SensCritique a changé. On vous dit tout ici.

Bouysse a pas vraiment besoin de prouver qu'il est un conteur hors pair. Buveurs de vent ne déroge pas à la règle.


J'aime Bouysse, j'aime ses personnages. Ici ils se multiplient, toujours comme dans les contes :


Trois frères tous très différents, une femme-mère pieuse, un père violent et absent qui comprend ses fautes beaucoup trop tard, un marin qui a subi plus de naufrages sur terre que sur mer, un pirate sage, un ogre tyran, quelques princesses par ci par là, un shérif un peu trop porté sur l'abus de pouvoir, un nain et un géant. Et un zeste d'inceste sinon ce serait pas vraiment un conte.


J'aime les endroits que Bouysse utilise, la forêt, la rivière, les ponts. Comme dans les romans précédents Buveurs d'encre est limite intemporel, si ce n'est quelques éléments parsemés à droite à gauche qui laisseraient penser qu'on est dans les années 60 dans une ville/village que l'on nourrit grâce à une usine qui enserre ses habitants/ouvriers.


J'aime la poésie de la nature, cette violence sourde, ces situations invivables, affreuses, beautés bourrées de failles.


C'est du terroir noir. Comme je les aime. Sauf que sauf que minou.


Bouysse a changé de crèmerie. Passer d'un moyen éditeur (La Fabrique) à un gros gros très gros éditeur (Albin Michel) est souvent vecteur de "je vais perdre quelques fans en route mais je vais surtout élargir mon public"... Et arrivé aux 3/4 du livre, j'ai commencé à m'inquiéter. Genre sérieusement.


Pour rien.


Parce qu'en plus de la beauté de ces textes, on lit Bouysse pour le dénouement, la situation finale, celle où tout explose, la claque dans la gueule qui te laisse sans espoir, faudra se contenter du reste quoi.


C'est un putain de malin si tu veux tout savoir, le mec se joue de nous et vient nous conforter dans ce besoin de cruauté, pas de happy end, juste une situation ouverte où les quelques survivants seront épargnés en payant un certain prix.


Si vous avez déjà lu Bouysse et que sa plume vous plaît, pas besoin d'y aller par quatre chemins pour celui-ci, c'est un bon cru.


Si vous ne connaissez pas Bouysse et que vous avez envie de le découvrir, je pense que c'est le plus accessible (mais c'est pas le plus joli par contre, et quand je dis joli je parle pas de choses qui font du bien quand tu referme le bouquin).


Si vous avez pas aimé les lectures précédentes de l'auteur, voilà de quoi vous rabibocher avec lui.


Il y a quelques faiblesses mais qui sont forcément voulues. Peut-être "pour mieux nous manger".


Wow.

LouKnox
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le 15 juil. 2020

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Lou Knox

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