Mise en scène de Guy-Pierre Couleau
Je critiquerai en effet ici non seulement la pièce écrite, mais également la mise en scène que j'ai vue, qui affaiblit sûrement un peu la note que j'aurais pu donner en me contentant de la lecture.
Ma grande faiblesse a toujours été de trouver le temps long au théâtre. Je suis de ces rares personnes qui le préfèrent écrit, sans doute parce que je suis trop pressée. Et en effet, en voyant la pièce jouée, de manière très sobre par ailleurs, je n'ai pu m'empêcher de lui trouver des longueurs : au début notamment, ou encore dans l'entrevue entre la femme du Grand-Duc et Kaliayev (je soupçonne le metteur en scène d'avoir changé des noms dans sa version des Justes, Kaliayev s'appelle Janek dans sa mise en scène, si quelqu'un pouvait éclairer ma lanterne !). De plus, les acteurs portant la pièce n'étaient pas tous à armes égales : si l'actrice jouant Dora est brillante, que celui de Kaliayev est bon, les autres sont parfois peu convaincants selon les scènes.
Bien sûr, le reste est génial. La réflexion est dense, comme toujours chez Camus, c'est très beau, les dialogues sont savoureux, terribles, s'autorisent même parfois de l'humour. Ici le texte prime sur le jeu de scène, et ça n'en est pas moins captivant pour autant. On ne reste pas neutre, on est réellement engagé dans le débat. Je ne suis pas réellement pro-art engagé ; mais quand le débat est plus important que la réponse, quand l'art se fait théâtre (dans tous les sens du terme) philosophique, quand les deux camps se prennent des beignes, que tout le monde a raison et que tout le monde a tort, je ne peux que cautionner. Ce n'est plus du dogmatisme mais de l'éducation intellectuelle.
Aussi j'aime les pièces de Camus, celles de Sartre aussi, bien que je ne partage pas leurs idées. C'est, à mon sens, de plus haut niveau que leur philosophie à proprement parler, même si je ne suis certainement pas assez calée pour vous faire une étude développée là-dessus.
A lire, donc, ou à voir si vous en avez l'occasion. J'ai vu le DVD de la pièce, ma foi c'est très bien fait ces bêtes-là.