Tandis que tous les pays dotés du nucléaire enfouissent gaiement leurs déchets sous le tapis avec la certitude d'être à l'abri pour toutes les demi-vies possibles, j'ai un peu flippé devant le 1er épisode.
Allait-on assister au procès du régime soviétique alors que 25 ans après Tchernobyl, la Terre rappelait via une catastrophe de même ampleur que l'on est bien peu de choses à l'une de ses nations rompue à la fission et néanmoins non-soviétique.
Et bien non, ou pas tant. Enfin, il paraît que le site se trouve envahi de touristes depuis le succès de cette mini-série, donc le message n'est peut-être pas clair en fait. Ou peut-être n'est-il pas clair qu'il y a un message, malgré une indéniable efficacité.
Tout dans cette série est absolument parfait d'intense sobriété, de l'ambiance sonore à la photographie fidèle jusqu'au choix de Jared Harris en tête de proue. Mais ce qui la fait réellement entrer dans l'histoire est l'art cinématographique avec lequel elle rend palpables les forces menaçantes de la nature. Car comme l'on nous l'explique d'habile façon au dernier épisode, l'erreur humaine de quelques troufions ne suffit pas à mener à la catastrophe. Certes, il y a la négligence, l'égoïsme, la fierté doublée de rapacité de décideurs ignorants, mais c'est finalement la présomption qui nous mène droit au mur, celle de croire que l'on est maître des éléments comme on l'est du discours, du mythe.
A l'inverse de la peur ancestrale de l'homme face à la nature, la peur est ici du côté de ceux qui savent. Les flammes bleues et les flocons de cendre sont magnifiques, envoûtants ; le vent dans les feuilles est poétique, mais il nous fait frémir de trouille parce que l'on sait.
Encore aujourd'hui le principe de précaution ne pèse pas bien lourd face à la sacro-sainte économie, un mythe au pragmatisme inversement proportionnel à ce qu'il prétend. On peut se réjouir de l'abolition récente de cette fameuse peur ancestrale de la nature dans notre histoire, c'était une peur primitive d'enfant. L'ennui c'est qu'elle n'a fait place au mieux qu'au "respect", un respect dont se fout éperdument la Terre, déjà plus de mille fois bombardée d'atomes. De notre science ce n'est pas de la peur qui devrait émerger mais de la modestie, et de l'amour, pourquoi pas, face à sa complexité et sa beauté. Aussi étrange que cela paraisse, c'est cette leçon là que je retiens d'une série aussi plombante.