L'un de nous dans cette pièce est en fait le meurtrier.

L'on peut ne pas connaître l'histoire, mais le conte est lui un classique qui résonne dans le cerveau de chacun s'intéressant à la littérature. Dix individus se rassemblent dans un même lieu, sans aucun lien ne les unissant entre eux. Un seul rapport les rapprochant, énoncé par un mystérieux enregistrement. Ils sont tous coupables d'avoir commis le pêché du meurtre sur une personne innocente.


Ici, pas d'Hercule Poirot pour mener l'affaire, ce personnage étant surement à la base des meilleurs mystères au sein des nombreux écrits de l'ingénieuse Agatha Christie. Mais même sans le redoutable détective, la série offre néanmoins un véritable mystère qui plane dès les premières secondes, et cela, jusqu'à la révélation finale. Face à une série de meurtres toujours plus croissante, l'évidence même veut que l'une des personnes présentes soit l'auteur de ces actes abominables. Mais quand tout le monde semble aussi soupçonnable les uns que les autres, comment réagir et comment résoudre une telle enquête ? Clairement, l'héritage de Christie est bel et bien présent malgré une tournure très différente, laissant apparaître ce sentiment de puzzle meurtrier à grandes échelle si propre à l'œuvre originale.


Mélange de vétérans et de visages plus récent, l'ensemble du casting n'en reste pas moins assez impressionnant de par son potentiel et son pedigree dans le monde du petit écran britannique. Car plus que les noms en eux-mêmes, c'est véritablement l'alchimie de l'ensemble de ce casting qui rend le tout réussi, permettant une identification aisée a chacun des protagonistes couvrant ce mystère. Ainsi, Charles Dance et Miranda Richardson viennent donner la réplique à Sam Neil ou encore Toby Stephens, prenant tous a merveille les traits d'un des dix personnages présents dans cet enfer. Je tiens néanmoins à attribuer une mention spéciale à Maeve Dermody que j'ai trouvée absolument saisissante, presque véritablement hanté par son personnage de Vera Claythorne tout en parvenant à apporter cette touche de sensibilité féminine au sein d'un groupe majoritairement masculin.


Le mot enfer n'est d'ailleurs pas usé de ma part au hasard et reflète un parti-pris de la part de l'équipe créative derrière les caméras de rendre l'œuvre originale beaucoup plus sombre et clairement à l'opposé de la version de l'auteur original. C'est Sarah Phelps qui officie sur ce projet et offre cette vision noire d'une œuvre s'étant vendue à des millions d'exemplaires a travers le monde et les âges. Le contraste est saisissant, offrant immédiatement un sentiment de malaise alors que les personnages principaux découvrent l'île et la location où ils vont séjourner. L'ensemble est réellement dépeint comme si le monde s'apprêtait à faire payer lui-même les crimes de ces personnes présentes et l'ensemble rend magnifiquement service à l'œuvre et au choix artistique. Et comme un murmure de leur tombe se rapprochant indubitablement, le travail sonore crée un réel sentiment de film d'horreur.


Et comme les personnages sont tous foncièrement différent, appartenant à des classes et des mondes différents, il ne faut que très peu de temps pour que la psychose s'installe et que le sentiment d'effroi s'emparant peu à peu d'eux offre un réel intérêt à l'ensemble de cette histoire sous fond de mystère à la Hitchcock. Car à travers le sort des personnages qui vivent une véritable épreuve psychologique capable de faire fondre même le plus solide d'entre nous sur le plan mental, And Then There Were None parvient comme son illustre aîné à offrir un vrai travail sur le sentiment de culpabilité, mais aussi des limites de la justice entraînant un besoin d'auto-jugement parfois radical a un point difficilement imaginable.


Bien que déjà sombre lors de la parution de l'original, cette adaptation pousse le vice encore plus loin, se rapprochant presque plus du polar noir que du classique genre policier mystérieux. Durant trois épisodes, les fantômes passés des personnages nous intriguent et la solution de ce trouble dans l'isolement le plus total nous tient en haleine du début à la fin. Plus qu'une simple adaptation, And Then There Were None est une réécriture sous un autre angle des plus réussis tout en respectant l'œuvre d'Agatha Christie. Dans la veine de Dexter ou Bates Motel aux Etats-Unis, And Then There Were None s'offre un univers sombre qui devrait plaire à tous les fans du genre.

GregGS
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le 30 août 2016

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GregGS

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