Et quelquefois j'ai comme une grande idée par GuixLaLibraire
Et quelquefois j'ai comme une grande idée est véritablement un Grand roman américain. Ce qui donne sa notion de Grand roman à cette œuvre, c’est l’écriture de l’auteur, sa narration polyphonique et enlacée, la psychologie profonde de ses personnages, des plus secondaires aux principaux, et la singularité de sa prose torrentielle qui mêle habilement les genres, à la fois précieuse et gouailleuse, savante et populaire, et qui nous entraîne dans son sillage avec puissance. J’avais ressenti la même chose à la lecture de Confiteor, cette sensation au début de confusion, puis la compréhension enfin du système narratif innovent (ici il arrive régulièrement que trois personnages ou plus parlent en même temps, et Kesey utilise les parenthèses, l’italique et le dialogue pour les différencier), de ce travail d’orfèvre, de cette maîtrise de la langue, et d’une dimension littéraire tellement parfaite et aboutie qu’il faut un génie particulier pour l’accomplir. La lecture est parfois ardue, et même si le texte se déverse avec une construction très travaillée sur la page il n’est pas réellement fluide, il faut le contrôler, il faut s’accrocher aux branches, mais une fois qu’on est bien dans le courant il suffit de se laisser flotter, et on s’aperçoit de la beauté du texte… et enfin on se laisse couler dans une profonde admiration !
Alors voilà, on en sort tout déboussolé de ces Grands romans, et c’est pas cool parce qu’après il faut arriver à trouver le bon ouvrage qui te fera atterrir en douceur, en général tu tombes sur une bonne bouse qui te dégoûte et te fais dire « **tain c’était bien quand je lisais mon Ken Kesey », mais tu t’en remettras, et tu n’oublieras jamais cette lecture et tu conserveras jalousement ton ouvrage dans ta bibliothèque entourés par ses pairs, pour peut-être le relire dans tes vieux jours.