Un livre fort que je peine à résumer et à décortiquer. Une ambiance digne d'un des meilleurs thrillers. Sombre à souhait. Gillian Bauer, la narratrice est une brillante étudiante âgée de vingt ans en troisième année dans une Université de la Nouvelle Angleterre des années 70. Une université pour filles. Rapidement, elle déclare au lecteur sa flamme pour André Harrow, son professeur de littérature. Au cours de l'atelier de poésie auquel assiste un petit comité d'étudiantes triées sur le volet (et dont Gillian fait partie), Harrow subjugue ses élèves, par son charisme, par ses regards appuyés, ses sous-entendus, ses propos libertins, ses textes suggestifs. La jalousie apparaît, les mesquineries aussi. Et lorsqu'André Harrow demande à ses étudiantes d'écrire leur journal intime (il incite sur « intime ») qui sera ensuite lu en classe, l'ambiance tourne à la franche compétition. Les confidences se font audacieuses et le lecteur assiste aux surenchères des rivales. Le jeu devient malsain, l'atmosphère lourde et poisseuse. Des incendies criminels se déclarent. Des tentatives de suicide frappent certaines filles. André Harrow poursuit son enseignement et incite à aller toujours plus profond à chercher la jugulaire.
Le lecteur oscille entre désapprobation, dégout et curiosité. Les personnages sont ambigus et mystérieux. Inquiétants. Tant les étudiantes que le couple libertin : André Harrow et son épouse, l'énigmatique Dorcas.
« Délicieuses pourritures » est un des vers de « Nèfles et sorbes » de D.H. Lawrence. Un vers décrivant à merveille les protagonistes (le couple pervertissant les étudiantes ; les étudiantes elles-mêmes qui sombrent dans l'horreur), le ton glauque et envoutant du discours... L'écriture de JCO est toujours merveilleuse et instille un mélange de sensualité et de noirceur. Le lecteur se sent oppressé. Mais impossible de poser ce livre qui dérange : car l'auteur a solidement ferré son public en titillant habilement notre voyeurisme primaire, notre besoin de savoir avec un texte rarement cru qui se contente la plupart du temps de suggérer. Nous aussi nous désirons nous enfoncer dans cette fange, aller toujours plus profond.
BibliOrnitho
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le 20 juin 2012

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