Cruauté crue

C'est un livre cruel parce que beaucoup trop plausible. Nous savons bien qu'il y a en nous (depuis l'enfance !) la possibilité de devenir des "sauvages", c'est-à-dire des personnes qui n'écoutent plus que leur instinct grégaire, dans l'irrésistible confort d'être protégé, d'être ensemble contre un ennemi commun, qu'il soit la faim, la soif, la peur ou celui qui est différent. Se regarder aussi crûment en face est difficile et la variété de personnages permet de saisir que personne n'est épargné par les choix qu'il a à faire. Pas d'échappatoire. La vie en commun est une île.

De mon point de vue, Sa Majesté des Mouches est un livre qui dégage un profond malaise, de façon brillante : l'atmosphère est étouffante à souhait et l'évolution de l'histoire, vers sa fin violente et inéluctable, est vraiment horrible. Les descriptions sanglantes sont bien efficaces... Certains personnages touchants dans leur détresse qui se développe peu à peu.

Par contre je pense que la traduction ou la narration a des petits ratés, je ne sais pas mais il y a pas mal de fois où j'étais un peu perdue dans la description des lieux, je n'arrivais pas à bien me situer, ou à savoir qui parlait. Il y aussi cette façon un peu étrange pour le narrateur d'analyser le comportement des personnages après leur avoir fait dire ou faire quelque chose. Ca fait assez didactique mais ça marche assez bien et ça repose un peu entre deux scènes difficiles.

Bref, ce n'est pas devenu un classique pour rien, mais il faut quand même avoir le cœur solide pour l'affronter.