Cet art de créer un univers en moins de cent pages

Véronique Bizot,avec Un avenir (titre ô combien ironique),propose une histoire avec un postulat dément.Soit Paul décidant de suivre la volonté de son frère jumeau Odd (étrange en bon anglais) pour vérifier si un robinet est bien fermé.La narration de Paul permet de cerner sa famille dysfonctionnelle,des parents à ses deux sœurs en passant par ses deux frères.Le trajet de trois cents kilomètres de Paul n’est peut-être pas si absurde qu’il n’y paraît car Odd occupe la maison familiale et qu’il opère donc un retour aux sources.Voilà pour le fond subtil de l’histoire.La forme,elle,déroute,car Véronique Bizot entraîne le lecteur dans des micro-histoires( pas toujours intéressantes pour montrer que souvent des situations et des détails de la vie sont dérisoires),qui sont comparables à autant de poupées russes qu’on ouvrirait à l’infini.C’est là que le lecteur doit être attentif pour ne pas perdre le fil et comprendre la finalité d’un récit qu’on pourrait considérer comme déroutant,décousu et indigeste.Cet art de créer un univers en moins de cent pages,avec autant de digressions et de détours,est véritablement prodigieux et montre que l’écrivain sait autant travailler les constructions narratives que les atmosphères ou les émotions.Au niveau du final,il est réglé sur une dizaine de lignes sur la dernière page.Mais sa force d’évocation révèle toute la grandeur d’âme de Paul qui se réveille d’une torpeur qui n’a que trop duré! Merci au hasard d’avoir mis ce court récit sur ma route en me rappelant que la littérature n’est pas forcément un exercice académique ronflant.

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le 1 mai 2018

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