Parce qu'un homme ne naît pas dans un flacon..... Vivre heureux, mais conditionné, endoctriné.....

Bonjour à tous,

Aujourd' hui, je m' attaque à un livre très célèbre, et que tout le monde devrait lire. C' est un livre, hautement terrifiant, et d' actualité.... A désespérer de notre société actuelle.....

Bref. Sinon, que dire de plus, que d' autres, sur ce livre, vraiment génial, et excellent ? :). Vous voulez savoir le plus effrayant ?

Aldous Huxley, lui-même, avait tout d'abord prédit que cette société dont il imagine le fonctionnement existerait dans une centaine d'années. Puis quelques temps après la première publication de son livre , il abaisse ce nombre d'années à quinze, gageons donc qu'aujourd'hui c'est chose faite, nous vivons dans le Meilleur des mondes!

Quelle magnifique anticipation, quelle clairvoyance et quel génie! Huxley, outre de dépasser l'imagination du chemin que pourrait suivre notre monde, apparaît comme un véritable ethnologue de notre société actuelle. Choquant, terrifiant? Oui tel est ce que nous vivons!
Le livre a été écrit en 1931, une époque où l'on voit la montée des dictatures en Italie et peu de temps avant celle de l'Allemagne. Cette époque est aussi celle de Staline au pouvoir. Donc le contexte se prêtait assez bien à la vision de ce roman.

J'ai bien aimé le côté réaliste de ce livre. L'asservissement des gens ne s'est pas fait par magie et doit constamment être travaillé pour éviter tout relâchement.

Malgré que ce livre ait presque 80 ans, il est toujours d'actualité. On n'a qu'à regardé comment les USA tentent de maintenir leur peuple dans l'ignorance pour mieux les asservir pour se rendre compte que ce n'est pas impossible que ça arrive un jour.....

Je ne vais pas revenir sur le détail, de ce classique du roman d'anticipation, largement connu et décrit dans les autres critiques. Huxley imagine un monde par dérivation des tendances de son époque, dérivation des tendances lourdes mais aussi, et c'est plus fascinant, des signaux faibles.

Il plante avec rigueur et précision le décor d'un monde conçu pour assurer le bonheur de chacun et l'équilibre social. Plus de maladie, plus de vieillesse... ces maux contre lesquels l'humanité lutte depuis des millénaires. Mais aussi plus d'art, plus de religion, plus de passion... Le bonheur n'est jamais grandiose. C'est un totalitarisme anesthésiant et stérilisant qui s'est mis en place, sous la férule consciente et cynique de quelques dirigeants. Faute de soma, le communisme qui règne depuis une dizaine d'années et le fascisme à venir n'arriveront pas à cette perfection dans l'adhésion des masses.

C'est le système de caste, des Alpha aux Gamma, qui marque le plus au premier abord le lecteur. Par contre, c'est souvent décrit en termes de manipulation génétique, ce qui est un anachronisme. Même si la théorie chromosomique de l’hérédité date de 1910, l'ADN ne sera découvert qu'en 44 et sa structure élucidée en 52. En 1932, pas de manipulation génétique à l'ordre du jour. Une relecture soigneuse des premiers chapitres montre que tout est basé sur le conditionnement physique et psychique, l'usage de produits chimiques et la division des embryons. Le vrai modèle de ce système de caste dans l'esprit d'Huxley, c'est la division du travail (taylorisme) et le travail à la chaîne (fordisme) qui triomphent aux Etats-Unis après la guerre (Les temps modernes sortiront en 1936).

Deux traits caractéristiques de cette société, souvent bien moins cités car devenus partie intégrante de notre monde moderne, m'ont frappé :
- la télévision, alors qu'elle n'était dans les années 30 qu'au stade de la diffusion expérimentale et qu'elle n'allait s'imposer qu'après la 2ème guerre mondiale. Sacré intuition d'avoir deviné qu'un jour les gens passeraient leur temps devant l'écran à regarder des matchs sportifs !
- la libéralisation de la sexualité. On n'en est évidemment pas au "Tout le monde appartient à tout le monde", mais l'idée qu'on puisse se donner de façon exclusive et définitive à un conjoint choisi est devenue chez nous une bizarrerie et la multiplicité des expériences sexuelles et des partenaires est un comportement normal.

A la lecture des autres critiques, le style semble avoir dérouté certains lecteurs. J'ai lu le roman sans problème, et en anglais en plus... Peut-être que si vous avez seulement l'habitude des romans de gare, catégorie science fiction, vous pouvez avoir un peu de mal passés les premiers chapitres (qui décrivent le monde de façon assez plate) et que les événements commencent à s'enchaîner ?

En tous cas, si vous voulez réfléchir, je vous recommande les chapitres 16 et 17, avec un extraordinaire dialogue entre d'un côté quelques "dissidents" et le "Sauvage" John et de l'autre le contrôleur Mustapha Mond. Le cynisme rationnel de Mustapha est presque convainquant, alors que John qui a eu la révélation de ce qu'est l'humanité à travers Shakespeare défend le droit à ne pas être heureux, le droit à la souffrance, le droit à la vieillesse. C'est bouleversant et ces passages constituent pour moi la clé de voûte du roman.

Dommage que la fin avec un Sauvage qui va cultiver son jardin en opposition avec la société de consommation soit un peu plate. Dommage que le besoin de revenir à une sauvagerie primaire et originelle chez les humains les plus policés soit bâclée au dernier chapitre.

L’auteur a, au fil de son livre, ingénieusement pensé les mécanismes qui pourraient nous faire basculer dans un monde sans heurts, sans maux, un monde passablement vide…
La drogue, une science infiniment puissante pour combattre la vieillesse, l’absence sensible de différence entre les individus, l’inexistence de liens affectifs, la sexualité puissamment débridée, la censure sont tant de moyens pour permettre aux élites qui dirigent ce monde d’arriver à une société méticuleusement hiérarchisée et pensée. Et ne serait-ce qu’aller à l’entrave de ces moyens implique pour chaque homme le processus d’humanisation tant redouté. Lorsque l’homme se ressent différent, il est un danger, lorsque l’homme développe le sentiment amoureux, il est nuisible, mais il est homme.

En fait, je crois qu’à la lecture de ce livre, ce n’est plus un simple constat affolant qui nous est dressé mais c’est un véritable appel à l’espoir, à la révolte, parce que même dans ce meilleur des mondes, il subsiste encore des hommes et que sur Terre même s’ils sont ou seront peu nombreux pour les années à venir, leur présence permettra de soutenir le combat d’un monde meilleur mais pas celui du meilleur des mondes.

Alors si vous vous inquiétez de la société dans laquelle vous évoluez, ce n’est pas si grave. Certes vous naviguez en territoire étranger, vous ne vous plaisez pas dans ce qui vous entoure mais vous êtes et resterez un homme. Huxley délivre un de ces messages qui vous font vivre, qui vous donnent des raisons de rester sur Terre parce qu’aujourd’hui, encore plus, nous avons tous besoin d’être homme et je crois bien que ce meilleur des mondes ne subsistera et ne s’affirmera pas si chacun délivre un message rempli de tendresse, de compréhension, d’amour et d’égalité envers son semblable.

Mais on peut également lire ce livre comme une certaine mise en garde, notamment à l’égard des émancipations que nous vivons-une sexualité libérée, une foi délaissée et des hommes qui s’affranchissent- de façon croissante ne se révèlent-elles pas être les prémisses, justement, de la chute de notre Humanité ? C’est l’une des questions fondamentales à se poser ! Quel serait notre monde si nous étions tous égaux, si chacun bénéficiait de droits communs ? Quels sont les rôles de l’Etat et de la primauté que ce dernier met en place sur les individus qu’il dirige ? Tant de questions sur notre monde et son évolution…

Je partage ainsi un extrait, qui me semble, caractériser de façon très juste l’essence même du livre. Cet extrait est issu du dialogue qui s’instaure entre le sauvage qui vient d’être arrêté et qui ne croit pas en cette société et entre un des dirigeants de ce monde, Mustapha Menier.

« -Mais je n’en veux pas du confort. Je veux Dieu, je veux de la poésie, je veux du danger véritable, je veux de la liberté, je veux de la bonté. Je veux du péché.
-En somme, dit Mustapha Menier, vous réclamez le droit d’être malheureux.
-Eh bien, soit, dit le Sauvage d’un ton de défi, je réclame le droit d’être malheureux.»

Ainsi, hommes qui lisez ces lignes, n’oubliez jamais que chaque sentiment, quel qu’il soit, s’inscrit dans la construction de votre être, que ce que vous vivez est de manière immédiate retranscrit en vous comme une expérience enrichissante. Enfin, n’oubliez pas tous les sentiments que vous cachez,enfouissez car eux aussi sont humains, et que votre humanité doit être le fer de lance de notre société pour encore de nombreuses années.

Ces quelques phrases, Huxley aurait pu simplement les écrire, mais il a été encore plus brillant en écrivant Le meilleur des mondes et je l’en remercie.

Aldous Huxley signe ici son chef d'œuvre absolu, l'œuvre qui lui donna à jamais le statut de maître littéraire.

Le roman en question décrit ce qui pourrait nous arriver : l'humain est déshumanisé, et n'est plus que partie d'un groupe, l'État. Avouez que ce principe de base est tout bonnement communiste.

Bref, passons, et sachez que je ne décrirai pas toutes les horreurs de ce récit, tant elles sont nombreuses. Mais sachez qu'elles existent. Et qu'elles pourraient nous arriver.

Enfin, bref. Le récit est écrit avec un style puissant, fort, et prenant. L'auteur nous emmène dans ce meilleur des mondes, dans cette démocratie qui n'en est pas une.

J'ai beaucoup apprécié " Le meilleur des mondes". C'est du grand art au niveau de l'anticipation, ça porte à l'extrême des raisonnements que nous rencontrons actuellement...

Ce bouquin m'a énormément rappelé 1984 de Georges Orwell, sans pour autant atteindre le niveau de ce dernier. Après la lecture de 1984, c'est une véritable conscience politique qui est né en moi. Si l'ouvrage de Huxley a eu quelques échos semblables, il n'atteint en définitive pas l'incroyable sentiment d'ouvrir les yeux sur le monde que j'ai ressenti après 1984.

D'avantage qu'un roman d'anticipation, je crois qu'il faut comprendre "Le meilleur des mondes " d'Aldous Huxley comme une métaphore philosophique, une contre-utopie : voici ce que sera demain si nous continuons sur cette voie! Voici ce qui poussera de ce que nous semons aujourd'hui! Héritière de l'utopie littéraire et ancètre de la science-fiction moderne, la contre-utopie est simplement une utopie négative, une projection littéraire de ce qui nous tourmente, de ce qui nous fait douter du monde et de nous-même, un avertissement aussi pour les générations présentes et futures. Et ce n'est évidemment pas une coïncidence si certains points développés dans ces oeuvres d'imagination finissent par rejoindre la réalité. Des érudits, spécialistes du genre, ont dégagé depuis longtemps ce fait troublant : non seulement de nombreux événements, inventions ou situations anticipés dans ce type de littérature finissent par se concrétiser avec le temps, mais ils se concrétisent toujours beaucoup plus vite et brutalement que ne le prévoyait l'auteur de la fiction. Ceci dit, maintenant qu'on le sait....

Alors, si pour certains d'entre vous, "le meilleur des mondes" ne fut pas qu'un livre de SF, d'anticipation, mais fut avant tout un essai "politique" ...plonger sur 1984 !!.....

Sur ce, portez vous bien. Lisez " le meilleur des mondes ", et enchainez avec " Retour au meilleur des mondes ". Vous verrz, comme tout change.... Tcho. Merci Huxley, pour ce livre.... @ +.
ClementLeroy
9
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Créée

le 19 mars 2015

Critique lue 3.4K fois

2 j'aime

San  Bardamu

Écrit par

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