On dira ce qu'on voudra de Paolo Giordano, y compris du mal de son premier roman, La solitude des nombres premiers, mais le jeune auteur italien prouve avec éclat dans Le corps humain qu'il n'est pas l'homme d'un seul livre. Construit sur le principe : avant, pendant et après, l'ouvrage est très habile et maîtrisé, comme un bon thriller organique, fait de chair purulente et d'âme calcinée. Un roman de guerre, oui, celle d'Afghanistan, et surtout d'initiation, de passage à l'âge adulte. Car ce ne sont que des enfants qui, en premier lieu, tuent le temps dans ce désert inhospitalier et dont le principal ennemi semble être ... la dysenterie. Ambiance Désert des tartares, dans un ton toutefois bien différent, où l'on fait connaissance avec près d'une dizaine de personnages qui ont en commun d'avoir laissé au pays un quotidien morose et compliqué. Le ton change avec une opération qui tourne au désastre meurtrier. Giordano déploie alors un style cinématographique, spectaculaire, d'un réalisme cru (une fois encore, la traductrice, Nathalie Bauer, bien connue des amateurs de littérature italienne, fait des prodiges). La dernière partie, "l'après", est elle plus psychologique, décrivant sans emphase les blessures et les traumatismes intimes de ceux qui ont vécu "ça", soit une expérience impossible à partager. Cette trilogie du cauchemar, dense et tragique, est à mettre en parallèle avec Le jardin de l'aveugle de Nadeem Aslam. Deux visions de la guerre d'Afghanistan qui se complètent et se répondent. Avec le même sentiment d'horreur, en définitive, quant à la nature humaine.

Cinephile-doux
8
Écrit par

Créée

le 13 avr. 2017

Critique lue 167 fois

Cinéphile doux

Écrit par

Critique lue 167 fois

D'autres avis sur Le corps humain

Le corps humain
isabelleisapure
8

La compagnie Charlie

Une base Italienne en Afghanistan, Paolo Giordano met en lumière les hommes de la Compagnie Charlie. Il y a Cederna, le fanfaron, le fort engueule, Letri, le fils à sa maman surnommé «la pucelle »,...

le 16 août 2014

Du même critique

As Bestas
Cinephile-doux
9

La Galice jusqu'à l'hallali

Et sinon, il en pense quoi, l'office de tourisme galicien de As Bestas, dont l'action se déroule dans un petit village dépeuplé où ont choisi de s'installer un couple de Français qui se sont...

le 27 mai 2022

75 j'aime

4

France
Cinephile-doux
8

Triste et célèbre

Il est quand même drôle qu'un grand nombre des spectateurs de France ne retient du film que sa satire au vitriol (hum) des journalistes télé élevés au rang de stars et des errements des chaînes...

le 25 août 2021

73 j'aime

5

The Power of the Dog
Cinephile-doux
8

Du genre masculin

Enfin un nouveau film de Jane Campion, 12 ans après Bright Star ! La puissance et la subtilité de la réalisatrice néo-zélandaise ne se sont manifestement pas affadies avec Le pouvoir du chien, un...

le 25 sept. 2021

70 j'aime

13