La mouche

Je n'avais jamais lu de Kafka avant de lire la métamorphose. J'avais bien vu le Procès (et adoré) d'Orson Welles et j'avais lu des auteurs tels que Bataille ou Camus en parler, mais je n'y avais pas prêter outre mesure attention vu que si je savais de quoi il en retournait grosso-modo, je n'en avais jamais lu et donc ça ne me parlait pas outre mesure.

Mais là, la lecture de La métamorphose a été une claque. J'ai adoré les descriptions, la manière avec laquelle le narrateur interne épouse le point de vue du héros et y place le lecteur. Ainsi toutes les questions que l'on se pose, tous les sentiments passent par Grégor, l'homme-cafard. On sait tout, on ressent tout, on comprend tout. Kafka a réussi à rendre par ses description totalement crédible, bien qu'absurde, cette métamorphose car elle est inscrite dans un contexte social, dans une réalité tangible de son époque et par conséquent ne fait que renforcer le côté réellement troublant de celle-ci.

En effet, un élément de surnaturel n'a pas le même effet s'il est coupé de toute réalité, on pourrait croire à un texte merveilleux dans un monde imaginaire. Ici le monde, les réactions, les personnages, leurs relations, leur comportement, leurs désirs sont tous incroyablement bien décris, compris, assimilés et en adéquation avec le monde et leur statu social, ce qui rend cette métamorphose crédible et monstrueuse. On comprend l'horreur de voir le quotidien de cette famille normale basculer, on comprend l'incompréhension totale des gens, leur désarroi... Dans notre monde, on ne se transforme pas en cafard géant ou en blatte, donc on sait qu'on aurait sans doute réagit comme les personnages du bouquin.

Et donc si l'idée est saugrenue, l'exécution est juste géniale, d'une grande intelligence, bourrée de détails qui permettent de sentir toute la tristesse et l'absurdité de la situation. J'ai adoré tout le début, lorsque le fondé de pouvoir, son supérieur dans sa boîte, se pointe pour voir pourquoi il n'était pas allé travaillé, et où Grégor, notre héros pense que malgré son physique repoussant, sa voix qui se transforme tout va bien aller, qu'il va pouvoir continuer à gagner sa vie pour nourrir sa famille, que tout va s'arranger... On sent l'espoir absurde, on sent toute la détresse avec laquelle on fait tout pour se voiler la face... on sent ce que l'on se dit dans une situation inextricable et où l'on imagine des plans pour s'en sortir malgré tout... des plans bien entendu impossibles.

Bref, réussir à retranscrire ça c'était juste brillant.