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Orange is the New Black a eu le génie de répondre à une demande encore non pourvue, celle de traiter du carcéral au féminin. Centrée sur le personnage d'une jeune femme des beaux quartiers au milieu d'autres beaucoup plus défavorisés qu'elle, la série est pourtant chorale et a le mérite de dresser des portraits variés de détenues américaines.Entre trafics, bassesses quotidiennes des matons et pesanteur de la coercition, il y a des petits moments sympathiques qui prouvent toute la tonalité du programme qui refuse la noirceur et le misérabilisme total. Cela donne envie d'aller plus loin pour sûr.
La fin de la saison 1 ménage bien les enjeux dramatiques de la série entre prison et extérieur. La scène de pétage de plomb le jour de Noël est le moment idéal pour passer à autre chose.


Saison 2
Le premier épisode brouille les pistes et le spectateur est aussi déboussolé que Chapman qui se retrouve déplacée. La raison bien précise découverte plus tard est pourtant un passage obligé pour un détenu. La série de flashbacks sur Piper adolescente avec sa mère (tentant de lui dire que son père a une maîtresse) se télescopant avec la scène de parloir avec son avocat (qui est aussi le père de Larry,son copain) montrent l'incompréhension d'adultes se contentant de leurs postures d'autorité. Entre le " tu es allé au cinéma sans ma permission" et "il faut dire la vérité au tribunal", la tonalité est la même et l'écoute biaisée. Concentrés d'extrême solitude aussi effroyables que ceux des centres de rétention. L'épisode 2, sans la moindre présence de Chapman, est aussi surprenant (il faut le temps qu'elle revienne de Chicago) mais permet de retrouver les autres détenues. La série repart trés bien en tous cas. Plus tard, la confrontation tant attendue entre Piper et Larry marquera un nouveau départ. Voir la jeune femme s'impliquer dans la vie de la prison et de ses co-détenues prouve qu'elle s'est délesté de ce superflu qui la minait. La série a trouvé maintenant une bonne dynamique, sûrement parce que le personnage d'Alex et les procédures de justice sont en retrait pour l'instant. L'épisode 9 revient sur les relations entre Red et Vee et pourquoi ils se sont dégradés. Le rapport de force n'est pas celui que l'on imaginait et on comprend beaucoup mieux la tension entre les deux femmes.
Vu la densité des événements, la durée inédite de l'épisode 13 (1h27) n'est pas excessive.Les rapports de force entre Caputo et Figeroa, ceux entre les détenues suite à l'agression de Red, mais aussi la nouvelle position de Chapman face au couple Polly/Larry et à Alex font finir la saison en beauté.


Saison 3
Après deux épisodes un peu poussifs sur la fête des mères et les punaises de lit, c'est finalement l'épisode 3 qui relance la dynamique de la série. La scène du cours de théâtre entre Alex et Piper ainsi que le funeste sort de Nicky figurent parmi ses grands moments. L'épisode 7 oscille entre réalisme et irréalisme. Autant on se réjouit de voir Piper Chapman se démener pour une combine autour de sous-vêtements, autant l'histoire de Norma ( la détenue muette) est digne d'un story-telling hasardeux. Faire télescoper son passé "flower power" avec une inclinaison de guérisseuse pour les autres détenues est juste dingue et incohérent. Beaucoup de matière dans les épisodes 8 à 11 entre les écrits pornographiques de Warren qui galvanisent les détenues, l'histoire de Léanne mettant en lumière son attachement à la croyance et à la communauté, les désillusions de Dogett face à son rapprochement avec un nouveau gardien et le passé/présent de Caputo. En effet, sa dévotion particulière aux gens dans la vie lui a joué certains tours et il le constate encore aujourd'hui avec ses propres employés. Le dernier épisode dépasse également une heure vingt sur cette saison. Avec une tonalité plutôt grave, le spectateur accueille avec joie la scène du "grillage" qui clôt la saison comme un bain de jouvence et permet aux détenues de retrouver leurs paix intérieures après toutes les épreuves. Chapman ne participe pas à ce moment de liesse et c'est bien dommage vu la façon dont elle a été malmenée. Son apprentissage de la détention l'amènera encore à évoluer,pas de doute!
Saison 4
L'arrivée des nouvelles détenues pendant la mini "évasion" incite Caputo à resserrer la surveillance et à adopter de nouvelles règles. Les nouveaux gardiens vont se faire des tas d'amies! On sent que la série,de par la surpopulation carcérale et le passage de la prison du public au privé (donc plus gérée comme une entreprise que comme une institution), prend un virage plus politique. C'est assez surprenant mais intéressant.
L'épisode 5 avec l'organisation d'un congrès pénitentiaire à Baltimore (le Correcticon) a une dimension parodique et loufoque. Les idées des exposants pour maintenir les budgets des prisons sont hallucinantes et prouvent que ces businessmen sont déconnectées de la réalité du terrain. L'autre intérêt réside dans la manoeuvre de Chapman pour récupérer son monopole de commerce de la petite culotte aux détenues latinos. Son entreprise la mènera à une extrémité qu'elle n'avait pas soupçonnée. Une leçon savoureuse.
Bien que l'épisode 7 célèbre le retour de Nicky de Q.H.S, c'est le portrait de Lolly, dont on découvre le trouble psychologique grâce aux flashbacks qui demeure le plus intéressant. On comprend mieux son penchant pour les théories du complot visibles dans les épisodes précédents. Les voix qu'elle entend, sa façon de se défendre font comprendre au spectateur plus sa détresse qu'une série de postures véritablement involontaires.
Après des épisodes assez secondaires, le numéro 11 est marqué par une certaine intensité dramatique avec la découverte du dealer découpé en morceaux. Les détenues sont interrogées, Caputo doit rendre compte à sa hierarchie et certains gardiens continuent à mal se conduire. Les flashbacks sur Suzanne Warren révèlent une situation de trop plein émotionnel qui débouchera sur un malheureux accident. Ce qui lui arrive aussi pendant les interrogatoires montre bien sa tendance à être mise à mal par des personnes mal intentionnées la poussant aux pires extrémités. Concernant la "finalité de l'épisode de l'homme découpé", la showrunner opte pour l'isolement en quartier psy pour la principale responsable. Encore une réflexion sur le manque de discernement qu'on condamne au prix cher pour sauver la mise à la communauté.
Les deux derniers épisodes racontent la disparition d'une personnage récurrent.Cela touche car elle semblait avoir retrouver un certain équilibre. En même temps, entre les problèmes de gestion et communautaires à leur paroxysme, Litchfield ne peut connaître qu'un soulèvement des détenues. Nous n'en percevons que le début et on comprend pourquoi l'attente de la saison 5 est énorme et qu'un piratage de ses premiers épisodes ait eu lieu. Le spectateur vu ce contretemps fâcheux risque d'attendre la suite quelques temps. Saison 5. Les trois premiers épisodes replongent immédiatement dans l’ambiance de mutinerie. Le premier mouvement entraine un coup de feu touchant un gardien.La suite dégénérant en évènements pas très glorieux.Animosité et bas instincts reprenant leurs droits.Quelquepart,la volonté des showrunners de faire durer la mutinerie déroute mais prend à contrepied le spectateur une fois de plus.Orange is the New Black n’a rien perdu de son ADN.Des l’épisode 9, on sent que Jenji Kohan n’a plus trop de matière pour sa mutinerie.La série se traîne, est bavarde et le spectateur s’endormirait presque. C’est la première fois qu’une perte de vitesse aussi préjudiciable se fait ressentir.Orange is the New Black se perd dans un militantisme de bas étage et tout le crédit autour de l’exposition de la vie quotidienne des détenues en prend un coup.

Specliseur
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le 18 févr. 2017

Critique lue 474 fois

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