Beaucoup d'excès, parfois jouissifs, parfois poussifs, avec certains dialogues jubilatoires, quelques clichés et pas toujours de fond mais du divertissement. Les auteurs usent du thriller et du fantastique, pour une revisite du genre horrifique, entre nostalgie des contes enfantins et terreurs du quotidien. Mais comme souvent une dénonciation de notre société et de la nature humaine, avec les thèmes chers à Murphy. Le droit à la différence, le droit des femmes et pour nourrir ses intrigues, le pouvoir, l'individualisme, l'exclusion, la politique et les médias et bien sûr toute sorte de fantasmes notamment sexuels. Que de thèmes réjouissants donc, déclinés à travers toutes les saisons, bien souvent en huis clos et sous divers décors, certains plus propices que d'autres à créer l'angoisse et où l'horreur n'est pas toujours là où on l'attend. Une histoire à chaque saison, et où chacune en rejoint une autre par leurs personnages et/ou leurs destinées boucle la boucle.
La déception de certaines saisons vient aussi de ce qui en fait leur réussite par ses multiples déclinaisons, retournements et scénarios multi-directionnels. Les caractérisations souvent identiques et les évolutions abrupts de personnages, voulus complexes, partagés entre l'empathie et la férocité, amènent bien souvent à une redite.
Mais une fois accepté, la série est addictive, et chaque saison se sort de ses moments de flottements par leurs rebondissements parfois étonnants.
Ryan Murphy est un créateur prolifique dans le monde des séries et garde un œil sur ses acteurs. American Crime Story où l'on retrouvait déjà Sarah Paulson, et Cuba Gooding junior ; Feud, pour Jessica Lange, dernièrement Pose pour Evan Peters et Matt Bomer dans le film The normal heart. Quelques rôles pour les amateurs de Zachary Quinto, Lady Gaga, Chloé Sevigny, Taissa Farmiga, Emma Roberts, Dylan McDermott, Connie Britton...avec plus ou moins de réussite.
L'occasion en tout cas pour certains d'interpréter plusieurs rôles et parfois même au sein de la même saison. On s'y fait même si peut-être Sarah Paulson aurait gagnée à être moins présente et finit par lasser. On pourra au fil des saisons apprécier -ou pas- sa grande propension aux hurlements.
Jessica Lange est indéniablement le coup de cœur de Ryan Murphy, constamment fatale -et définitivement alcoolique- à la haine pugnace. Evan Peters le mieux à même de tirer profit du théâtre, même si le rôle de l'amoureux transi semble être une fatalité.
On retrouve aussi Kathy Bates et ses personnages inquiétants voire monstrueux, mais qui rappelleront trop souvent à son rôle dans le film Misery.
Mais le plaisir de voir certains acteurs trop absents, Denis O'Hare, Angela Bassett, et surtout Frances Conroy et sa capacité à prendre sa place, au milieu de tout ce fatras, toujours excellente et qui apporte un joyeux réconfort dans la plupart de ses interventions, tout autant décalées qu'inspirées.
https://youtu.be/Ha_tYRmcXaU
Malgré la surenchère, la mise en scène recèle ses petits trésors d'inventivité et d'ambiance rappelant aux films d'horreur entre folie et mysticisme, humour noir et gore sans complexe. La parfaite maîtrise d'une narration à la réalité tronquée, des changements de temporalité par les multiples flashbacks, signature récurrente des saisons, assurent une perte de repères bienvenue et un certain suspense, et permet de passer sur les longueurs récurrentes. Des jeux de caméra pour une esthétique cadrée, et des jeux de lumière pour une belle perception des événements et du ressenti par l'image. L'ensemble vaut en particulier par ses décors, ses changements de luminosité, ses perspectives de prises de vues et ses clins d'œil historiques et cinématographiques. Malgré le délire de ses intrigues et ses rebondissements à n'en plus finir, parfois jusqu'à l'overdose, ses dérives de la religion, ses expérimentations et tortures en tout genre, ses interventions démoniaques, vampires et extra terrestres aux volontés plutôt floues, les amours avortés et autres combats de sorcières... la surenchère n'empêche pas une créativité débridée. Et comme souvent dans le style Murphy, ses interludes musicaux pour quelques moments de décalage et d'effervescence vivants et colorés.
https://youtu.be/m2qEhGeLb6A
Difficile alors d'adhérer complètement tant les personnages accessoires viennent régulièrement polluer la série. Mais difficile aussi de ne pas être percuté par ce fourmillement d'idées et cette revisite du genre melting-potée. C'est bien là toute la réussite de l'écriture foisonnante et hors les clous des auteurs.