Bish Bosch n’est pas un disque, c’est une déflagration. Un opéra brut, convulsif, où Scott Walker sculpte le silence et tord la langue jusqu’à l’inconfort. Il n’explique rien, il expose. Ici, la beauté est rare, mais lorsqu’elle surgit — dissimulée dans un cri, un souffle ou une percussion suspendue — elle coupe le souffle.
Walker ne compose pas pour plaire : il compose pour percer, gratter, secouer. Sa voix, tantôt prophétique, tantôt grotesque, règne en maître sur un théâtre sonore en perpétuelle déconstruction. C’est l’absurde en musique, Beckett en bruit. Une œuvre cruelle, mais sincère — et d’autant plus fascinante.
Si je ne lui accorde pas la perfection, c’est parce que cette œuvre, par moments, s’emmure dans sa propre énigme. Mais c’est justement ce qui la rend si magnétique : elle résiste, elle refuse de se livrer, et impose au spectateur le rôle de co-créateur.
Bish Bosch n’est pas fait pour être aimé : il est fait pour être ressenti. Et dans cet espace instable entre le choc et la contemplation, il touche quelque chose de rare — presque sacré.