De la conquête coloniale jusqu’à Standing Rock, Élise Marienstrass retrace plus de deux siècles de luttes autochtones sur le territoire qu’on appelle aujourd’hui États-Unis. Ce n’est pas seulement un ouvrage d’histoire : c’est une contre-narration précise, documentée, politique, qui déconstruit les mythes fondateurs de l’Amérique pour rendre leur centralité aux peuples autochtones de Turtle Island.
Une démonstration historique implacable :
- Le livre démystifie la figure du “bon Indien” pacifié ou folklorisé, et redonne toute sa place à la résistance organisée, politique, armée, culturelle, spirituelle.
- Il montre comment le colonialisme de peuplement américain est un processus continu, pas un événement du passé.
- Il documente les stratégies de survie et d’opposition des nations autochtones : traités trahis, écoles de rééducation, spoliation territoriale, criminalisation des langues, mais aussi renouveau militant, alliances intertribales et mouvements transnationaux.
Un récit qui parle d’histoire… mais aussi d’aujourd’hui :
Dans un monde où l’extrême droite, l’impérialisme vert et les politiques extractivistes ressurgissent de manière brutale, le livre résonne puissamment avec les résistances contemporaines :
Standing Rock, les luttes contre les pipelines, la défense des terres sacrées, la souveraineté alimentaire, les ZAD autochtones, les mouvements pour les femmes et personnes Two-Spirit disparues. Ce que Marienstrass écrit, c’est que la résistance autochtone n’est pas un chapitre : c’est un fil rouge.
Une écriture claire, précise, engagée
Sans jamais tomber dans le sensationnalisme ni la sécheresse académique, Marienstrass tisse une narration accessible, nourrie de citations, d’archives, de voix militantes et d’historiographies critiques. Elle cite autant les activistes de l’AIM (American Indian Movement) que les penseur·ses autochtones contemporains (Winona LaDuke, Roxanne Dunbar-Ortiz, Nick Estes…), pour donner la parole aux concerné·es, et ne pas reproduire le regard colonial.
Pourquoi c’est une masterclass décoloniale :
- Elle ne se contente pas de “documenter” : elle prend position, sans jamais confondre militantisme et simplification.
- Elle met en lumière la dimension systémique du colonialisme états-unien, y compris dans ses avatars modernes (écologie blanche, droit humanitaire, muséification des cultures).
- Elle relie les luttes autochtones à d’autres mouvements d’émancipation (Black Panthers, féminismes de terrain, luttes paysannes, justice climatique), sans les diluer.
En conclusion :
Un livre-clef pour toute personne engagée dans une perspective anticoloniale, anticapitaliste, intersectionnelle, et pour celleux qui veulent penser les luttes depuis les marges, les survivances, les terres. Ce n’est pas juste une leçon d’histoire :
c’est un appel à l’écoute, à la réparation, à la révolte et à l’alliance. Un texte d’utilité publique. Pour briser le mythe américain et honorer la mémoire en actes.
Mood : buffalo skull, pick-up de résistantes, sagesse ancestrale et rage actuelle
À lire avec : les livres de Nick Estes, Silvia Rivera Cusicanqui, ou les fanzines de collectifs autochtones queer
⚠️ Trigger : génocide, assimilation, violences d’État (mais racontés avec dignité et force)