Une excellente critique du protestantisme ( plus efficace que l' unique point de vue religieux )

Bonjour à tous,


Me voilà avec ce livre ! " Mais pourquoi, pauvre diable et fou furieux que tu es, t' attaques-tu au protestantisme ? Laisse les gens croire ce qu' ils veulent ! Sois humaniste ! ". Justement, par souci de la vérité, nous devons toujours remonter aux origines des choses, pour comprendre le processus historique. ça nous évite pas mal de contresens, voire de niaiseries ! Le protestantisme n' est pas une religion, et ne le sera jamais. Amis protestants, je vous le dis avec tout l' amour de Dieu !


Plus sérieusement, reprenons-nous jeunes gens, si vous le voulez bien ! Pourquoi me laissez-vous divaguer de la sorte ? Reprenons !


Qui est Max Weber ? Max Weber est né à Erfurt en Prusse dans une riche famille protestante très cultivée, en 1864. Il est l’aîné de sept enfants. Il est juriste de formation mais se tourne rapidement vers l’économie puis vers la philosophie méthodologique et enfin vers l’histoire avant de devenir le premier sociologue allemand. Max Weber est avant tout un homme de savoir. (Il participe à la conférence de paix de Versailles, Keynes se trouve dans la délégation britannique).
Il est le fondateur de la sociologie dite compréhensive, qui postule que l’ensemble des comportements individuels expliquent les faits sociaux. En cela il s'oppose au courant holiste qui affirme, au contraire, que les faits sociaux sont explicables par d'autres faits sociaux, dont les individus ne sont que des vecteurs passifs. En d'autres termes, selon cette approche, les comportements individuels sont socialement déterminés. Le représentant le plus important de ce courant est sans doute Durkheim, pour qui la sociologie est une science des faits sociaux, alors que Weber y voit une science de l'action sociale.
Parmi l'ensemble de son œuvre citons Le Savant et le Politique, L’éthique protestante et l'esprit du capitalisme ou encore sociologie des religions.


Après une série de travaux consacrés à l'Antiquité et au Moyen Âge, ainsi qu'à l'état économique et social de l'Allemagne wilhelminienne, Weber, libéré des tourments que lui infligent les charges d'un enseignement régulier, entame, à partir de 1904, des recherches sur la sociologie des religions qu'il poursuivra jusqu'en 1920. Sous l'impulsion de l'ouvrage Der moderne Kapitalismus (1902) de W. Sombart et du débat qui s'installe, autour des contributions de E. Gothein, W. Wittich et G. Jellinek, sur les rapports existant entre le capitalisme et le protestantisme, il publie dans les tomes XX et XXI de la revue Archiv für Sozialwissenschaft und SozialPolitik (1904-1905) un premier article rédigé avant et après son voyage aux États-Unis (été 1904), puis, l'année suivante, un second traitant plus spécifiquement de la question des sectes protestantes. Après de multiples réponses aux vives critiques (F. Rachfahl, L. Brentano) suscitées par ces textes et la publication de l'Éthique économique des religions mondiales (1915-1920), Weber, encouragé par la proximité de ses analyses avec celles menées par E. Troeltsch dans Die Soziallehren der christlichen Kirchen und Gruppen (1912), entreprend finalement le remaniement de l'ensemble de ses productions sur la thématique religieuse et les regroupe en 1919-1920 dans ses Gesammelte Aufsätze zur Religionssoziologie. L'Éthique protestante et l'esprit du capitalisme n'en est qu'une traduction partielle (introduction et première partie du tome I) éditée pour la première fois en France en 1964.


Quelle est sa thèse ? La démonstration de Max Weber au sujet du lien entre « l'éthique protestante » et la naissance d'un « esprit capitaliste » est très éloquente. Il consacre une large part de son exposé à la distinction des différents courants protestants puis détaille chacun des principaux dogmes nous permettant ensuite de comprendre que cette influence des idées d'abord réservée à la vie monastique a ensuite gagnée la vie professionnelle et morale d'une société aujourd'hui tributaire de l'ordre économique moderne.


Ce livre apporte principalement la notion de" désenchantement du monde" qui a été souvent réutilisé depuis et dont une traduction plus juste aurais pu être "démagification du monde". le protestantisme, ou plus exactement les sectes américaines issues du calvinisme, met en oeuvre un ensemble de croyance engendrant chez l'individu une éthique, un mode de vie méthodique, lequel étant adéquate à l'esprit du capitalisme. En bref, des croyances irrationnelles ( non fondées sur un esprit critique de la Bible ) engendre chez l'individu un comportement de calcul rationnel.


L'Éthique protestante se compose de deux chapitres dont le premier, intitulé « Le problème », débute par un exposé des résultats d'une étude empirique menée par un élève de Weber, M. Offenbacher, qui montrait la surreprésentation des protestants dans la classe entreprenariale et technicienne du Land de Bade.


Nous pouvons, à partir de ce moment là, nous demander comment cela est possible pour des gens qui se prétendent chrétiens d' être libéraux ? ET bien, car c' est par eux qu' est venu l' usure, le libéralisme, et la liberté de conscience. C' est par eux que tout commence. Il faudrait développer plus amplement cette thèse, car je me montre, volontairement, réducteur. La réalité est bien plus complexe !


Revenons au livre ! Ouvrage majeur de l’ineffable Max Weber et référence en matière de sociologie, L’éthique protestante et l’esprit du capitalisme propose une lecture séduisante d’un phénomène propre au monde moderne – l’essor du capitalisme – en dévoilant ses racines théologiques. Le propos est passionnant et doit fixer notre attention, à la fois, sur la méthode d’analyse adoptée ainsi que sur la thèse défendue.


La thèse de Weber est simple en surface : l’éthique protestante constitue un événement majeur – pas le seul néanmoins – dans le passage d’une économie précapitaliste à une économie capitaliste. Weber tente donc d’expliquer la modification du mode de production par l’émergence de nouvelles valeurs. Si le capitalisme repose uniquement sur le fait de posséder un capital et de vivre selon les revenus de celui-ci, alors l’éthique protestante ne peut sérieusement éclaircir ce phénomène ; l’activité économique d’avant la Réforme était déjà capitaliste selon cette définition. En effet, « l’entrepreneur exerçait une activité purement commerciale ; l’emploie de capitaux était indispensable ; enfin, l’aspect objectif du processus économique, la comptabilité, était rationnel » (Weber, L’éthique protestante et l’esprit du capitalisme). Néanmoins, l’esprit qui animait l’entrepreneur conservait une fibre traditionnelle – catholique : il ne cherchait pas à s’enrichir mais à gagner suffisamment pour vivre selon son habitude.


La réussite économique n’étant pas ardemment désirée, la production, bien que raisonnablement organisée, ne connaissait pas encore une parfaite optimisation ; optimisation ou rationalisation des moyens de production en vue de réduire les coûts (augmentation de la productivité), mais aussi rationalisation des méthodes de vente (cibler une clientèle en proposant des produits spécialement adaptés). Cela n’a été possible que par l’accroissement de la part d’indépendance, d’anonymat, sur laquelle se fonde désormais les relations sociales et notamment les relations entre le détenteur du capital et ses ouvriers. L’interchangeabilité des travailleurs (et des acheteurs) fait le lit des sociétés capitalistes. Ce que Georg Simmel identifie clairement : « Le cercle relativement étroit dont dépendait l’être humain dans une société monétaire à peine ou pas développée, était bien plus personnalisé » ; « c’est avec des hommes bien précis, connus personnellement, quasiment non interchangeables, que le paysan germain primitif […] et même bien souvent encore l’homme médiéval, entretenaient des relations de dépendance économique » (Georg Simmel, Philosophie de l’argent).


L’éthique protestante aurait contribué, indirectement, à stimuler l’attention portée au travail (au métier) et à la réussite économique. Le protestantisme – surtout d’obédience calviniste – défend l’idée que seule une communauté d’élus désignés par Dieu obtiendront le salut : la grâce de Dieu ne se mérite pas, elle est donnée en dehors de toutes conditions propres à la créature. Les bonnes œuvres, la foi et les sacrements ne peuvent constituer des moyens pour obtenir un salut strictement inféodé au décret divin. C’est la croyance au libre arbitre – pourtant pas incompatible en soi avec un déterminisme providentialiste – que condamne définitivement l’esprit protestant. Personne ne peut préjuger de son élection mais tout le monde doit agir in majorem Dei gloriam.


Ainsi le travail est devenu, chez les calvinistes, un élément central dans l’amour du prochain, lui-même au service de la gloire de Dieu. Si personne ne peut connaître son statut – élu ou réprouvé – en raison d’une prédestination insondable, Calvin a pu valoriser une confiance en soi robuste, persévérante, signe de la vraie foi et de la grâce divine. Un signe intérieur et non encore la quête incontournable d’une certitude salvatrice. C’est la relation, le lien, entre l’exaltation de la gloire divine par le métier et la certitude du salut que vont proclamer les épigones de Calvin. Le travail sans relâche se transforme en un moyen d’acquérir cette confiance en soi inébranlable et donc la certitude de son salut. Il ne s’agit toujours pas d’acquérir son salut, mais de « se délivrer de l’angoisse du salut » : les bonnes œuvres permettent, dans ce contexte, de découvrir sa qualité d’élu ; elles doivent témoigner, dans leur intention, d’une conscience qui, à chaque instant, « se trouve placée devant l’alternative : élu ou damné ? »


Ce décalage entre la position de Calvin et celle de ses fidèles – décalage qu’effleure timidement Weber sans, bien sûr, émettre un quelconque jugement de valeur – confirme la critique straussienne de la neutralité axiologique. « Si l’on parle d’un enseignement de l’importance de celui de Calvin, la simple référence aux “épigones” ou au “commun des mortels” implique un jugement de valeur sur l’interprétation du dogme de la prédestination qu’ils ont adoptée : autrement dit, il y a de fortes chances pour que les uns comme les autres soient tombés dans l’erreur » (Leo Strauss). Ce que Weber ne dit pas, ce que sa méthode lui interdit de formuler, c’est la corruption qu’a subie la doctrine calviniste. On en revient ici à l’idée d’une interconnexion foncière entre rapport aux valeurs et jugements de valeur : choisir un phénomène, un objet d’étude, c’est encore préciser ce que cet objet a d’authentique. Weber aurait dû, soit insister sur le dévoiement de la doctrine initiale (celle de Calvin), soit affirmer que l’essence même du protestantisme se love de ses manifestations tardives. La réserve straussienne n’enlève cependant rien au lien établi entre une certaine interprétation de la prédestination et le développement du capitalisme. Cette critique, à elle seule, n’ébranle pas le fond de l’argumentation. Mais Weber ne va pas au fond des choses.


La réforme se situe donc à l’origine d’un processus de rationalisation mais aussi d’embourgeoisement. La rationalisation roule sur un « désenchantement du monde » que suggère, dans l’éthique protestante, l’élimination des moyens offerts par les sacrements dans la quête de salut, c’est-à-dire par la purge du surnaturel, de la magie, que faisait intervenir une certaine culture de la rédemption. L’embourgeoisement suppose l’enrichissement ainsi qu’un goût accru pour l’utilité dans le travail et l’acquisition des biens. Nous assistons à la naissance du pâle confort bourgeois enroulé dans sa bonne conscience. La sécularisation fera le reste : « L’ardeur de la quête du royaume de Dieu commençait à se diluer graduellement dans la froide vertu professionnelle ; la racine religieuse dépérissait, cédant la place à la sécularisation utilitaire. »


Laissons, pour conclure, Weber se résumer : « L’ascétisme protestant, agissant à l’intérieur du monde, s’opposa avec une grande efficacité à la jouissance spontanée des richesse et freina la consommation, notamment celle des objets de luxe. En revanche, il eut pour effet psychologique de débarrasser des inhibitions de l’éthique traditionaliste le désir d’acquérir. Il a rompu les chaînes [qui entravaient] pareille tendance à acquérir, non seulement en la légalisant, mais aussi, comme nous l’avons exposé, en la considérant comme directement voulue par Dieu. ».


Il ajoute également " Pourquoi le capitalisme est-il né en Europe et non pas en Chine, pourtant civilisation de marchands ? Dans L'Éthique protestante et l'esprit du capitalisme, Max Weber propose de comprendre l'organisation capitaliste de l'économie à partir de l'analyse de ses éléments déterminants. Parmi ceux-ci, les motivations psychologiques ont constitué un facteur essentiel du triomphe du capitalisme moderne. Les convictions religieuses issues du luthéranisme et du calvinisme se sont en effet révélées un puissant levier pour la recherche rationnelle du profit. En valorisant des comportements tels que l'ascèse ou la productivité, elles ont promu un mode de vie favorable à l'essor du capitalisme. De même, le dogme de la prédestination, qui fait de la réussite temporelle le signe d'une élection divine, a, sans conteste, contribué à faire du travail et de l'enrichissement de nouvelles valeurs morales sans lesquelles l'économie de marché n'aurait pu s'installer durablement en Europe. ".


Sur ce, portez vous bien, jeunes gens ! Lisez ce livre, et peut-être serez-vous troublé sur ce mouvement, dont nos médias raffolent aujourd'hui. Ce livre doit beaucoup à Werner Sombart, Max Weber le reconnaissait lui-même. Tcho. Ne vous enlisez pas, dans des schémas de pensées arrêtées, et qui vous protègent, malgré tout ! Laissez votre cerveau ( cet être fragile, et sans défense ) respirer ! @+.

ClementLeroy
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Créée

le 6 mars 2017

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San  Bardamu

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le 6 mars 2017

9 j'aime

L'Éthique protestante et l'esprit du capitalisme
Rubedo
8

Et plein d'autres analyses stylées sur le comportement de ta famille.

"L'une des composantes majeures de l'esprit capitaliste moderne, et pas seulement de ce dernier, mais aussi de la civilisation moderne, à savoir la conduite rationnelle de la vie fondée sur l'idée de...

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