Bouleversant. Oui bouleversant, il est difficile de trouver un autre qualificatif que celui-là et la quatrième de couverture de l'édition de poche semble coincée dans la même sécheresse de vocabulaire. Un roman avec la guerre comme contexte, forcément il y avait là un terrain fertile. Ajouté à cela le parallèle avec Antigone et le Liban comme décor, c'est le terreau immanquable.


L'histoire est découpée en trois temps. Le chapitre d'introduction, l'attaque du taxi qui nous fait entrer immédiatement dans la violence du roman et de la guerre. C'est court mais c'est efficace, le contexte nous échappe mais la suite nous promet de ne pas nous laisser sur le carreau de nos émotions. Suit la jeunesse militante de Georges, le héros, sa rencontre avec Sam le grec juif et sa femme Aurore. Georges est un militant maoïste parisien 70's de la Sorbonne, révolutionnaire dans sa recherche violente du conflit qui l'accompagne autant dans ses engagements que dans ses relations sociales. La trame chronologique saute d'un souvenir à l'autre, sans réelle logique, nous apprenons doucement à connaître notre héros au "coeur de trop".


Puis vient le temps de la guerre après celui de la révolte. Bien réelle cette fois et au Proche-Orient. Georges et sa violence se retrouvent dans un conflit encore plus violent que lui, loin de ce qu'il pouvait candidement imaginer. Entre son effort difficile pour réunir les adversaires sous le pacifique voile du théâtre et la réalité d'un conflit qui déchire Beyrouth en plusieurs communautés, la pression ne nous relâche jamais réellement. Les évènements tragiques de la guerre civile libanaise, au début des années 1980, rythment la trame narrative, prennent à la gorge et nous claque à la figure avec toute la violence attendue, avant même que les bons sentiments puissent tenter de prendre, ne serait-ce qu'un peu, le dessus.


Je ne suis pas ressorti indemne de cette lecture. Elle m'interroge sur la guerre au Liban des années 1980, déjà lointaine et que je ne connais donc que relativement peu. Quelques articles et vidéos sur internet pour mettre des images concrètes sur les évènements retranscrits dans le roman finissent de combler mon émoi. Elle m'interroge également sur le rapport de l'homme à la guerre et à sa brutalisation inévitable comme elle fut inévitable pour Georges. Elle m'interroge sur beaucoup de choses car elle touche au coeur comme rarement. Bref, une lecture bouleversante.

BenoitBarbibul
10
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes Les livres qui se lisent d'une traite et Les meilleurs livres de 2013

Créée

le 6 déc. 2018

Critique lue 121 fois

Benoit Barbibul

Écrit par

Critique lue 121 fois

D'autres avis sur Le Quatrième Mur

Le Quatrième Mur
BibliOrnitho
9

Critique de Le Quatrième Mur par BibliOrnitho

Le quatrième mur : Une façade imaginaire, que les artistes construisent en bord de scène pour renforcer l’illusion. Une muraille qui protège leur personnage. Pour certains, un remède contre le trac...

le 8 oct. 2013

24 j'aime

4

Le Quatrième Mur
Miharuchan
10

"J'ai eu peur de mourir sans jamais pleurer."

Comme Georges, je n'ai pas pleuré, malgré l'horreur que je m'imaginais, les mots qui s'entrechoquaient, je n'ai pas pleuré. Je n'y parvenais pas, je n'étais qu'un bloc de glace, hors de mon corps,...

le 23 déc. 2013

20 j'aime

4

Le Quatrième Mur
amarie
10

Un mur de larmes

Un livre pour dénonce la guerre et ses atrocités. Un livre pour des victimes innocentes, pour des civils tués, pour des enfants massacrés gratuitement au nom de la cruauté des hommes. Un hymne pour...

le 13 déc. 2013

18 j'aime

7

Du même critique

Tu ne tueras point
BenoitBarbibul
3

Jésus part (encore) en guerre

Sachant que j'allais voir une oeuvre de Mel Gibson, je ne m'attendais pas franchement à de la prose marxiste. Franchement pas! Mais à la sortie du cinéma, je me suis rendu compte que j'étais encore...

le 4 déc. 2016

5 j'aime

3

Le Lambeau
BenoitBarbibul
9

Au-delà de la littérature...

Il y aurait tant à dire sur Le Lambeau, son sujet, sa construction, sa prose, son rapport à la réalité... Car Le Lambeau est un livre complet, incroyablement précis et dense, particulièrement...

le 24 mars 2019

4 j'aime

Les Oubliés
BenoitBarbibul
7

Un bijou esthétique assez touchant

Venu le moment du générique de fin de Under sandet, deux choses surprennent et frappent. La première est qu'il est tout de même étonnant que l'on puisse, encore aujourd'hui, découvrir de telles...

le 19 janv. 2016

4 j'aime