce qui rend les combats bien plus supportables) et plus de santé mentale (j’en cherche encore l’utilité...), ça passe par des offrandes sur les autels de sauvegardes, mais il est toujours contraignant de choisir un avantage qui s’obtient en échangeant des points de Foi. Le système est intéressant mais pensé pour des personnes qui vont faire le jeu plusieurs fois, ce qui est un peu frustrant sur la longueur. Avec la lenteur générale et un système de progression bancale, il y a aussi les collisions : le moteur physique est vraiment problématique, le personnage peut se retrouver momentanément collé à un bout de décor, à un mur et ce, assez facilement. Dans un jeu où beaucoup de combats sont dans des petits espaces, bien sûr pour éveiller un instinct claustrophobique, ça peut devenir un grave problème lorsque les développeurs ont mis plusieurs ennemis plus agiles et rapides que nous. Je ne compte plus le nombre de fois où, voulant faire une embuscade au détour d’un couloir ou autre, je frappais, et que mon arme cognait un rebord quelconque, parfois tangible, parfois pas, mais que l’ennemi rétorquait directement parce que lui, son attaque passait toujours. Pour être transparent, j’ai abandonné le mode « Difficile » après le combat dans le deuxième chapitre (contre cet ennemi insupportable sans visage qui court et saute partout…) parce que ça ne me semble pas tenable de faire le jeu dans ces conditions (point de vue très subjectif ici). Enfin, en dehors de ce système de combat, la gestion de l’inventaire n’est pas terrible : il peut accueillir 8 objets différents en tout, mais, il y a de très nombreux types d’objets différents et ça implique par exemple que de ramasser une trousse à outil pour réparer son arme prend un emplacement, mais un petit paquet de chips ou un peigne en prennent aussi un chacun... Par contre en avoir plusieurs ne compte pas plus avant un certain seuil. Je pense comprendre la suite de choix dans ce jeu de survie et d’horreur qui ont mené à ce résultat, mais quand on doit se cogner une série d’aller-retours vers l’autel pour faire les offrandes juste désencombrer ses poches, c’est souvent chronophage et assez pénible.
Dernier point crucial pour les Silent Hill, les sons et les musiques. Et bien, tout est parfait en fait ! Que dire de plus ? Les ambiants sont géniales, les bruitages impeccables, les doublages, en anglais ou en japonais sont crédibles, les bruits jettent un atmosphère délicieusement angoissant, les monstres ont des sons caractérisés qui fonctionnement très bien et bien sûr, les musiques plus marquées sont elles-aussi imparables.
Alors voilà, il faut savoir pourquoi vous venez ici : si vous cherchez à vous amuser avant tout en passant du monstre à tabac, vous risquez vite de vous rendre compte qu’il y a mieux ailleurs ou alors qu’il faudra donner pas mal d’amour au système de combat. Par contre, si vous souhaitez une bonne petite cure d’horreur, là vous avez trouvé un excellent filon ! Et si en plus vous aimez vous gratter le cerveau et chercher à interpréter les œuvres, là vous serez carrément au paradis !! Toutefois, gardez en tête que globalement, il n’y a rien de rédhibitoire à aucun moment et vraiment, le jeu mérite votre attention, car Konami a tenu sa promesse une nouvelle fois, de nous ramener dans nos rêves agités, dans un Silent Hill vraiment très spécial pour l’occasion.
(Bon Halloween à toutes et tous!)
Créée
le 30 oct. 2025
Critique lue 18 fois
le 26 sept. 2025
Aaah Silent Hill f.. Depuis l'annonce qui a spécifié que ce serait Ryukishi07 au scénario, je n'ai eu de cesse de compter les jours avant sa sortie.J'ai fait les 5 endings donc cette critique va...
le 30 sept. 2025
Silent Hill f est un projet plutôt étrange que Konami n’a pas créé pour essayer de « ressusciter » la franchise, mais, je cite : « exporter la franchise par thématique et non géographique ».Le...
le 5 oct. 2025
Jeu difficile à appréhender, à juger, à jauger. Sous quel angle le regarder et l'analyser ? Celui du retour d'une licence culte (pour un opus réellement nouveau on s'entend) après plus de 10 ans ...
le 11 sept. 2019
L'ennui L'ennui L'ennui Le film ne décolle pas avant une heure mais pas comme une avion, plutôt comme un planeur qui n'est pas tracté. Bon... Le point fort du premier c'est l'ambiance film...
le 6 mars 2024
Possesseur d’une copie GameCube depuis 2003, je n’étais simplement jamais parvenu à voir le bout de Metroid Prime malgré de nombreuses tentatives avortées pour différentes raisons : j’étais trop...
le 28 oct. 2018
Mais que m'est-il arrivé ? Très franchement, on m'a offert mad Max il y a un mois, je l'ai accueilli mi-figue mi-raisin en tant qu'ancien titulaire de gamecube, et me rappelant avec acidité des jeux...
NOUVELLE APP MOBILE.
NOUVELLE EXPÉRIENCE.
Téléchargez l’app SensCritique, explorez, vibrez et partagez vos avis sur vos œuvres préférées.
