Une mère s’en va, sans valise, sans fracas. Elle laisse une casserole de pâtes et un mot.

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Il y a des livres qui ne crient pas, qui ne s’imposent pas, mais qui avancent dans votre poitrine comme un souvenir qu’on croyait réglé.

Quatre jours sans ma mère fait partie de ceux-là.

Tout commence par une absence. Une femme s’en va, sans valise, sans fracas. Elle laisse une casserole de pâtes et un mot, écrit à la hâte : « Je dois partir, vraiment. »

Et soudain, tout s’effondre.


Ramsès Kéfi écrit la disparition d’Amani comme un séisme feutré. Pas de drame spectaculaire, pas de police ni de flashs. Seulement le silence, les gestes qui ne savent plus à qui s’adresser, les repas qu’on prépare sans appétit, les couloirs de l’appartement où le vide fait écho. Le fils, Salmane, erre dans ce manque comme dans une ville fantôme. Il cherche une mère, mais il finit par se chercher lui-même.


Il y a dans ce roman quelque chose d’une lumière d’hiver : une clarté douce, mais qui ne réchauffe pas. Chaque chapitre s’allume comme un néon dans la mémoire — les souvenirs d’enfance, les traces d’exil, les colères rentrées du père, les rêves qu’on n’a pas osé nommer. Ce n’est pas seulement un livre sur une disparition, c’est une fouille archéologique du lien filial. On y sent la fatigue des mères, la pudeur des hommes, et cette tendresse qui ne sait pas dire son nom.


L’écriture de Kéfi, précise, presque pudique, a la douceur rugueuse des voix populaires. On y entend le PMU du quartier, les murs qui sentent la lessive, les nuits à fumer sur un balcon qui donne sur rien. Chaque phrase semble déposée avec soin, comme une offrande à ces existences modestes qu’on ne regarde plus. Il y a du respect, beaucoup d’amour, et cette lucidité sans plainte qui rend les pages si humaines.


Le roman avance lentement, à hauteur d’homme. Pas d’effet, pas de posture. On pense parfois à Annie Ernaux pour la sincérité, à Faïza Guène pour le rythme du quotidien, à Laurent Mauvignier pour cette manière d’habiter le silence. Quatre jours sans ma mère n’a pas besoin de grands mots : il dit simplement la vérité des vies bancales, la beauté fragile des présences.


À la fin, on comprend que la mère ne s’est pas enfuie. Elle s’est simplement donné le droit de respirer, de se retrouver. Et c’est peut-être cela, la plus belle leçon du roman : partir pour se revoir, pour se redonner au monde autrement.


Un livre qui ne cherche pas à vous séduire, mais qui finit par vous habiter. Longtemps.

Note : 14 / 20


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Le-General
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