Ce premier texte que je lis de David Vann, magnifiquement traduit par Laura Derajinski, m'a totalement conquis. Nous sommes sur une réécriture en roman du mythe de Médée, qui s'étend du moment où elle tue son frère jusqu'à l'infanticide final. Et contrairement à d'autres versions ici il n'est pas question de l'histoire d'amour avec Jason, il n'est pas question d'une femme brisée par un homme qui s'est servi d'elle, elle la sorcière toute puissante, prêtresse de Nout et d'Hécate. Non, ici nous sommes sur une femme qui ne veut pas être une esclave, une femme qui veut se libérer... Se libérer de son père, de son geôlier, de son mari infidèle...
On suit une quête d'émancipation, quête qui fera couler le sang de tous ceux qui s'opposeront à sa liberté... et dans des conditions monstrueuses. Médée n'hésite pas à verser le sang le pour arriver à ses fins.
Et ce qui marque dans ce roman, c'est la beauté de la langue, le sens de la formule pour réussir à faire ressentir au lecteur cette histoire, l'état d'esprit de Médée... Tout est centré sur elle, on voit le monde à travers elle.
D'une certaine façon ça m'a rappelé la pièce de Jean-René Lemoine, sur la liberté de ton et la rage du personnage... entraînant la mort de quiconque se mettrait sur sa route.
Mon seul reprocherait serait éventuellement que la fuite est un peu longue, l'errance avant de retrouver voir Pélias. Ce n'est pas chiant, il y a des choses belles et justes, notamment sur les femmes qui attendent les soldats qui ne rentreront pas... Mais j'avais une certaine impatience qu'on passe à la suite des hostilités.