Le Parfum
7.8
Le Parfum

livre de Patrick Süskind (1985)

J'ai lu ce livre sous recommandation de certains proches qui le décrivait comme assez spécial. Il est vrai que le rythme s'avère assez lent et ou les descriptions sont particulièrement allongées. Il n'en demeure pas moins que l'idée principale est ingénieuse et qu'on ne peut absolument pas décrire un parfum ou une odeur sans illustrer sa composition à l'aide d'éffluves ou de notes choisies olfactivement ( !). Ficelé autour du nez parfait, on se surprend à prendre conscience de notre odorat suivant la lecture de ce classique. Sans spoiler, disons que la finale est " originale" ainsi que le développement du personnage principal. Passant d'apprenti à quelque chose de beaucoup plus " extravagant".


Mais, j'ai une théorie sur le monde olfactif qui implique une mise à jour globale puisque depuis la parution de ce livre, les temps ont changé. Pour faire l'exercice, on va d'abord se rapporter aux temps plus anciens, celui où le feu est apparu. Souvent, lorsque l'hiver arrive et nous frappe d'une vague de froid, le nez se met à couler et fini parfois par se bloquer. Or, quand le nez se bloque et nous empêche de respirer convenablement, une fatigue s'installe précédée par des baillements. De nos jours, petits êtres fragiles, on va chercher une couverture, on se rince le nez et on se mouche. Cependant, lorsque l'homme était dit sauvage, on n'avait pas le temps de s'auto évaluer pour savoir ce qui se passait. On endurait le symptôme, mieux encore, on se fiait à notre odorat pour traquer les bêtes. Le soir venu, on se faisait un feu et ainsi, le nez reprenait son rôle. La sexualité, certes plus rude, avait cet avantage qu'elle était naturel. On se basait sans doute sur les phéromones. À la limite, on se reniflait comme des bêtes. Pas de bain quotidien non plus. Ce qui implique des odeurs carrément plus forte. Pourtant, nous sommes rendu 9 milliards sur la planète. Il faut croire qu'en ces temps, la formule fonctionnait tout de même et que la reproduction à fait son œuvre. Du coup, on ne se demandait pas si le partenaire avait beaucoup d'argent. On se fiait à sa capacité de chasser pour l'homme et de nidifier pour la femme. Du moment que nos odeurs respectives ( phéromones) demeuraient compatibles.


Maintenant, revenons en l'an 2025 pour se situer et voir l'évolution ( régression) de l'aspect olfactif dans nos vies. Premièrement, depuis l'avènement des parfums, déodorants, désinfectants, l'être humain a logiquement été aseptisé. Son odeur personnelle est devenue une préférence envers une marque déposée qui, a coup de pub, promet de se taper la plus belle des princesses. Ensuite, les sources de polluants externes sont légions et durablement figés dans le temps. Climatisation en été, chauffage en hiver, pas seulement à la maison mais en voiture. Sans parler du trafic quotidien. La voiture d'en avant crache sa merde à travers le système antipollution. Cette merde s'en va directement dans le système d'aération du véhicule en arrière, dans l'habitacle, dans le nez. Lentement mais sûrement, on s'est bloqué les nasaux sans même s'en rendre compte. Ce qui demeure perceptible à l'odorat reste, à mon avis, les odeurs acquises. La bouffe, l'essence, les parfums, etc...


Puis, il suffit de marcher dans un lieu public afin de comprendre quel sens à prit le dessus. La vue. On peut à peine voir les yeux des gens tellement ils ont les yeux rivés sur leurs écrans. La rencontre entre deux partenaires ne débute plus au travail ou dans un bar. De plus en plus, on se base sur les sites de rencontres et autres plateformes. Non seulement l'odorat disparaît mais le toucher s'amenuise, l'ouïe appartient aux babioles électroniques. Éventuellement, on rencontre l'autre puis la séparation arrivera en quelques mois sinon quelques années. La théorie...


Celui qu'on surnommait sauvage n'avait nullement le temps de magasiner un petit sapin pour sa grotte. Entre la chasse qu'il devait faire et la protection de son clan ( on suppose des attaques animales périodiques), il vivait sa vie " naturellement" . La chasse se sert d'ailleurs des odeurs pour attirer les proies et le chasseur demeure dans cette optique afin de ne pas être repéré. Nous, citoyens honorables que nous sommes, privilégions l'apparence plutôt que le naturel. On a donc perdu l'odorat. La femme sent maintenant la vanille et l'homme a fait un virage vers la fragrance sportive. Pourtant, le sport réel offre la plus grande part de phéromones. On pourrait donc comprendre que les sportifs professionnels ont cet atouts physiques et monétaires bien entendu. Ils dégagent plus de phéromones. Pour mettre en image les propos actuels, on pourrait dire que les gens ne peuvent plus se sentir...


Il est certain que les odeurs corporelles sont, à divers niveaux, âcres et désagréables. Il n'est pas question de celles-ci présentement. Plutôt, notre odeur personnelle et caractéristique de notre bagage respectif ( peau, glandes, physionomie...). Se rapprochant ainsi un peu plus des animaux ( ce que l'être humain fuit, race supérieure oblige) on serait en mesure de ressentir une connexion complète plutôt que partielle et surtout centré sur l'apparence. Les corps pourraient se correspondre chimiquement et non visuellement. Néanmoins, l'évolution en a décidé autrement et cherche la facilité. L'effort disparaît et emporté avec lui les milliers de parfums qui se propagent un peu partout en créant des attirances biologiques et non filtrés. Car même si tu es belle ou beau, si je ne peux pas te sentir, te pifer, la relation s'arrête automatiquement pour moi.


Par moment, il faudrait revenir à la base pour perdurer convenablement. A force de troquer le peu d'animalité ( mammifère )qui subsiste en nous pour se la péter supérieur, on en perd paradoxalement notre humanité. Ce qui, a plus ou moins long terme, aura un parfum d'extinction de notre espèce...

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il y a 3 jours

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Johnny B

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